Inutile de présenter
Nargaroth. Connu comme l’un des groupes les plus influents et les plus controversés de la scène black allemande, la troupe menée par
Ash – alias Kanwulf - depuis maintenant plus de vingt ans est loin de faire l’unanimité : du lancinant et mélancolique
Herbstleyd à l’excellent
Jahreszeiten, en passant par le véhément et inégal
Black Metal Ist Krieg ou les poussifs et bien trop répétitifs
Prosatanica Shooting Angels et
Semper Fidelis, les Allemands ont rarement laissé indifférent, et la personnalité fantasque ainsi que le goût de la provocation de leur frontman n’y sont sans doute pas pour rien.
Toujours est-il que
Spectral Visions of Mental Warfare, dernier album de
Nargaroth datant tout de même de 2011, avait laissé un amer goût d’inachevé en bouche, montrant un groupe s’essayer à un black ambiant poussif saupoudré de quelques expérimentations électroniques incongrues. Autant dire que la plupart des amateurs du combo avait été cruellement déçus.
Qu’en est-il donc de ce nouvel opus,
Era of Threnody, qui voit
Ash signer sur
Inter Arma Productions et revenir après un si long silence ? C’est
Dawn of Epiphany qui nous donne un début de réponse, avec ce sample tiré du film
Armageddon et un arpège mélancolique et poignant qui se teinte de chaudes fragrances flamenco. Puis des chœurs froids, et un riff lent, pesant et désolé, presque doom, renforcé par une basse impitoyable de lourdeur viennent s’emparer de nos sens, nous plongeant dans un océan de tristesse hébétée. Nous avons là l’un des meilleurs morceaux de l’album, lent, majestueux, mélancolique et d’une beauté simple et touchante, d’une intensité parfaite malgré son rythme plutôt lent. Le riffing est merveilleux de feeling, la voix de
Ash, écorchée et emplie de souffrance, mène parfaitement la musique qui réussit à se faire à la fois entraînante et bouleversante d’émotions, avec cette mélodie lancinante qui revient nous hanter comme un leitmotiv. A ce niveau- là, il convient tout de suite de souligner que la production est très bonne, propre, puissante et profonde, mettant en valeur tant la voix que tous les instruments, avec un son de guitare très travaillé retranscrivant idéalement le grain saturé si propre au genre ainsi que les différentes couches de cordes qui composent l’ossature de la musique.
Les perles s’enchaînent, longs morceaux emplis d’une sensibilité à fleur de peau, regorgeant d’arrangements et de trouvailles subtils (plusieurs parties acoustiques typées flamenco, comme sur As Orphans Drifting In A
Desert Night ou le titre éponyme, de nombreux chœurs et parties de chant féminin, qui, combinées à ce riffing noir, lent et pesant, ajoutent une coloration romantique et presque gothique à l’ensemble, quelques parties de violon, claviers ou samples discrets qui épaississent l’ambiance) qui composent un ensemble de pas moins de 67 minutes d’une richesse et d’une qualité irréprochable : si par le passé, quelques titres pouvaient sonner un peu approximatifs, true attitude oblige, il n’en est rien sur cet album, professionnel jusqu’au bout des ongles, à l’artwork, au son et aux compositions très soignés et exécutés par des musiciens confirmés.
On retrouve principalement le
Nargaroth que l’on aime, avec de longs titres lancinants, de nombreuses parties instrumentales qui nous emportent et de belles montées en puissance qui nous font frissonner :
The Agony of a
Dying Phenix est un autre moment fort de
Era of Threnody, incarnant parfaitement la majesté, la froideur, la mélancolie et la puissance du black metal, totalement envoûtant dans ses mid tempi oniriques et tranchant lors de ses passages blastés, restant d’une profondeur mélodique et d’une beauté glaciale saisissante tout le long de ses 7,53 minutes. La deuxième partie est plus aérienne et feutrée, menée par une guitare lead aux interventions lumineuses qui nous berce dans une pluie de notes apaisantes et harmonieuses, semblant annoncer la résurrection du phénix.
La force des Allemands, c’est de réussir à sortir un album plutôt varié et complet, qui, même s’il offre des morceaux de plus de six minutes principalement axés sur les harmonies, est capable de varier les rythmes et de nous envoyer quelques titres plus directs et rapides, comme le très groovy et rock n’ roll Love is a Dog from
Hell avec ses 2,51 petites minutes au compteur, son riff terriblement entraînant, cette basse qui claque comme un fouet, ce petit solo qui va bien et ce chant hargneux et scandé qui font leur petit effet. On termine en douceur sur un My
Eternal Grief,
Anguish Neverending suintant la mélancolie et la tristesse, avec ce chant clair grave et froid comme une pierre tombale, ce rythme lent et hypnotique et cette basse insidieuse qui vient nous remuer le cœur de ses sanglots graves et saccadés. Le tout se termine sur cette litanie plaintive et désolée entonnée par la voix sentencieuse d’
Ash et portée par un arpège apaisant ainsi que le bruit des vagues qui amènent un silence salvateur qui efface tout.
Nargaroth n’a pas sorti que des chefs d’oeuvre, c’est un fait, mais
Era of Threnody fait incontestablement partie des meilleurs albums de la formation, offrant dix compositions peaufinées à l’extrême qui ne pourront pas laisser indifférents les amateurs de black mélodique, mélancolique et envoûtant. Que ceux qui avaient condamné définitivement les Allemands revoient leur jugement et prennent le temps de jeter une oreille sur cet album excellent car, à l’évidence, tout comme le phénix dont il décrit l’agonie,
Ash aussi semble capable de renaître de ses cendres.
Cependant je trouve le chant bien trop en avant(en tout cas au casque) et un peu monotone, manque de relief, enfin c'est le problème que j'ai toujours trouvé chez Ash.
Sinon dans l'ensemble, très très bon album, là ils ont fait fort.
Album diversifié et avec des mélodies sympas, mais j'ai définitivement trop de mal avec la voix sur tous les albums, qui de plus est encore une fois trop mise en avant comme l'indique Morkhor. Tant pis, Nargaroth ce ne sera pas pour moi!
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