Les p'tits suisses d'
Eluveitie sont de retour ! Révélé aux oreilles de tous avec leur album
Spirit en 2006, dont le folk métal ravageur fit l'effet d'une bombe au milieu d'une scène du pagan/vi
King métal qui commençait alors à prendre son envol, le combo suisse en est déjà à sa quatrième galette, pour le plus grand plaisir de ses nombreux fans ! Un quatrième album qui marque le retour au délicieux mélange entre instruments traditionnels (flûtiaux, vielle à roue, violon irlandais ...) et puissant death mélodique - fortement inspiré par ce qui se fait du côté de Göteborg – propre aux deux premiers albums du groupe, après la «pause » que fut le controversé
Evocation I - The
Arcane Dominion, album de pur folk acoustique.
Un retour à la recette traditionnelle du groupe qui était donc particulièrement attendu après une tentative d'album acoustique qui en a décontenancé plus d'un. Inutile d'y aller par quatre chemins, pour un retour à la recette traditionnelle, c'est réussi ... Peut être même trop ! Cela peut paraître surprenant comme formulation mais c'est en effet à la fois la plus grande force et la plus grande faiblesse de ce Everything
Remains (As It
Never Was) :
Eluveitie fait du
Eluveitie. Et forcément,
Eluveitie le fait bien !
Car, oui, l'album est une vraie réussite et c'est avec un plaisir non dissimulé qu'on retrouve la patte du combo suisse, qui reste nettement au dessus de la moyenne de ce qui se fait dans le genre à l'heure actuelle. Seulement, voilà, il faut reconnaitre que le groupe n'innove plus vraiment et nous propose donc un album convenu, qui ne surprendra guère les fans. Une sorte de condensé léché de ce qu'il sait faire, un
Slania II mixé avec des influences issues d'
Evocation I et de
Spirit. À vrai dire, je crains que le groupe ne subisse pendant encore longtemps le fait d'avoir un premier album tellement réussi que tous leurs albums derrière souffriront inévitablement de la comparaison. Parlez-en aux Guns N'Roses, tiens par exemple ! Oui, je sais, la comparaison est osée.
Si la comparaison avec
Slania parait évidente en termes de style musical, mais aussi en terme de production, très « léchée » et très moderne (peut être même trop pour un groupe qui se revendique très traditionnel et proche de ses racines ancestrales dans ses textes ?), les deux albums différent toutefois dans leur homogénéité. Après un
Slania très homogène, où toutes les chansons s'enchaînaient de manière (peut être) trop parfaite pour qu'on puisse suffisamment les distinguer les unes des autres, Everything
Remains (As It
Never Was) s'affirme en effet comme une production beaucoup plus hétérogène, où le sublime côtoie le décevant, où le léché côtoie le bâclé.
L'album s'ouvre sur Otherworld, sublime introduction qui me fait inévitablement penser à la bande originale de Braveheart et qui nous invite donc de la plus belle manière à redécouvrir cette Helvétie que l'on aime tant. Un début d'album de toute beauté donc, qui n'est pas terni par la chanson suivante, très originalement intitulée Everything
Remains (As It
Never Was). Tout commence par une intro aux accents folk du plus bel effet pour ensuite retrouver le chant de Chrigel, fidèle à lui-même : Mélodique et plus puissant que jamais (encore une fois, la production « made in
Nuclear Blast » est vraiment très moderne et impeccable, même si je ne peux m'empêcher de penser qu'on y perd quelque peu en authenticité, surtout pour un groupe n'hésitant pas à jouer sur la corde traditionnelle et folklorique). Mais un Chrigel qui n'est seul au chant puisqu'au bout de quelques secondes, on découvre avec plaisir qu'il est accompagné par Anna au chant féminin. On a ainsi droit à un morceau qui mélange subtilement voix féminine, puissant chant death et instrumentations folkloriques : Une belle réussite qui sera assurément l'un des futurs tubes du groupe.
L'album semble donc partir de la plus belle des manières et on se dit qu'on tient là un nouveau joyau de la part des p'tits suisses lorsque là ... Patatra ! Voilà qu'arrive Thousanfold, titre qui a été choisi comme premier clip. Un choix à vrai dire surprenant à mes yeux (et mes oreilles) tant il y avait plus intéressant comme morceau sur cet album (Quoth The
Raven ou Everything
Remains (As It
Never Was) par exemple). Non pas que Thousanfold soit mauvais en soit ... Mais il est juste beaucoup trop quelconque, trop simple, trop « facile », trop convenu. Bref, trop décevant surtout quand juste avant on a eu droit à un morceau d'une toute autre qualité. Et on touche là du doigt le principal défaut de cet album, sa trop grande hétérogénéité. Une hétérogénéité entre les morceaux donc, avec quelques très bons morceaux (mention spéciale à Quoth The
Raven, sans aucun doute la chanson la plus aboutie et la plus travaillé de l'album, avec beaucoup de variations entre les instrumentations folk omniprésentes, le duo chant masculin/féminin, et avec même un petit passage narratif à la fin, mais des titres comme (Do)
Minion ou Sempiternal
Embers s'en sortent également avec les honneurs) qui ont du coup tendance à éclipser les autres, qui en comparaison apparaissent trop « banals » et pas franchement originaux quand on connait
Eluveitie. Mais également (et c'est peut être plus gênant) une hétérogénéité au sein même des morceaux, assez flagrante sur certains. Ainsi, rien à redire sur l'intro de The
Essence of the
Ashes ou de Nil, toutes les deux très réussies, mais il est dommage que ces deux morceaux se « perdent » ensuite dans des couplets et des structures assez répétitives et lassantes. Toutefois, ne boudons pas notre plaisir car même au sein de ce côté un peu répétitif et de chansons assez inégales, on est régulièrement pris au jeu et on se surprend plus d'une fois à esquisser des p'tits mouvements de la tête ou des pieds sur certains passages, preuve qu'une fois les déceptions de l'album passées à la trappe, certains titres et leurs refrains fédérateurs (Je pense à (Do)
Minion, The
Essence of the
Ashes ...) devraient pourvoir nous enjouer en live. Rendez vous est pris lors des prochains shows du groupe.
Un dernier point que je voudrais aborder, les morceaux acoustiques de transition que sont Isara et Selton : S'il y a bien un point sur lequel
Eluveitie a progressé (comme quoi, l'expérience d'
Evocation I a dû payer), c'est bien celui-là. Il n'y a rien à dire, ils sont parfaitement réussis. Quel dommage qu'on n'ait pas eu droit à un morceau de la trempe de Selton sur le précédent album (même si son positionnement entre les deux morceaux très puissants que sont (Do)
Minion et Sempiternal
Embers me chiffonne quelque peu) !
Après 47 minutes de voyage dans des terres suisses que nous connaissons bien, il est désormais temps de terminer cet album. Tout d'abord avec le morceau le plus original de cet album, Lugdunon. Un morceau très surprenant, une sorte de pied de nez final après un album qui n'était justement pas franchement placé sous le signe de la surprise. Assez simple, sans doute trop, il ne plaira assurément pas à tout le monde, mais personnellement je le trouve relativement frais (jusqu'à ce que je m'en lasse peut être ?), et il a au moins le mérite de sortir quelque peu des sentiers battus. Et puis la touche finale, The
Liminal Passage, écho final à la très belle introduction de cette galette.
Vous l'aurez compris, Everything
Remains porte en fait très bien très son nom (d'où le titre de ma chronique) :
Eluveitie n'a pas franchement fait dans l'originalité avec cet opus et décevra ceux qui attendaient un renouveau de la part du combo suisse ou un retour à quelque chose plus proche de
Spirit que de
Slania. Toutefois, les cages à miel de ceux qui ont apprécié
Slania (et je sais qu'ils sont nombreux) devraient pour autant apprécier ce nouvel opus, tant la recette ne semble pas avoir changé d'un iota et semble mélanger astucieusement les acquis musicaux des deux derniers opus. De toute façon, je ne fais pas de soucis pour le succès de l'album, mon petit doigt me dit que vous devriez revoir l'artwork de la pochette (très joli, cela dit) très souvent du côté des catalogues de
Nuclear Blast. Bref, l'efficacité musicale, toujours aussi présente (et nettement supérieure à la moyenne), est à saluer, mais j'aurais aimé saluer aussi un peu plus d'originalité.
N'oubliez pas, les bonnes recettes sont aussi celles qui savent se renouveler à temps, avant de lasser. Ça marche aussi pour les p'tits suisses.
Certes Eluveitie a, en mon sens, perdu la magie de leurs début mais faut quand même pas pousser. là franchement je suis bien "mdr" par ce que tu as dis mariosmash !
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