Vers la fin des années 80, se gavant des démos de Death,
Napalm Death,
Morbid Angel ou
Repulsion, la scène de Stockholm se dirige immuablement vers ces sonorités death métalliques émergentes, emmenée par de jeunes leaders comme Nicke Andersson. Sentant la nette supériorité de Nicke et de son groupe
Nihilist, l’équipe de Johan Eldund, formée en 1987 sous le nom de
Treblinka, tente alors de se démarquer en développant un côté black affirmé, en opposition à la suprématie death du moment, s’affichant avec de légers corpse paint et optant parallèlement pour des pseudonymes tels Hellslaughter ou Najse, reprenant ainsi l’image des pionniers britanniques de
Venom & suisses de
Celtic Frost. Faute à un patronyme peu reluisant, en référence au nom d’un camp d'extermination polonais choisi dans la plus parfaite immaturité, le groupe change d’appellation moins de deux années plus tard, optant pour
Tiamat, déesse dans la mythologie sumérienne.
Parallèlement, durant cette fin des eighties, le jeune ingénieur du son Tomas Skogsberg participe largement à l’élaboration et à la définition du son death scandinave dans ses Sunlight Studios, accueillant notamment
Morbid &
Nihilist pour leurs fameuses démos Last Supper & Only Shreds
Remains. Mais, quelques mois avant l’entrée d’
Entombed (ex-
Nihilist) &
Carnage aux Sunlight pour leur premier album (les terribles Left
Hand Path &
Dark Recollections),
Tiamat investit le premier l’antre de Skogsberg pour les sessions d’un disque complet, en octobre 1989 exactement, ressortant avec
Sumerian Cry, au titre évoquant la mythologie babylonienne, assorti d'une illustration du jeune Kristian Wahlin (du groupe
Grotesque), connu quelques années plus tard sous le pseudonyme Necrolord.
Tiamat décroche parallèlement un contrat avec la petite écurie anglaise CMFT Production, qui vient tout juste de commercialiser le premier disque des thrashers de
Xyster, mais qui manque toutefois cruellement de moyens pour assurer la promotion de ses jeunes protégés.
Sumerian Cry sort ainsi en juin 1990 dans la plus grande confidentialité, en regard des productions d’Earache ou Roadrunner comme
Altars of Madness ou Consuming
Impulse (
Morbid Angel,
Pestilence), qui ne tardent pas à se répandre aux quatre coins de la planète et à imposer leur impitoyable suprématie.
La courte intro aux claviers et guitares acoustiques de
Sumerian Cry, ainsi que l’image black renvoyée par ses interprètes, témoignent déjà de la forte volonté de démarcation de
Tiamat, en opposition au death pratiqué par ses collègues. Toutefois, sans réelle maturité, encore sous l’influence de
Nihilist et des choix de Tomas Skogberg en studios, le groupe ressemble avant tout à une formation death metal, autant dans la structure générale de ses morceaux, dans le son des guitares de Johan Eldund & Stefan Lagergren, que dans la voix granuleuse de Johan.
Des titres comme Kingly
Dead, Malicious
Paradise ou Necrophagious Shadows, aux riffs lourds et rythmiques tapageuses, montrent ainsi
Tiamat sous un angle death indéniable. Le groupe lâche dans ses moments-là quelques riffs implacables, à l’image des rafales lâchées sur le bon
Altar Flame. D’un autre côté, le break planant d’
Apotheosis of Morbidity, les touches acoustiques de
Nocturnal Funeral, ou encore l’outro lente de Serpants
Ever Dwell dévoilent une facette de
Tiamat sombre & mystique, beaucoup plus personnelle.
D’une qualité honorable, mais aussi inégale, à l’image d’un Evilized aux sonorités maladroites en son break ou encore d’un Into the
Pentagram aux structures simplistes,
Sumerian Cry reste toutefois un album perfectible, témoignant encore d'un certain manque de technique et de la relative immaturité de ses interprètes. Au-delà, il n’en demeure pas moins un témoignage authentique et une des toutes premières réalisations du death scandinave, sans avoir malheureusement bénéficié d’une distribution lui permettant une meilleure reconnaissance à l'époque.
A l’image du morceau
Apotheosis of Morbidity, l’album montre en effet le potentiel et l’avant-garde de la bande de Johan Eldund, déjà plus dark que ses rivaux, évoluant à une vitesse étonnante et empruntant rapidement une voie différente, lui ouvrant dès l’année suivante les portes de
Century Media, l’écurie de Robert Kampf, qui regroupe déjà quelques formations incontournables telles que
Despair,
Unleashed, Grave,
Demolition Hammer,
Asphyx ou
Morgoth.
Fabien.
Un petit lapsus : c'est Johan Hedlund, pas Johnny (4ième et dernier paragraphe...), à moins que je ne connaisse pas tout le parcours du leader de Unleashed. Attention Fabien c'est l'age ça! Tu nous avais déjà fais le coup avec Brian / Brett Hoffmann...
Pour en revenir à la discographie de Tiamat, sans qu'ils soient cultes, je trouve les trois premiers albums, Sumerian Cry, Astral Sleep & Clouds indispensables, le premier étant un pur témoignage de l'école suédoise de ces années 89/90, les deux suivants des oeuvres de death/doom atmosphérique de qualité, et d'une réelle avant-garde pour leur époque.
Fabien.
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