Soyons sincères : quel metalleux avait déjà écouté du
Ministry avant ce « Psalm 69 » ? A moins d’être plus curieux que la moyenne, qui, en 1993, connaissait ne serait ce que de nom le groupe de Paul Barker et Al Jourgensen ? A l’instar de
Nine Inch Nails, qui entra avec fracas dans l’univers du métal un an auparavant avec son chef d’œuvre de rage qu’est « Broken »,
Ministry s’invita sur nos platines à coup de titres-bulldozer tels que « New World Order » et «
Just One Fix ».
Pourtant, la filiation avec notre musique de prédilection aurait pu apparaître à nos yeux avec les albums précédents. Là où Trent Reznor a considérablement enragé ses compos, Al et Paul, eux, n’ont guère changé d’un point de vue musical. Certes, les titres de « Psalm 69 » sont beaucoup plus compacts et hypnotiques, mais pour ce qui est de la violence, jetez une oreille sur des titres comme « Thieves » ou «
So What » de «
The Mind Is a Terrible Thing to Taste » ramène à une cohérence musicale évidente… Non, ce qui change, et personne ne me contredira (je pense), c’est la production.
Enorme, étouffante (les différents samples sont tout simplement terrifiants, tout comme la voix de Al), prenant à l’électro, voire la techno, leurs aspects cliniques, et au métal sa puissance, l’album est une masse si compacte qu’il ne nous laisse pas le choix : l’uppercut est violent, sans espoir ni échappatoire. Mid-tempo (les titres cités en intro), rapide (« Hero », «
Jesus Built My Hotrod » qui rappelle le fond rock’n’roll des
Revolting Cocks), lourd comme un
Doom des maisons (« Scarecrow », ou l’intro du titre éponyme, lui même se targuant d’un riff franchement heavy metal), ou carrément speed à la limite du supportable (« TV II »), les compositions ont beau changer dans leur rythmique, elles ne sortent jamais de cette ligne directrice froide et martiale, machine construite uniquement pour nous broyer, jusqu’à l’enfer du titre final, cyniquement nommé « Grace ».
Mais « Psalm 69 » va au delà de son éclatante réussite artistique : un an après donc la claque « Broken »,
Ministry rallie définitivement les amoureux de métal à la cause indus. Sans « Psalm 69 », qui sait si nous nous serions penchés sur des groupes comme
Oomph !,
Wumpscut, Klute ou Peace Love and Pittbulls ? J’irai même plus loin : la magie de
Ministry est tellement forte que, malgré son hermétisme et son nihilisme, il fit basculer des personnes qui restaient insensibles au métal extrême. Lorsque je traîna un ami fan de Nick Cave à leur concert lors des Eurockéennes de Belfort en 1996, il devint fan en moins d’une heure de gig. Un miracle !
En plus de nous avoir livré un diamant noir, le monolithe de « 2001 » version sonore,
Ministry jeta le pont qu’il manquait entre ses deux mondes, celui de
12012 et celui de
Slayer, de Young Gods et
Pantera. Aujourd’hui,
Rammstein et consort font partie de notre univers, mais je vous assure que c’était loin d’être une évidence il y a 20 ans. C’est pourquoi je mets 20/20 à cet album. Et pour ses qualités, et pour son impact. Merci, messieurs Barker et Jourgensen, merci pour tout !
En tout cas cet album illustrerait aisément n'importe quelle émeute urbaine.
Je vais peut-être te paraitre "vieux métalleux" mais moi je connaissait Ministry avant cet album.
J'ai découvers dans le générique de lémission METAL EXPRESS sur M6 avec le titre Burning inside de l'album précédent que je me suis procuré du coup.
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