Liste des groupes Folk Death Eluveitie Ategnatos

"Ategnatos est un mot gaulois qui signifie 'Renaître'. Pour l'esprit aiguisé, il indique la clé cachée depuis longtemps oubliée du changement et du renouveau."
Tels sont les mots cités par Chrigel Glanzmann pour décrire le dernier-né des Helvètes.

Ce nouveau disque pourrait être considéré comme un retour aux racines plus metal du groupe car son prédécesseur, « Evocation II - Pantheon », était le deuxième effort acoustique du combo suisse ; état de fait montrant, une fois de plus, à quel point Eluveitie est flexible en termes de styles musicaux. Et tout comme celui-ci, ce nouveau-né dans la carrière des Suisses se compose en grande partie de chapitres de longueur modérée et qui sont tout aussi faciles à digérer.

Le thème général est, par ailleurs, fortement ancré dans la musique et les paroles. Soulignons que, même s'il peut être très facile d'établir des parallèles avec le changement de line-up d'Eluveitie, cela ne ressemble pas à quelque chose qui a été intentionnellement ciblé ou promu par le groupe. Nous avons ici un travail très cohérent et toutes les chansons sont fortement liées au concept, s'enchaînant en douceur. En effet, Il n'y a pas de changements rapides de musique ou d'humeur.
Dans l'ensemble, le mélange est bien équilibré et les éléments folkloriques, placés de manière judicieuse. S'il y a quelques sections où les voix et les chœurs auraient pu être davantage mis en relief pour vraiment en souligner l'importance, le groupe a néanmoins atteint un bon équilibre.

En ce qui concerne le chant, Fabienne Erni fut une belle surprise au regard de sa prestation sur le précédent opus. Alors que de nombreux fans pleurent encore la séparation avec l'ancienne chanteuse, Anna Murphy, et où bon nombre d’entre eux ont encore des doutes sur la capacité de la jolie rousse à évoluer dans un registre en dehors des albums acoustiques, la belle démontre sur « Ategnatos » qu'elle est plus que capable d'aider à élever le groupe d'une manière qui n'aurait pas été possible auparavant.
En effet, de nombreuses chansons ne fonctionneraient tout simplement pas sans la grâce, la passion ou la puissance qu’elle met dans sa prestation vocale. Des morceaux comme "Ambiramus", "The Slumber'" et "Breathe" sont portés par sa seule performance, tandis que sa chorale et sa voix d'accompagnement sur des morceaux comme "Threfold Death" ajoutent une plus grande profondeur au son global. Son utilisation de la harpe est également assez fréquente dans de nombreux morceaux et ajoute un certain rayonnement à chaque apparition.

De ce fait, dès le morceau d'ouverture (qui est également le premier single), l'éponyme "Ategnatos", nous avons un glorieux exemple de ce que nos petits Suisses savent faire de mieux. Le groupe permet rapidement à ses influences metal de s'infiltrer, les guitares électriques ajoutant un énorme mur de son tandis que les couplets s'ouvrent sur un refrain épique où Fabienne nous envoie des frissons, là où les mélodies folkloriques ainsi que les incorporations exceptionnelles de la harpe font partie des plus entraînantes que le groupe ait pu faire depuis depuis « Slania ». S’ensuit le petit interlude très latin "Ancus" qui nous ouvre “Deathwalker”, l'un des nombreux points forts de l'album où la vielle à roue ouvre tout. Cette chanson est une délicieuse combinaison d'éléments mélodiques lourds avec des battements de tambour percutants et une touche délicate de voix envoûtantes.
Ensuite, nous avons un certain contraste musical de ce que nous avons pu entendre jusqu'à présent avec "Black Water Dawn", composé avec une approche beaucoup plus mélodique et une performance vocale un peu apaisante où le chant de sirène d'Erni monte en flèche, amenant le groupe dans un solo de guitare des plus évocateurs.
S'ensuit une belle instrumentation folklorique accompagnée de percussions qui nous indique que "A Cry in the Wilderness" débute avant d'accélérer pendant quelques couplets intenses et rapides. Ce titre a une belle combinaison d'instrumentation folklorique et de travail de guitare qui façonne une atmosphère très lourde, et à la fois amusante, avec Chrigel délivrant des grognements épiques pendant le refrain pour se transformer en un chant folklorique qui prépare le terrain pour "The Raven Hill". Ici, nous avons droit à une explosion de guitares granuleuses et des grognements primaires de Glanzmann extrêmement accrocheurs, et qui pourrait être un excellent morceau à jouer devant des foules et de nouveaux auditeurs car il est assez bien rythmé.

De nouveau, un interlude pointe le bout de son nez ! Nommé "The Silvern Glow", il nous amène au second single, "Ambiramus", l'un des morceaux les plus mélodiques, déguisé en hymne metal. La voix apaisante d’Erni y apporte une ambiance différente après l'explosion de l'introduction, explorant presque une ambiance de ballade rock. Les refrains sont vraiment étonnants, et c'est incroyable d'entendre ces deux voix si radicalement différentes, mais si parfaitement accordées l'une à l'autre. C'est certainement l'une des chansons les plus distinctives et les plus savoureuses de cet album.
À l'inverse, "Worship" est un hymne sombre qui évoque une atmosphère infernale, mais avec une plus grande dextérité musicale et un penchant folk omniprésent. Deux autres pistes, "Mine is the Fury" et "Threefold Death", avec leurs rythmes explosifs, apportent un nouveau degré de lourdeur et d'intensité au groupe, ce qui confère à l'album un sentiment de variété et de fraîcheur. Les éléments folkloriques sont à leur maximum, accompagnés d’une narration atmosphérique donnant un sens palpable à l'histoire, tandis que les rythmes, les mélodies, le violon, la vielle à roue et divers sifflets sont tous utilisés à bon escient.
La dernière partie s’ouvre sur le troisième single, "The Slumber", combinant un mélange de voix dures et claires, obtenant ainsi un résultat plus dramatique et contrasté. Ce morceau permet à Erni de passer un moment sous les projecteurs alors que Glanzmann tisse sa bestialité autour d'elle. "Breathe", quant à elle, adopte plus une approche mélodique à l’inverse de "Rebirth" qui démarre avec un tempo fulgurant et une interprétation agressive suivie de riffs rapides qui cèdent la place à un air de flûte enjoué ainsi qu’à un tempo plus lent.
Enfin, pour terminer ce flot d’inspirations percutantes, "Eclipse", avec la voix de la délicieuse Fabienne qui semble débiter une ode sous la pluie battante et qui conclue admirablement cet album magistral.

Conclusion, les Helvètes sont revenus en trombe d’une merveilleuse manière, produisant peut-être depuis « Slania » leur meilleure sortie et également la plus dynamique à ce jour ! Les fans de longue date du groupe et les plus récalcitrants peuvent respirer et devraient/doivent être satisfaits, car la nouvelle venue a parfaitement rempli la mission difficile de faire « oublier » Anna Murphy.
Ce qui rend cet album vraiment spécial, c'est que le groupe ne s'est pas contenté de créer des sons détaillés et de magnifiques arrangements avec chaque chanson. En effet, ils ont pris du recul pour pouvoir saisir une image et un sens plus large afin de définir d'une manière très travaillée le style général de l'album.

En définitive, « Ategnatos » est une œuvre très intéressante et bien réfléchie. Il n’est sans doute pas pour tout le monde leur meilleur album, mais, comparé aux deux derniers en date (en ne tenant pas compte de « Evocation II »), il n'est pas plus faible ! En effet, à son écoute, une impression de renouveau vers une nouvelle voie semble déjà susceptible d’être perçue.