Sorti de l'esprit de
Kaiser Wodhanaz il y a dix ans,
Ad Hominem est une formation que l'on ne présente plus. Pilier du black metal français, AH a su innover en créant un monde à part, à la fois cru, haineux et typiquement black. L'album "
Planet Zog - The End" est celui qui a envoyé AH au faîte du monde underground, certes à grand renfort de provocations politiques, mais le tout formait une masse musicale si accrocheuse et si juste qu'on ne pouvait pas ne pas y prêter attention. Il y eut après "...for a new world", que j'ai trouvé très décevant,
Kaiser faisant dans la surenchère côté paroles sans y attacher des riffs très catchy ou très variés. Ensuite vinrent quelques splits, pas mauvais du tout quoi qu'un peu inégaux. "
Climax of Hatred" releva le niveau, avec un côté lourd sans l'être trop et le retour de l'ambiance totalitaire propre à
Ad Hominem. Certains en ont voulu à
Kaiser parce qu'il avait, dit-on, vendu son cul à l'industrie pour sortir cet album. Et après ? Tant que la musique n'en pâtit pas, je ne vois pas l'inconvénient. Les groupes comme
Nightwish ou
Die Apokalyptischen Reiter (dans un autre genre, on l'avouera) sont devenus mous et inintéressants parce qu'ils se sont mis à viser un public trop large.
Ad Hominem a peut-être glissé ses albums dans les forges de la grande distribution, l'important est qu'il n'y perde pas son âme, et à mon sens il a plutôt bien réussi à la garder.
Le mini-CD "Theory 0", sorti fin 2007, était musicalement très bon. On y retrouvait l'atmosphère tant appréciée (ou décriée) de Planet ZOG, avec un côté plus développé. Son contenu était néanmoins décevant : sur quatre chansons, il y avait deux reprises et un remix, ainsi qu'un clip... disponible sur Youtube. Bref, pas de quoi pavoiser malgré cette fois le retour de la coloration militariste des débuts. Heureusement, AH est de retour. Après trois ans de silence (si l'on excepte la sortie de Theory 0), voici l'album qui renoue avec l'ambiance totalitaire et puissante de Planet ZOG, tout en y ajoutant une production au poil :
Dictator ! Sorti avec deux mois de retard, livré au bout de trois semaines minimum, on peut dire qu'il a fait rêver pas mal de fans. Les samples mis sur Myspace étaient déjà alléchants. Ca tombe bien,
Dictator est très bon, au point d'en être probablement le meilleur album d'AH fait jusqu'ici.
Ad Hominem n'est pas politique, mais la politique se glisse dedans. L'ambiance, la coloration noir-blanc-rouge de l'album, tout dedans donne l'impression d'une liberté par le totalitarisme. Non que le totalitarisme soit un régime très libre ; seulement, AH nous met aux commandes d'une monstrueuse exaltation, où haine et amour se dissolvent dans une volonté exaltée jusqu'à la lie. Que le défilé commence, avec autant de tambours que de fusils !
Les riffs sont rapides, catchy, avec un bon équilibre entre le lourd et l'acéré. Les paroles collent bien à la musique. Toujours sans concession, soulevant la haine pour en faire un catalyseur de l'énergie musicale. Il faut avouer que question claque dans la gueule,
Kaiser Wodhanaz en connaît un rayon. Le chant est très bon aussi, quelquefois modulé, ce qui est extrêmement rare dans le BM. B.A.R. impeccable, musique tantôt furieuse tantôt propice au headbang, il y a de quoi se faire plaisir de nombreuses écoutes durant. Le meilleur réside dans les passages scandés. L'alliance des voix fait toujours frissonner, et quand elle est portée par l'énergie, elle emmène l'auditeur assez loin. On se plaît à imaginer les esclaves de Dieu conduits à l'échafaud dans la chanson "
Slaves of
God", ou une foule tenue comme un seul corps dans "
Dictator"...
AH fait partie des quelques groupes qui ont compris que ce genre de choses, politiquement ou moralement incorrectes, ne sont pas un matériau radioactif à craindre comme la peste. Au contraire ! Comme catalyseur du plaisir musical, il n'y a pas mieux ! La haine, l'envie, la construction et la destruction ne font qu'un dans
Dictator. A l'écoute de l'album, la liberté chute comme un vase et elle se répand sur ceux qui sont en dessous, les ceignant de ses énergies destructrices, pour le plus grand plaisir de l'art qui tire son énergie du négatif. Il n'y a pas de limite à cela, et surtout pas politique. D'ailleurs, la chanson "ZOG Is
Dead" est totalement jouissive à l'écoute, sans qu'on ait besoin d'être NS ou non pour le ressentir : choeurs scandés, riffs rapides et puissants, batterie qui donne une furieuse envie de balancer sa tête d'avant en arrière... Quant à la reprise de "Total Völkermord", elle a un petit côté dansant qui est assez original. Certes, on y perd le côté malsain des débuts, mais on ne perd pas au change puisque
Kaiser parvient à renouveler l'atmosphère d'une même chanson.
A part ça, les transitions entre les titres, les passages calmes dans les chansons, les rythmiques de batterie... tout est bien arrangé. Comme Planet ZOG, en mieux.
Un seul regret : le dernier titre, "Schlachthaus der
Gedanken", est un peu long à mon goût. On y entend des rythmiques abrasives qui fatiguent un peu l'auditeur après la joie destructrice du reste de l'album. Mais bon, le reste efface largement ce petit inconvénient. On regrettera également que notre
Kaiser national ait déménagé en Italie. Non que j'aie quoi que ce soit contre les italiens, mais AH ne fait plus de concerts que dans le sud de l'Europe ! Espérons qu'ils penseront aux européens du nord pour leurs prochaines sessions. En attendant, cet album se laisse volontiers écouter plusieurs fois, surtout si on n'est pas fatigué.
Pour revenir à l'article, il est pas mal et me rappelle pas mal le peu de l'album que j'ai écouté et que j'ai bien aimé ;)
Petite remarque pour l'orientation idéologique du groupe, ça m'a toujours fait marrer mais dépité aussi, de voir des métaleux (fans ou groupes) cracher à l'extrême leur haine du christianisme (bien leur en fasse), et s'offusquer dès l'instant que ça concerne les juifs (ou les musulmans mais il y a encore moins de courageux). A se demander jusqu'où va la liberté de penser et la "rébellion" du "métaleux"...
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