Ce neuvième album studio intitulé «
Ànv », voit
Eluveitie puiser dans les profondeurs de l'héritage, de la mythologie, et de la linguistique des anciens Celtes en ancrant le concept de ce nouveau-né dans des textes anciens et des thèmes primordiaux. A l’évidence, le titre de ce nouvel opus évoque donc des origines obscures dérivées, semble-t-il, d'inscriptions millénaires qui créent une tonalité mystique avant même qu'une note ne soit jouée. Qui plus est, il s’agit également du premier album du groupe avec la nouvelle violoniste Lea-Sophie
Fischer qui arrive après la plus longue interruption discographique de
Eluveitie (six ans d'attente depuis «
Ategnatos »), et dont l'arrivée fait suite au départ de la violoniste de longue date
Nicole Ansperger, en apportant avec elle un nouvel éclat à l'instrumentation Folk du combo suisse qui équilibre le son emblématique du groupe avec de subtils éléments nouveaux peaufinés au cours de cette longue pause.
Néanmoins, malgré cette longue pause et l’arrivée d’une nouvelle membre, il convient de préciser que le groupe des Alpes suisses reste quoiqu’il arrive profondément enraciné dans l'histoire, la mythologie et la
Spiritualité celtiques comme en témoigne les singles "
Aidus" et "
Exile of the Gods", sortis respectivement en juin et octobre 2022 qui permirent au groupe de donner le ton pour ce nouveau chapitre de leur parcours musical. Ce faisant, bien que ce nouvel opus ne soit pas décevant en précisant qu’un nouvel auditeur serait certainement impressionné par la fusion parfaite du Folk celtique et du
Metal ; il faut tout de même reconnaitre qu’étant donné que cette horde de païens helvétiques a produit par le passé de nombreux albums qui ont défini le genre, «
Ànv » est loin d'atteindre le record qu'ils ont eux-mêmes établi à l’instar du mythique «
Slania » et plus récemment du splendide «
Ategnatos » pour ne citer que ceux-là !
Ce faisant, comme son prédécesseur, «
Ànv » se caractérise par une forte concentration sur le noyau
Metal, propulsé par une section rythmique agile et polyvalente. Dès lors, la principale différence vient du fait que l'absence d'un joueur de vielle à roue pour compléter le violon de la nouvelle venue Lea-Sophie
Fischer et l'assortiment de sifflets, cornemuses et mandolines gérés par Glanzmann et Matteo Sisti a clairement annihilé la complexité des mélodies folkloriques celtiques traditionnellement très complexes que l'on retrouvait sur les précédents albums d'
Eluveitie (bien que l'esprit celtique soit toujours très présent dans tout le groupe). Dès lors, le choix du groupe de donner à ces instruments des lignes mélodiques plus simplifiées en lieu et place de la vitalité des précédents albums range ce disque dans la catégorie des sortie moyenne de
Eluveitie bien qu’il ne soit clairement pas un échec en soi !
A l’évidence, «
Ànv » est clairement paradoxal car le principal souci vient du fait qu’il ne retient pas la fureur Folk caractéristique des
Eluveitie puisqu’il demeure plus Pop et plus épuré que ses ainés comme en témoigne le single "The Prodigal Ones", qui s'ouvre sur une mélodie franchement joyeuse, mais qui trouverait plus sa place sur un album d'Illumishade. En effet, cette joie et cette mélodie se retrouvent dans le refrain mené par Fabienne Erni et elles contrastent si fortement avec les couplets percutants de la chanson que l'auditeur se demande si le morceau est cohérent ou cacophonique. Ce faisant, ce principal problème de Folk à peine perceptible fait que le reste de l'album repose presque entièrement sur des pirouettes pour équilibrer ce défaut ; à l’instar de "Awen" dans laquelle on remarque à peine la vielle à roue alors que cette ballade demeure assez plaisante, enivrante et superbement conçue ; là ou "Taranoias" et "
Aeon of the
Crescent Moon" sont, avec un violon à peine audible, plutôt toutes deux noyées par la frénésie Death
Metal. Dans le même moule se situe "All is One", une ballade entraînante, légèrement sucrée, qui ne déparerait pas une nouvelle fois sur un disque d’Illumishade. Ce faisant, votre modeste serviteur se doit de préciser que bien qu'il ne s'agisse pas d'une mauvaise chanson, si elle doit être comparée aux autres morceaux du disque, elle ressemblera peut-être plus à une tentative concertée d'écrire un autre favori des fans (comme «
The Call of the Mountains » par exemple) avec une formation renouvelée.
Dès lors, afin de ne pas voir tout en noir (car ce n’est pas le cas), il convient d’évoquer les points positifs de ce disque avec par exemple l'utilisation d'interludes folkloriques qui peuvent être entendus dans l’un des musts de cet opus ayant pour nom "Memories of Innocence", où la touche orientale perçue donne à la mandoline et aux sifflets de Glazmann leurs moments pour briller aux côtés du violon vivant de
Fischer. Citons également "
Premonition", un classique d'
Eluveitie qui aurait facilement pu figurer sur «
Origins » puisqu’on y retrouve des riffs plus texturés, plus savoureux, suivis d'une brève apparition de flûte et d'un violon entraînant sur le refrain ; à l’instar de "The Harvest" qui suit une formule presque identique mais avec plus d'intensité, ce qui permet de le ranger dans la catégorie des morceaux plus fort que l’on entendait sur «
Helvetios ». A l’inverse, le titre éponyme ressemble plus à un extrait de «
Evocation II » car sa musique informe le rend oubliable et l’auditeur saura à quoi s'attendre avant même que le morceau n'atteigne la minute (bien que le chant d'Erni reste passionné et prenant).
Du reste, le morceau d'ouverture intitulé "Emerge" est un prélude instrumental mélancolique qui s'enfle d'une atmosphère cinématographique, de sifflements, de percussions et de chants lointains annonçant un rassemblement tribal ; tout comme "Anamcara", un bref morceau acoustique où des guitares douces et un passage parlé (fidèle à son titre, qui signifie "âme amie" en vieux gaélique) imprègnent ce titre d'une atmosphère rituelle. Enfin, l'auditeur ressentira un sentiment de clôture satisfaisant lorsque les dernières notes de "
The Prophecy" s'estomperont puisqu’il aura l'impression que «
Ànv » l’aura emmenés dans un voyage englobé de brumes d'un savoir ancien aux feux d'une scène moderne.
En définitive, les quelques faiblesses de l'album proviennent de son audace, et après l'impact considérable de «
Ategnatos », il était écrit qu’il serait difficile pour
Eluveitie de rééditer cet exploit avec la même force. Indéniablement, nous savons tous que les bouleversements de changement de line-up affectent la qualité d’un travail (récemment,
Nightwish en est le plus bel exemple) quelle que soit sa nature. Ce faisant, je mets au défi quiconque a récemment subi le même tourbillon que ce groupe remarquable de réaliser un album aussi bon que «
Ànv », car (à défaut de me répéter) bien que cet album puisse paraitre quelque peu décevant par rapport à d’autres disques pourtant solide avec plusieurs titres remarquables ; ce nouveau-né demeure dans son ensemble (hormis quelques faux pas) tout de même accrocheur et agréablement diversifié, même s'il ne parvient pas toujours à apaiser les incertitudes quant à son identité.
Bref, «
Ànv » est un paradoxe qui possède une beauté naturelle et une joie pure qui est dotée d’un équilibre entre lumière ancienne et obscurité moderne qui donnera envie à l’auditeur de l'écouter malgré ses lacunes. Dès lors, il serait juste de le décrire simplement en disant que parfois, il y a des disques qu'on finit par aimer, et d’autres qu'on déteste profondément.
Assurément, c’est à tout un chacun de décider dans quelle catégorie il devrait se situer. Néanmoins, il reste sans aucun doute une étape importante pour
Eluveitie et il ne doit absolument pas être négligé dans leur discographie.
Pour ma part, je n'ai pas réussi à apprécier du tout.
Eluveitie propose la même structure et le même album depuis des lustres. En fait Evocation 2 était fantastique, mais cet album-ci, quel ennui!
"Evocation II - Pantheon" est le meilleur album du groupe et de loin.
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