Belphegor, insigne du metal autrichien, est depuis longtemps un groupe culte de la scène extrême. Rebaptisé ainsi après avoir délivré une démo du nom de "Kruzifixion", le célèbre frontman et guitariste Helmuth, entouré de nombreux musiciens au fil du temps, délivre en l'année 2014 l'album «
Conjuring the Dead », solidement bâti après 22 ans d'expérience. Le groupe a naturellement, cela va de soi, évolué durant sa carrière, passant d'un Black
Metal aux sonorités Death très cru et violent à un Black/Death relativement sombre et aux portes du mélodique, notamment depuis leur plus ou moins bien accueilli «
Bondage Goat Zombie » en 2008.
Les changements, aussi peu radicaux soient-ils, n'affaiblissent en rien la brutalité de la musique de
Belphegor. En effet, le groupe délivra en 2011 le triomphant «
Blood Magick Necromance ».
Malheureusement, de graves problèmes de santé affectent la tête pensante du groupe et Helmuth se retrouve bien évidemment avec des séquelles au niveau de la voix, si bien qu'il fut contraint de laisser le micro lors des concerts à Morluch, voire même d'en annuler.
Qu'importe ! Aujourd'hui, droit dans ses bottes, Helmuth et sa bande reviennent cette fois-ci en Floride, aux Mana Recording Studios, connus pour avoir, entre autres, enregistré de nombreux méfaits de
Cannibal Corpse ou de
Hate Eternal. Par ailleurs, c'est Erik Rutan qui produira cette galette. La pochette de cette dernière est signée par
Seth Sino, artiste admirable de par son travail au sein de Septic
Flesh mais aussi par son talent incontestable dans ses artworks que l'ont peut retrouver notamment chez
Nile,
Rotting Christ ou encore son propre groupe pour ne citer que ces trois là.
Un grand producteur, un peintre talentueux et des musiciens expérimentés, tout semble réuni pour nous offrir un album titanesque. Voyons ce que le gaiement nommé «
Conjuring the Dead » nous propose...
Révélé avant la parution de l'album, «
Gasmask Terror » ouvre rapidement la danse macabre. Aussitôt, on remarquera une sonorité plus grave dans les guitares, choix que l'on comprendra sûrement en écoutant la voix d'Helmuth. En effet, la voix éraillée du Black
Metal semble définitivement remplacée par de profonds growls, qui seront permutés assez régulièrement par une voix grognarde. Je n'ai pas d’adjectifs pour la définir cette fois, j'aimerais simplement la comparer à celle de Gollum (ce qui n'est pas un reproche, je précise). Le morceau, particulièrement rapide, fait part, sans grande surprise, de riffs assez mélodiques, guidés par une batterie martyrisée aussi bien au niveau de la caisse claire qu'à la double pédale.
Le morceau éponyme prend la relève après cette tuerie qu'est «
Gasmask Terror ». Beaucoup plus lent, les instruments se suivent en dégoulinant de noirceur, rythmés par le glas qui sonne. Les amateurs d'ambiances occultes et sombres apprécieront le break aux deux tiers du morceau, où résonne une guitare acoustique soutenant les plaintes tortueuses d'une femme.
Vient ensuite le ultra carré « In Death », aux riffs très accrocheurs. La basse semble enfin mise un peu plus en avant, elle qui s'était faite assez discrète auparavant. La présence des soli est la bienvenue car, sans mentir, le morceau peut vite s'avérer répétitif et lassant, notamment à cause de sa lenteur. Il faut avouer qu'on est très loin de la brutalité de
Lucifer Incestus.
Après une introduction accompagnée de cloches, la vitesse est de retour sur « Rex Tremendae Majesta », entremêlée de passages plus lents et mélodiques. Les riffs de guitares se rapprochent de «
Gasmask Terror », suivis par les vocaux terrifiants de Helmuth. Les quelques touches de synthétiseurs enfoncent le clou, peaufinant à merveille cette ambiance mystique qui nous entoure.
"Black
Winged Torment" s'ouvre sur une introduction assez malsaine, où résonne une voix de femme possédée, qui laissera ensuite place au morceau le plus direct de l'album.
Pas de break, pas de guitares dégoulinantes, c'est une caisse claire martyrisée sans pause que vous pourrez savourer. Quelques touches de mélodies apportent au morceau une force qui en fera mon favori de l'album.
L'interlude "
The Eye", instrumental, nous propose de revenir une bonne minute sur l'acoustique du morceau éponyme, accompagné d'un solo de guitare, avant d'enchaîner sur le titan "
Legions Of
Destruction", un morceau sur lequel Helmuth a dû beaucoup miser, puisqu'on y retrouve en guest M.Benton (
Deicide, ex-
Vital Remains...) et
Attila Csihar (
Mayhem,
Tormentor,
Sunn O))),
Gravetemple...). On retrouve donc un morceau assez riche pour ce qui est des vocaux, puisque ce ne sont pas moins de trois chanteurs qui se relaient. On alterne ainsi entre les growls de Helmuth, mêlés à la voix démoniaque de Glen Benton et aux grincements dont seul
Attila semble avoir le secret. De la même manière que "Rex Tremendae Majesta", ce titre nous offre des passages rapides mêlés à d'autres plus pesants, tout en octroyant cette touche de mélodie obscure et quelques riffs aux sonorités presque égyptiennes, notamment à la fin du morceau, relativement proche de ce que
Nile peut offrir.
Sur "
Flesh,
Bones And Blood" s'ouvre une dissonance qui fera grincer des dents avec plaisir. On se trouve face à un morceau très lourd, rempli d'harmoniques artificielles et recouvert de cette même ambiance noire. On reste toutefois plus dans un registre Black
Metal, contrairement aux trois premiers titres de l'album qui tirent plus leurs sources dans le Death
Metal.
Des hurlements de femme lancent "
Lucifer, Take Her!". La lourdeur est bel est bien là, dans la lignée parfaite du morceau précédent. "
Pactum In Aeternum" enchaîne aussitôt sur une guitare acoustique mêlée de plaintes d'agonie et de chuchotements chaotiques, le tout suivi par un synthétiseur évoquant fortement encore l'Egypte Ancienne.
L'album ne fait donc que 36 minutes, mais ce n'est pas un problème, car plus aurait été sûrement lassant. Les problèmes de santé de Helmuth ont forcément eu des répercussions sur la musique de
Belphegor. Les fans de la première heure auront donc peut-être du mal à apprécier sa "nouvelle" voix, d'autant plus que la production est bien loin de celle des cinq premiers albums. Le tournant pris depuis "
Bondage Goat Zombie" se poursuit donc, et malgré les difficultés rencontrées,
Belphegor montre qu'il est toujours un tyran du Black/Death, délivrant des ambiances sombres combinées à des mélodies justement appliquées au milieu d'un champ de bataille.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire