Le destin parfois s’amuse de manière sournoise et cynique à jouer avec les bonnes fortunes d’artistes odieusement ignorés. Et la musique demeure, effectivement, un art qui, elle aussi, n’est pas avare de ces exemples où, malgré les talents évidents de véritables virtuoses incontestables, seul un injuste intérêt de principe d’un public versatile à l’encontre de ces artistes vient saluer une carrière, pourtant, respectable. Le temps passant, cette pénible profession de foie, où les vains espoirs finissent par s’étioler, laissent alors, au musicien, le gout amers de cette infâme inexorabilité.
Le groupe américain
Jag Panzer est assurément de ces cercles là. Unanimement méconnus il mériterait pourtant d’être consacrer à la mesure de son immense talent. Après une première œuvre odieusement mésestimé, un
Ample Destruction (1984), temple dédié à la NWOBHM dans lequel les américains firent preuve d’excellence ; le groupe revint, sans son vocaliste originel, avec un Dissident
Agressor (
1994), masure délabrée vouée à un propos Heavy/Thrash sans inspiration. Il fallut encore attendre de longues et interminables années avant que ne sortes enfin, en 1997,
The Fourth Judgement.
D’emblée il faut noter la réintégration au sein de
Jag Panzer de son chanteur, Harry Conklin. Le messie est donc de retour. Si l’affirmation, quelque peu mégalomane, peut apparaitre comme excessive ; il y a assurément un fond de vérité indéniable en celle-ci. Incontestablement Harry Conklin chanteur extraordinaire à l’amplitude incroyable, à la polyvalence admirable, aux talents indiscutables est un acteur prépondérant dans le caractère si particulier de l’âme propre à ce groupe.
Relevons, ensuite que cet album marque aussi pour ces américains un retour vers les territoires connues d’une musique Heavy plus traditionnel, et, donc, bien plus dans l’étroite continuité d’Ample of
Destruction. Pourtant cette volonté de revenir à la source n’est pas une démarche totalement passéiste puisqu’elle se fait non sans s’inscrire dans une modernité très actuelle. Une évidence mise en exergue notamment par ce son, mais aussi par le caractère de ces compositions, résolument modernes. De plus cette naissance terriblement contemporaine se fait, ô miracle, sans dénaturer aucunement l’identité profonde de
Jag Panzer.
Bien évidement il n’est pas un groupe insipide égaré dans la foule de ces orchestres anodins. Il n’a donc nul besoin de se sacrifier au nom de certaines tendances à des artifices stériles. Chacune des décisions qui le guident prennent donc ce sens très particulier, inhérent à une certaine maturité. Ainsi dès les première notes d’un excellent Black, dans cette mélodie de violon épuré, nait un profond sentiment de plaisir intense que d’autres auraient tenté d’approcher en usant de tout un orchestre philharmonique et ce pour un résultat pas nécessairement aussi aboutis. Et dans l’expression de ce Heavy à la fois sombre et moderne, à la fois agressifs et tourmentés, dans lequel on ressent encore quelques infimes parfums de cette affection particulière que le groupe porte à la scène britannique,
Jag Panzer excelle admirablement. Ajoutant encore à ces immenses qualités, celles de quelques trouvailles (la fin intrigante de Call of the
Wind, par exemple), mais aussi celles d’un soin remarquable apporté à la confection de refrains efficaces (le superbe
Despair, ou encore, par exemple,
Shadow’s Thief) et cet album, que dis-je, cette œuvre possède tous les atouts nécessaires pour convaincre.
Est-il réellement besoin d’ajouter qu’Harry "The
Tyrant" Conklin donne toute la mesure de son talent, et ce même si, loin de cette fougue d’autrefois, désormais il en use avec plus de discernement ? Si les autres musiciens ne sont, évidement, pas en reste ; Harry demeure le trait de caractère le plus délicieusement emblématique de ce groupe.
En somme, est-il réellement nécessaire d’ajouter d’autres mots, là où seule la musique de ce
The Fourth Judgement pourrait aisément imposer toutes les évidences évoquées?
Quelle claque quand je l'ai ressorti il y a quelques mois... Vraiment une perle. J'ai notamment eu des frissons en réécoutant les arrangements vocaux de "Sonnet of Sorrow", ultime.
I feeeel the winter's growing coooldddd...
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