Dirigé par Chrigel Glanzmann depuis ses débuts, en 2003,
Eluveitie est une tribu composée de nombreux membres fluctuant au fil des ans. En 2016, cependant, le château de cartes s'effondra lorsque le batteur
Merlin Sutter fut éjecté du groupe. S'ensuivit une tempête dévastatrice de départs, laissant filer, notamment, la chanteuse originelle et joueuse de vielle à roue, Anna Murphy, ainsi que le guitariste Ivo Henzi ; ces trois artistes formeront alors un nouveau groupe ayant pour nom :
Cellar Darling.
Suite à cela, le leader charismatique dut recruter de nouveaux membres, et c'est ainsi que la violoniste
Nicole Ansperger (de retour après son départ de 2015) répondit immédiatement à l’appel, suivie par le batteur Alain Ackermann, Michalina Malisz à la vielle à roue, Matteo Sisti aux instruments folkloriques, et le guitariste
Jonas Wolf. Enfin, avec l’arrivée en 2017 de leur nouvelle chanteuse et harpiste, Fabienne Erni, ils présentent aux fans leur nouvel album intitulé «
Evocation II -
Pantheon » le 18 août 2017, date à laquelle nous apprenons enfin à connaître le plein potentiel des nouveaux membres du groupe à un niveau plus profond et personnel.
«
Evocation II – Pantheon » est, comme vous pouvez vous en douter, la continuité de «
Evocation I – The
Arcane Dominion », sorti huit ans plus tôt et dont la principale caractéristique était sa composition principalement acoustique, comprenant des morceaux traditionnels tirés du stock habituel d'
Eluveitie. Il ne rentre donc évidemment pas dans une catégorie d'albums
Metal, étant consacré dans son entièreté à la flûte comme caractéristique dominante avec des harmonies de guitare acoustique parmi d'autres instruments folkloriques et traditionnels. C’est avec ce son incomparable et grâce au chant paisiblement serein, accompagné, entre autres, du violon et de la vielle à roue, que ce disque nous transporte dans un fabuleux voyage. En effet, il a été réalisé pour raconter l'histoire mythique d'une aventure périlleuse à travers la nature et l’imaginaire collectif de ce qu’est le pur Folk.
Bref, vous l’aurez compris, les Helvètes nous emmènent dans un univers mystique ayant pour thème le panthéon gaulois et leurs Dieux celtiques dont les différents titres de l’album portent d’ailleurs les noms. L'album fonctionne donc à différents niveaux, chaque chanson correspondant précisément au Dieu pour lequel elle a été créée. Le groupe a d’ailleurs collaboré avec des historiens et des scientifiques pour que les paroles gauloises soient aussi correctes que possible, et de nombreuses chansons font un clin d'œil à des mélodies folkloriques traditionnelles (celtiques) déjà existantes, comme "Ev Chistr 'Ta Laou !", "Scarborough Fair" ou encore "Tri Martolod", qui est certainement la plus connue des trois citées aujourd’hui grâce à sa reprise par la chanteuse bretonne Nolwenn Leroy.
Or donc, ce long voyage au temps de Vercingétorix débute avec la première divinité : "Dureððu", qui décrit parfaitement l’atmosphère générale à laquelle nous aurons droit pendant une cinquantaine de minutes. Cette somptueuse composition nous mène directement au single "Epona", référence à la déesse de la fertilité gauloise, qui nous invite à une danse extatique avec ses solos sauvages de violon et l'interprétation enivrante de Fabienne Erni. À l'opposé, "Lugus", avec sa mélodie entraînante et ses entrées de flûte relâchées, se présente presque puissamment. Il s’agit-là d’un hommage plus que digne à l'une des divinités les plus rayonnantes du panthéon celtique.
Tout au long de ce pèlerinage, vous trouverez estampillés un peu partout de nombreux passages instrumentaux complétés par une voix de fond des plus envoûtantes. Le premier de ces nombreux interludes débute lorsque l’on rencontre "Svcellos", et tout au long de ce périple, vous croiserez ci-et-là : "Tarvos", "Nantosvelta", "Tovtatis", et "Cernvnnos" dans des moments qui sont à la fois épiques, calmes, et pour d’autres, plus rythmés, avec des variations de profondeur selon chacune de ces rencontres.
Poursuivant notre route, nous croisons "Catvrix", qui se démarque surtout par un style épique on ne peut plus sérieux. Il s’agit d’une retranscription typique d'un rituel païen, soutenu par des chœurs masculins qui semblent invoquer un esprit médiéval. Cette invocation est brièvement interrompue par une instrumentation sublime qui émerge en compagnie de la voix de Fabienne Erni, apportant ici ce soutien indispensable, ainsi que sur "Artio", qui est littéralement une piste à capella. S’ensuit "Esvs", soit la piste où cet album semble vraiment prendre tout son sens. Les textures sont intéressantes et cette chanson aurait ce petit quelque chose qui nous rappelle pourquoi «
Evocation I – The
Arcane Dominion » était si attrayant quelques années plus tôt.
Vers la fin de cette pérégrination se trouve "Antvmnos", une reprise de la chanson folklorique anglaise traditionnelle "Scarborough Fair" dans une nouvelle interprétation mystique et rêveuse, suivie par "
Taranis" dont la particularité est qu’elle est l'une des chansons les plus intéressantes de l'album et dans laquelle l'utilisation de plus d'instrumentation est perçue. Il s'agit-là d’un mélange de sons très particulier ; païen et rythmique. C’est une chanson purement instrumentale, dont la fin sert d’ouverture à "Nemeton", un titre fait de soupirs, de voix, de chœurs, de vents et de vibrations qui nous pénètrent profondément (excusez du terme) afin de clôturer ce fabuleux voyage en beauté.
En conclusion,
Eluveitie vient de prouver, une fois de plus, que, parfois, le changement a du bon. Loin de ses méandres
Metal qui, par ailleurs, manquaient dernièrement cruellement d’inspiration (notamment sur «
Helvetios » et «
Origins »), le groupe a su créer ici un album vraiment génial et épique. C'est une œuvre dans laquelle on se sent aspiré. On a vraiment l'impression d'errer dans les sables du temps en regardant un coude de rivière à travers le paysage des Alpes où d’écouter des histoires venues d’un autre temps auprès de conteurs d’aventures au sein d’une auberge de passage tout un dégustant une bon fromage (Suisse bien sûr).
Bref, «
Evocation II – Pantheon » montre le véritable talent du groupe, à l'aise non seulement dans le folk acoustique traditionnel mais aussi dans ses propres interprétations sans tomber dans un fouillis total de flûtes, de cornemuses et de vielle à roue ; et cela, indépendamment du fait qu'il s'agit essentiellement d'un nouveau groupe de neuf membres.
En définitive, ce disque s'adresse à un public plus large. Il y a toutes sortes d'émotions et cela peut être un peu déroutant si vous n'êtes pas d'humeur à vous y attarder car c’est vraiment un disque à part! Pour une immersion totale, la meilleure option avec ce type d’album est de poser un casque sur les oreilles, de fermer les yeux et de laisser votre imagination vous transporter à travers le paysage de ces montagnes helvétiques venues d’un lointain passé.
Je voulais dire que Hevetios était supérieur à Origins qui sonnait trop radiofrendly. Par contre j'aime beaucoup Ategnatos que j'ai un peu délaissé après sa sortie au bénéfice d'autres groupes et albums.
Ah oui je viens de comprendre! 2 ans après Helvetios! J'ai peut être lu trop vite.
Concernant Ategnatos, un album d'Eluveitie ne m'avait plus transporté comme ça depuis Slania! Je le mets dans mon top 3 des disques des Helvètes
selon moi leur meilleur album; il se laisse aller aux émotions et le groupe sort enfin de sa structure musicale (chiante selon moi) qu'ils ont implanté depuis everything remains
@Fonghuet, tout à fait d'accord! J'irais pas jusqu'à dire "le meilleur" mais celui qui les a remis sur le chemin de la créativité! Comme tu le dis si bien, la structure musicale était devenue chiante surtout sur « Origins »
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