S'il y a des groupes dans le monde du black metal qui aiment mettre leur art au repos parfois pendant plusieurs années,
Deathspell Omega n'en fait pas parti ! Ne perdant jamais une occasion d'avancer leurs idées évoluées du satanisme et de troubler leurs auditeurs par une musique alambiquée,
Deathspell Omega revient en 2008 avec deux mcd dont voici la présentation du premier : « Veritas
Diaboli Manet
In Aeternum : Chaining the
Katechon ».
Malgré deux albums d'une certaine qualité et quelques splits, il faudra attendre l'arrivée du génial «
Si Monumentum Requires, Circumspice » pour que le groupe atteigne un public large. Evoluant d'un black assez true à un style plus avant-gardiste DO ne cesse depuis de rendre sa musique plus profonde et plus complexe. Et cet opus, bien que dispensable aux yeux de certain, dispose d'un intérêt certain tant sur le plan musical que sur une vision interprétative des choses.
Si je parle d'interprétation, c'est pour la simple et bonne raison que ce mcd, malgré sa courte durée peut donner naissance à différents points de vue, suivant la manière de l'appréhender. Par conséquent, tout ce que vous lirez dès les prochaines lignes, ne sera qu'une vision personnelle, qui n'engage que moi, quant à la compréhension du message de DO.
Marqué du sceau de l'infini (les serpents entrelacés), cet opus, du long de ses 22 minutes, est une dissection musicale de ce que le genre humain possède de plus sombre en lui. Arborant plusieurs visages de la nature humaine, au fil de l'écoute de cet unique morceau, le groupe rabaisse l'homme, sa folie et sa stupidité, plus bas encore qu'une créature telle que le serpent (sur la pochette avant, les serpent entrelacées laissent la place à deux hommes qui se mordent les jambes). Multitude de breaks sont au rendez-vous et la compréhension de ce disque ne viendra certainement pas de suite. Mais une fois que l'on s'est pris au jeu du groupe...
Premier visage : La décadence
« In a place beyond all resistance devouring the roots of the bush of fire »
Ni préambule, ni aucun élément instrumental ne nous prépare. Le cd commence sur les chapeaux de roue. Chacun des artistes donne l'impression d'être surpris en pleine conversation musicale et donc ça commence très fort. Le riff au départ, assez rentre-dedans, laisse la place à un break dès la première minute qui refroidit nettement l'atmosphère. Le rythme est plus lent, sombre, froid et ...beau. Ces notes mélodiques semblent s'apitoyer. La voix déchirée et agressive que l'on pouvait entendre laisse place à un simili de chant clair se mariant bien avec l'ambiance. Quelque chose plane dans l'air... Comme si quelqu'un, quelque part sombrait dans la démence ou la tristesse ou venait de faire quelque chose de pitoyable et que les instruments voulaient accompagner cet acte, le dénonçant même. Cette décadence exprimée ici, ouvre la voie de manière parfaite aux autres bassesses du reste de l'album, car, avant de se laisser entraîner dans la haine, la tristesse et bien d'autres sortes de négativité il faut choir de quelque manière que ce soit.
Deuxième visage : La haine
« The slopes slaver pus towards the skies and the thorn »
Après quelques notes éthérées, la musique reprend crescendo. Ici, l'ambiance n'est pas à la mélodie. D'une voix furieuse, Mikko Aspa, nous assène des messages haineux suivi d'un riff composé de trois breaks majeures. Le tout ne suis pas vraiment de logique. Alors que l'on croît cette partie terminée le tout reprend de manière plus brutal surplombant ce qui avait été fait quelques secondes auparavant. D'un autre côté, lorsque quelqu'un est énervé, celui-ci fait il preuve d'une quelconque logique ou d'une quelconque refléxion ? Si le tout, peut avoir un côté repoussant et bête, c'est bien parce que la haine et la colère le sont elle-même. La batterie et son côté brouillon, malgré sa vitesse et sa puissance, se veut l'incarnation des pensées sulfureuses et sourdes à tout raisonnement d'une rage énorme, celles qui s'enchaînent sans ordre et la voix grondante de Aspa se prête parfaitement au rôle de la mauvaise conscience.
Troisième visage : Le pathétisme
« Unceasingly, those who can not be one exchange their rings»
Avant même d'aborder la moitié du titre voici la continuité bien connu de la haine. Incarné par une guitare au début furieuse reflétant le dégoût que l'on peut avoir pour certaines personnes, le riff évolue de manière à paraître railleur, cynique. C'est après un énième break que le rythme ralentit légèrement et que l'on peut entendre dans la manière de chanter de Mikko une sorte de jugement. Un paria est quelque part...évoqué par cette mélodie tiraillante surplombée d'une batterie infatigable qui semble envenimer les choses encore plus, poussant les huées à leur paroxysme, catharsis cependant inefficace pour apporter un repentit à l'âme en question qui a déjà sombré.
Quatrième visage : L'abandon / la fatalité
« There can be no refuge in this grotesque liquid flowing »
Le plus gros est passé, mais nous sommes loin d'en avoir fini. Quatrième dénonciation de la part de Deathspell, la faculté de l'homme à se résigner, à s'apitoyer sur son sort et parfois à en tirer du plaisir. Les lyrics se répètent, reprenant ce qui a déjà été dit auparavant, de la même façon que certains ruminent sur leur sort. On retrouve un peu de chacune des ambiances présentent depuis le départ : de la violence à la mélodie en passant par le mid-tempo, cette partie offre toujours autant de breaks comme à l'accoutumée, faisant un point à ce stade de l'album nous amenant à la dernière partie et non des moindres. On notera qu'il est quelque peu difficile de se repérer tellement la remémoration et l'annonce de la fin se mélangent. Cependant, cela s'avère nécessaire.
Cinquième et dernier faciès : La tristesse, la mélancolie et l'hypocrisie
«The act of a free connected to the balance of the world project himself into infiny »
Dernières minutes de ce mcd très riche. Le riff est lugubre, supplanté par une batterie au rythme lent et martial, rendant l'atmosphère encore plus sombre. La voix mélange les habituels grognements, mais évolue aux derniers instants en un chant clair des plus agréable, dignes d'une réelle absolution. Le tout forme une sorte de message de regret émanant des tréfonds d'un coeur endolori au terme de ses jours ou de ses actions néfastes. Cependant, on ne peut s'empêcher de se dire, par le retour du chant croassant que même si le pardon est obtenu ou la tristesse chassée la leçon ne sera pas retenue et cela recommencera éternellement...
Voici, l'aventure offerte par ce mcd s'achève. Certains diront « Mais...ils ne parlent pas de l'homme et de tout ce que tu dis dans leurs lyrics ! ». C'est vrai même s'il y a bien sûr certaines allusions. En revanche, comme je l'ai dit ce n'est qu'une interprétation personnelle et un partage avec vous, lecteurs, de ce que le mélange de la musique et des illustrations m'ont apporté. Au travers des lyrics manifestants leurs visions du satanisme, j'y vois tout de même une approche des hommes, de leurs erreurs et de leur sombre nature.
Pour ce qui est de votre propre écoute vous serez peut-être hermétique à ce morceaux de 22 minutes au départ. Mais le groupe le dit lui-même : « Le verdict ne vient pas d'un coup, le processus lui-même se transforme petit à petit en verdict ».
Sur ce, bien qu'un mcd est souvent dispensable je vous encourage tout de même à vous le procurer. La musique est bonne, la production tout à fait honnête et ça reste du bon
Deathspell Omega. Sous le symbôle de l'infini, DO nous montre qu'ils ne seront jamais à court de talent et que bien des choses sont éternelles y compris les mauvaises...
Valentheris.
Impressionnant, et bravo, ça me donne envie de l'écouter!
D'un autre côté c'est pas une banale chanson de 3 minutes, paumée au milieu d'un cd de black quelconque :p
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