A l’approche de son trentième anniversaire, les Illinois de
Disturbed se sont sacrément essoufflés depuis une bonne décennie. Si on se rejoue de temps à autre avec un immense plaisir les premières pièces du groupe pour un instant de nostalgie, un flashback pour certains à leur innocente période adolescente, pour revivre cet immense engouement qu’était le neo metal à la fin des années 90/début des années 2000 ou pour simplement se remémorer le bon vieux temps, les tableaux plus récents du quatuor américain peinent réellement à faire perdurer cette magie. Et ce n’est pas le second groupe de Sir David Draiman qui nous contredira, une formation qui se veut plus industrielle mais qui s’avère n’être qu’un clone de son collectif initial, l’inspiration et l’aboutissement en moins.
Bien qu’une infime lueur d’espoir renaissait à l’arrivée d’
Immortalized sept ans auparavant, certes sans grandes évolutions mais à l’énergie communicative et à un David Draiman toujours époustouflant vocalement parlant, ce début de renaissance s’est vite dissipé à l’annonce d’
Evolution quatre printemps après. Nos Américains ont pris un certain risque en s’éloignant de leur néo chéri pour s’installer dans un hard rock/heavy metal somme toute assez banal.
Et si le quatuor a déjà démontré son aisance, sa profondeur ainsi que sa patte émotionnelle sur certaines de ses balades comme l’incroyable
The Sound of Silence ou même
Darkness sur l’album
Believe, celles présentes sur ce
Evolution étaient dans leur ensemble plus ou moins oubliables. Le
Condor arrivera-t-il à renaître de ses cendres ou bien ce dernier opus marquera définitivement la nouvelle empreinte de
Disturbed ?
Pour le savoir, penchons-nous sur le huitième opus studio du groupe américain intitulé
Divisive. Annoncé seulement deux petits mois avant sa parution et produit par Drew Fulk (
Chelsea Grin,
Motionless In White,
Fit For A King), le collectif s’est fait à nouveau discret quant à ce nouveau méfait. Ce dernier atteste également du grand retour de The Guy, la mascotte si chère du quatuor.
Dans son contenu, nos Illinois n’affichent pas de réelles révolutions. On peut d’ailleurs aisément dire que
Disturbed fait du
Disturbed mais à l’inverse d’un
Evolution, il le fait très bien. Le titre d’ouverture
Hey You, dans son riffing et même dans son écriture ressemble en tout point à
Are You Ready ? du précédent opus. Rien de spectaculaire sur ce premier jet, l’énergie et l’essence du groupe sont bien vivants, le rythme est super accrocheur, David Draiman continue à montrer sa dextérité qu’il s’agisse de sa palette vocale ou de son éloquence, notamment après le second refrain où le rap fait son apparition et nous rebascule dans les prémices du collectif. De même, la certaine noirceur des riffs dans les couplets ainsi que les éléments électroniques sont un témoignage d’un
The Sickness ou d’un
Believe.
La lancée se poursuit avec
Bad Man, un titre puissant, punchy à souhait et excessivement lourd par son riffing. Là encore, la recette reste identique mais fonctionne plutôt bien. On pourra même profiter d’un petit solo pour la pointe de diversité. Comme toujours, le lyrisme est un point d’orgue dans la musique de nos Américains et le morceau et plus globalement l’album ne déroge pas à cette règle. Le quatuor persiste dans sa quête de la révolte et de la résistance qui s’inscrit parfaitement dans les actualités.
A l’approche de la cinquantaine, David Draiman montre qu’il arrive encore à bien pousser dans les aigues, comme une certaine forme de sa jeunesse des années 90/2000. C’est le cas notamment sur la composition éponyme où les « Stop Judging Me » sont une preuve même de la pureté mais aussi de la hargne de notre frontman. Le vocaliste se permet même certaines références de ses précédentes pièces : c’est le cas de Part Of Me avec le classique « Ooh wah ah ah ah » hurlé comme les premières fois, accompagné même d’un breakdown quelque peu déguisé.
Si la magie opère sur une majorité des écrits, certains manuscrits peinent pourtant à convaincre et marquent un certain relâchement de nos musiciens.
Feeding The Fire est l’archétype même d’un titre ultra-simpliste, peu engageant par son chant fatigué, par un rythme excessivement mou et sans réel passion, totalement vide dans sa forme.
Love To
Hate suit ces mêmes lignes, même si l’on sent un chanteur plus autoritaire et déterminé dans sa prestation vocale. Malheureusement, le morceau soumet un refrain très insipide, des attraits mélancoliques assez redondants et surtout une prévisibilité qui nous plonge quelque peu dans l’ennui. Même si les paroles se veulent toujours aussi abouties, où
Disturbed nous propose une réflexion sur la condition humaine et les raisons de détester ses semblables, l’aspect plus tragique, poignant demeure complètement absent pour un rendu brouillon.
Le véritable étonnement de
Divisive concerne Don’t Tell Me puisqu’il s’agit du tout premier featuring du quatuor américain. Accompagnée donc d’Ann
Wilson, chanteuse du groupe de rock
Heart, la balade est un souffle frais au sein de la discographie du groupe. La voix de David Draiman se veut bien différente qu’à l’accoutumé, le sentiment de tristesse se fait vivement ressentir, principalement lorsque le timbre d’Ann
Wilson apparait. La progression se fait plutôt lentement avant une explosion en milieu de composition. Ce chagrin est par la suite accentué par un somptueux solo de guitare, un profond déchirement pour une chanson qui aborde le sujet du divorce du guitariste Dan Donegan. L’association des deux vocalistes est touchante, surprenante, une harmonie et une émotivité remarquables.
Divisive s’inscrit dans la continuité de ce que nous propose
Disturbed depuis bon nombre d’années, même si un esprit d’antan semble se réveiller après plus de deux décennies de sommeil. Si les Illinois tombent parfois dans l’élémentaire, la redondance et la familiarité, ils peuvent compter sur une production musclée ainsi qu’à un David Draiman des grands jours pour gommer partiellement ces imperfections. Après le très décevant
Evolution, le quatuor est donc de retour sur une direction certes basique mais diablement efficace. Néanmoins, si la mayonnaise continue encore à prendre, nos musiciens devront en montrer beaucoup plus lors de leur prochaine apparition afin que notre intérêt continue à subsister.
Je suis clairement d'accord ! Merci pour cette très bonne chronique.
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