La couronne ne tarda pas à lui être offerte. Sa domination pris un effet presque immédiat, le nouveau souverain voyait déjà ses ouailles à ses pieds, attendant avec impatience ces nouvelles aventures, ses prochains combats et ses glorieux faits d’armes. L’empire d’
Orden Ogan, dans l’enthousiasme absolu de sa supériorité évidente avec "
Easton Hope", était d’ores et déjà dans le monde des grands.
Après avoir ravagé l’Europe avec
Tiamat ou
Freedom Call, les guerriers allemands, sous le joug du charismatique Seeb Levermann (chanteur, guitariste et compositeur) ont pris une dimension bien plus grande et sont désormais fort attendus à l’orée de la présentation de leur nouvelle bataille.
Outre plusieurs changements de line up, avec les arrivées de nouveaux bassiste et batteur,
Orden Ogan avait également tout a prouver après un excellent "
Vale" et un ultime "
Easton Hope" qui les avaient véritablement fait exploser de par leur puissance, leur créativité, leur ouverture d’esprit et surtout cette sensation de virulence, de grandeur et d’agressivité que l’on ne trouve que trop rarement dans le metal mélodique actuel.
Intitulé "
To the End", ce cinquième album serait donc l’album de la confirmation ou ne serait pas.
Pour faire court, de la confirmation, cet opus l’est, mais il n’apporte pas une dimension suffisamment supérieure pour emmener le groupe à un niveau encore plus élevé. Que les choses soient claires, "
To the End" est un opus très fouillé, technique et impérial d’un point de vue composition et interprétation, mais le niveau et la surprise furent telles avec "
Easton Hope" que la même recette n’a pas fonctionné une seconde fois, pour la simple raison qu’
Orden Ogan était désormais attendu.
Clairement, que ce soit les chœurs, encore plus en avant, l’interprétation sans faille des musiciens ou de Seeb derrière le micro, la puissance de la musique (parfois moins terrible que sur le précédent, mais du coup plus riche) ou la talent dont ils font preuve pour façonner des hymnes, "
To the End" est sans défaut, mais le caractère ultime d’"
Easton Hope" n’est plus là, même s’il est certain que cet album permettra de poser définitivement le groupe comme les grands d’aujourd’hui, ceux qui marqueront le style dans les années à venir et dont la popularité ne cessera de grandir avec le temps, loin de n’être que de vulgaires fétus de paille.
Car, après une introduction sympathique et montant doucement en puissance (même si loin du lyrisme éblouissant de "Rise and Ruin"), le morceau éponyme écrase tout sur son passage et démontre que la puissance est toujours le leitmotiv de nos teutons. Vocalement, le timbre si reconnaissable et unique de Seeb est parfait. Le nouveau batteur Dirk Meyer-Berhorn est très impressionnant dans son jeu de toms et enrichit considérablement la composition, tandis que le riff principal évolue constamment et sera déjà un grand moment des concerts. Une grande virilité se dégage de la musique, à la fois agressive mais tellement gracieuse et épique, dont les chœurs permettent à l’auditeur de s’élever au-dessus de la masse. Puis viennent les soli…et là, on se souvient clairement ce qui avait fait la grande force de l’opus précédent. Toujours aussi tranchants, inspirés et démesurément longs, ils sont souvent la colonne vertébrale des longues plages instrumentales et surprennent constamment en prenant à contre-pied l’auditeur, en partant sur des sonorités ou des gammes très différentes entre les parties de Seeb ou Tobi Kersting (le passage en tapping est, comme sur "
Nobody Leaves", une véritable merveille).
C’est également pour cela que les compositions évoluent dans une moyenne de cinq minutes, voire plus. Premier clip de l’album, "
The Things We Believe In" met en avant le concept principal de l’album, à savoir les dérives de la population acceptant les leaderships abusifs de nos hommes de pouvoir, transformant ainsi le monde en un vaste champ de guerre et un no-man’s land apocalyptique et incertain.
Plus lent mais rythmiquement tout aussi costaud, ce titre brille par le caractère imposant de ses chœurs, pour lesquels pas moins de dix-huit personnes ont participé pour renforcer leur aspect solennel et leur donner une amplitude encore plus grande. A l’inverse, la jolie ballade "The Ice
Kings" se révèlera plus discrète, presque minimaliste, très belle sur le refrain où Seeb se veut touchant et sincère.
Peut-être un peu plus traditionnel dans son approche des riffs, plus allemande pourrait-on presque dire, des titres comme "
Land of the
Dead" ou "
Dying Paradise" portent clairement la porte de
Gamma Ray ou de
Freedom Call dans cette volonté de délivrer un metal très épique mais qui ne laisserait jamais en retrait la vélocité de la double pédale de grosse caisse ou la rugosité des riffs. "Till the Stars
Cry Out", s’ouvrant sur un riff supersonique, lève ainsi ensuite un peu le pied pour, une fois de plus, se baser presque intégralement sur les chœurs ; à tel point que le titre ne possède presque aucune ligne vocale principale, celle-ci étant plutôt secondaire. C’est ici que l’influence de
Blind Guardian prend donc tout son sens, car si le timbre de Seeb renvoie toujours à Hansi (leurs deux voix étant naturellement proches), la manière de composer et cette énorme complexité vocale évoque clairement la période la plus difficile d’accès du gardien aveugle, notamment le très expérimental "A
Night at the Opera". Le break de ce titre fait d’ailleurs penser à James Horner, notamment pour les passages à la flûte.
On sent que le groupe cherche à sortir du lot, à créer sa propre musique et son univers unique et c’est donc fort logique que certains passages se cherchent encore tandis que d’autres se veulent sacrément efficaces.
Orden Ogan tente de sortir des cases et des schémas que le power allemand distille depuis des années, et "This World on Ice" en est le meilleur exemple. Seeb, avouant être un grand fan de
Meshuggah, n’hésite pas à syncoper sa musique et à la rendre bien plus glaciale et mécanique sur ce morceau. Il en ressort une atmosphère nouvelle, suffocante et bien plus sombre que les autres titres, salvatrice tant elle montre cette volonté de surprendre. La marque et la griffe du groupe sont toujours bien là (le refrain se rapproche de celui de "Welcome Liberty") mais elle est en évolution et se pare d’une nouvelle corde à son arc.
Quant au long "Angels
War", il va dans une direction complètement différente du très lourd et sombre "Downfall and
Decline". Très épique et proche presque d’une musique de film, il se partage entre passages très aériens et d’autres beaucoup plus lourds et épais, aux riffs légèrement syncopées également, où une multitude d’arrangements apportent une couleur très riche à l’ensemble. Ceux qui recherchent de la simplicité à l’écoute seront clairement perdus face à cette profusion d’éléments à discerner.
Si l’attente était peut-être trop importante, du fait de l’exceptionnel opus précédent, "
To the End" n’en reste pas moins un excellent disque, qui permet de parachever la domination d’
Orden Ogan sur la sphère power épique actuelle, même si une infime pointe de déception revient à la fin de l’écoute. Celle d’avoir entre les oreilles un album quasi parfait, sans failles apparentes, à la maitrise et à la production monumentales, mais dont l’écoute n’aura pas provoquer la jouissance escomptée, cette sensation de toucher le divin et la perfection du genre. Néanmoins, n’en doutons pas, "
To the End" est une nouvelle étape de leur évolution, et c’est sans complexe que les allemands s’apprêtent à arpenter les plus hautes marches de l’Olympe metallique…et nous les accompagnerons sans ciller.
Du Power Symphonique de tout beauté, tout est là pour le plaisir des oreilles!
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