Killswitch Engage, c'est avant tout une histoire de cycles, ponctué par les va-et-vient de ces différents chanteurs. Un premier cycle, qui prend racine en 1999 dans le Massashussets suite à la dissolution des groupes
Overcast et
Aftershock et qui donne naissance à un album éponyme un an plus tard, posant les bases d'un genre (le metalcore) encore peu connu. Faisant suite à cette offrande, un deuxième album "
Alive or Just Breathing" apporte un peu plus de visibilité au groupe, et ravit de par sa maîtrise, la variété de ses compositions et la fusion incroyablement juste entre hardcore et heavy metal. Mauvais coup du sort, Jesse Leach, vocaliste de l'époque, quitte la navire, d'une façon très mystérieuse. Il est alors remplacé par Howard Jones, qui emmènera
Killswitch Engage dans les contrées verdoyantes du succès critique et commercial, avec les excellents "
The End of Heartache" et "
As Daylight Dies". La formule finit cependant par s’essouffler, notamment face à une nouvelle génération talentueuse guidée par
Trivium,
Parkway Drive et autres
As I Lay Dying; le quatrième album du groupe, malgré son niveau honorable, se fait vite oublier. Expérience prémonitoire, Howard Jones donne sa démission peu de temps après, disant manquer d'enthousiasme pour continuer l'aventure. Malgré la rumeur persistante selon laquelle Phil Labonte aurait pu être le prochain chanteur, Jesse Leach est rappelé au front, une bénédiction pour celui qui était resté dans l'ombre depuis sa première éviction, en dépit du talent exprimé dans
Times Of Grace et
The Empire Shall Fall.
Nous y voilà donc. Avril 2013,
Killswitch Engage renaît pour un nouveau cycle avec ce "
Disarm the Descent", plus que jamais épreuve primordiale pour l'avenir du groupe, en perte de vitesse dans un genre outrageusement dominé par quelques indétrônables.
Les premières écoutes confirment la tendance annoncée par les titres dévoilés en avant-première: retour à une production enfin digne de ce nom et à une musique directe, rapide et fulgurante, loin de la lenteur agaçante de certaines parties de "
Killswitch Engage II". C'est souvent dès l'intro que le ton est donné, avec un rythme cursif sur “
Beyond The
Flames” ou encore “
In Due Time”, qui peut à peine reprendre son souffle le temps d'un refrain. Cette vélocité qui parcourt l'album est à relier à la volonté de répudier le metalcore gadget qui se développe depuis quelques temps, qui ne cesse de s'auto-parodier à force de surenchère technique et/ou artificielle. Bien au contraire,
Killswitch Engage fait preuve ici d'une audace toute particulière, en renouant avec un metalcore certes mélodique et accessible, mais qui prend quand même ses distances avec l'aspect très tubesque de la musique expérimentée à l'époque Howard Jones. On pense d'avantage à un "
Alive or Just Breathing" (moins vorace néanmoins) ou à un
Times Of Grace pour définir l'armature de "
Disarm the Descent": retour de solos, des guitares plus inspirées et harmonieuses, moins camouflées entre elles, des mélodies plus suaves et subtiles, à l'instar de la superbe digression amorcée sur “All
That We Have”, juste avant l'allure sinueuse de “The Call” qui suit l'intonation enrayée et délicieusement irrégulière de Jesse Leach, pour enfin exploser sur un refrain blasté qui fait d'autant plus ressortir la clarté du chant. La mystique “
Always”, au tempo très lourd, parachève cette impression, et se détache singulièrement des ballades du genre.
La conviction d'écouter un metalcore plus frugal, plus immédiat, et tout à la fois plus inspiré, est cependant ambiguë. En effet la première moitié de l'album s'enlise dans cette élémentarité, en enchaînant mécaniquement des compositions efficaces mais qui peinent à se différencier, ainsi “
The Hell In Me” malgré son refrain accrocheur pourrait facilement être substituée à "
Beyond The
Flame", qui elle-même n'est pas plus éclatante que "A Tribute To The
Fallen". Individuellement, le charme est immédiat, mais l'inclination s'érode dès que l'on évoque la perspective d'ensemble. Il faudra attendre (coïncidence?) le titre "The Turning Point" pour que Jesse Leach et ses collègues déploient un metalcore moins cadenassé, libéré des chaînes inconscientes d'une confiance encore fragile qui trouve un appui permanent sur la prudence conférée par certains acquis. Ce n'est qu'alors qu'on peut savourer pleinement ce metalcore plus sophistiqué et qui reste toutefois d'une efficacité indéniable, à l'image de l'incontournable refrain ambiancé de "You Don't
Bleed" ou d'un "
End In Sight" plus fouillé, à la structure plus progressive, qui rappellera notamment le "Willing" de
Times Of Grace.
Si la référence au groupe
Times Of Grace est récurrente, c'est qu'elle permet assez bien de cerner les intentions cachées derrière "
Disarm the Descent", à savoir le retour à une certaine subtilité, déjà évoquée plus haut. Elle sert également à en dresser les limites et mettre à jour des détails qui s'apparentent à une certaine déception : tout d'abord, le chant de Jesse Leach, s'il est impérial sur les passages clairs, manque de conviction pour ce qui est des passages hurlés, on ne retrouve que très sporadiquement ce chant déchiré et rocailleux qui se manifestaient sur les deux premiers albums de
Killswitch Engage et dans
Times Of Grace; ensuite, l'effort de composition aurait pu être poussé d'avantage, la peur de la prise de risque se faisant ressentir. Si
Killswitch Engage peut se vanter de revenir avec un album nettement au dessus de la moyenne, le manque de folie lui bloque aussi la frontière entre le bon et le génial.
Néanmoins le constat est là : ce nouveau cycle est à placer sous le signe de la renaissance, encore incomplète certes, mais en bonne voie. "
Disarm the Descent" est d'une justesse admirable et donne lieu à un metalcore moins calibré « radio », plus exalté, bien que toujours fidèle à sa classification de metalcore mélodique. La période Howard Jones est définitivement oubliée,
Killswitch Engage entre dans une nouvelle ère qui pourrait lui garantir une place de choix dans le paysage du metal moderne, à condition que la prochaine fois, l'offensive soit accompagnée d'une prise de risque plus nette, d'une volonté plus stricte de se détacher du lot et de ne pas s'effrayer à l'évocation du concept d'originalité. D'ailleurs, quelques récents exemples ont montré à quel point cette prise de risque pouvait devenir une bénédiction :
Parkway Drive s'est définitivement installé dans le haut du classement avec "Atlas" et
Bring Me The Horizon a fait mentir bien du monde avec un "Sempiternal" éclectique d'une authenticité ressourçante. Il suffit maintenant à
Killswitch Engage de se lancer...
A écouter plusieurs fois, on y découvre pas mal de subtilités.
Oui nécessité d'écouter plusieurs fois cet album pour y décortiquer ces fameuses subtilités.
Un album principalement marqué par le retour de Jesse Leach au chant, car musicalement parlant ça mise sur du metalcore classique qu'ils ont aidé à forger, mais d'une grande efficacité ! C'est sûre il ne faut pas s'attendre à un Alive or Just Breathing 2, d'ailleurs je ne comprends pas trop la comparaison avec cet album, car 11 ans séparent les deux, et Alive or Just Breathing est sorti en 2002 à une époque où le metalcore n'existait pratiquement pas et l'album était totalement novateur, en 2013 le contexte était radicalement différent. Moi en tout cas à l'époque de sa sortie, à aucun je n m'attendais à un Alive or Just Breathing 2, mais juste quelque chose de bon digne du groupe, qui continue la voie tracé avec Howard Jones. C'est sûre ce n'est pas du même niveau qu'avec Howard Jones, mais l'album est plaisant.
S'il y a bien une chanson qui transcrit parfaitement l'efficacité redoutable de Disarm The Descent, c'est Turning Point, cette chanson est une tuerie j'ai dû l'écouter une centaine de fois au moins ! Le début avec le breakdown mais surtout ce refrain accompagné par la voix d'Adam est sublime. D'ailleurs c'est quelque chose que j'ai beaucoup apprécié dans cet album, le retour des vocaux d'Adam qui avaient complètement disparus dans l'opus précédent, elles apportent beaucoup aux chansons comme Turning Point, Beyond The Flames ou The Call, les rendant systématiquement parmis les meilleurs !
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