« La tentation la plus dangereuse : ne ressembler à rien »
Albert Camus
On pourrait croire que
Sonic Syndicate avait appliqué à la lettre cette citation à l’orée de son précédent méfait, le bien nommé et ignoble "We Rule the
Night", forcément commenté par ma personne et n’ayant pas bougé d’un iota du top immondice de ces dix (vingt ?) dernières années.
Les suédois, malgré un succès commercial toujours plus imposants (oh, perverse mode médiatique), n’en finissent plus de modifier leur line-up et
2012 fut un tournant puisque Robin Sjunnesson est désormais le seul membre originel du groupe et le seul des trois frères à maintenir à flot le navire. Les autres, annonçant publiquement qu’ils ne désiraient plus travailler avec
Nuclear Blast ni une compagnie qui dirigeait leur façon de travailler (propos fortement démentis par le reste du groupe encore présent), ont formé
The Unguided dans un registre finalement très proche. C’est donc le nouvel arrivant du précédent opus, Nathan James Briggs qui prend seul les commandes du chant et, lorsqu’on repense à "
Rebellion" et "We Rule the
Night", il y a de quoi être effrayer sur la qualité intrinsèque de l’album à venir.
Désirant revenir aux sources (voilà un terme décidément à la mode en ce moment, même pour un groupe ayant à peine dix ans d’existence),
Sonic Syndicate a ainsi fait le choix de proposer un album éponyme, une nouvelle fois illustré de fort belle manière grâce à un artwork percutant et réussi.
Mais faut-il voir un retour à "
Eden Fire" et "Only
Inhuman" ou une simple suite à "We Rule the
Night" ? Un peu des deux au final, sans attendre la fougue des premiers ni la déliquescence musicale du dernier. Disons que les suédois (et son chanteur anglais) reviennent avec des compositions plus percutantes et puissantes mais que la production une fois de plus lisse comme une presseuse industrielle et impersonnelle ne peut rendre justice à la puissance des titres. La batterie est une nouvelle fois très propre, triggé et le son de caisse claire est d’une fadeur exemplaire, tout comme une basse inexistante dans le mixage (Karin est toujours aussi mignonne ceci dit malgré sa première grossesse) et un chant prenant une place prépondérante dans le spectre sonore total.
Nathan a clairement fait de gros progrès vocalement et il serait d’une immense mauvaise foi de ne pas reconnaitre que son chant clair et surtout ses parties hurlées ont pris une dimension supérieure, plus adultes et contrôlées malgré un aspect toujours aussi aseptisé et superficiel, malheureusement inhérent au genre pratiqué par ces jeunes plus tout à fait adolescents pourtant.
Évoquons le cas de "Before you Finally Break", premier extrait et clip de l’album, surprenant déjà dans son duo avec Bjorn
Strid (
Soilwork) et surtout la puissance découlant de la composition. Un refrain très réussi et entêtant, un riff melodeath que ne renierait pas un
Soilwork très mélodique, des parties hurlées et claires vraiment réussies et surtout un rythme et un tempo donnant envie de bouger la tête, chose inimaginable sur le précédent. La surprise est encore plus grande sur le sombre et ténébreux "My
Revenge", intégrant sans doute pour la première fois intelligemment les éléments électroniques et industriels pour un résultat plus crasseux et lourd (dans la sphère
Sonic Syndicate évidemment).
Pourtant, inconsciemment, le groupe retombe très vite dans ses travers sur certains titres complètement fades et sans saveur, ne faisant que répéter les mêmes erreurs du passé et réitérant à l’excès des schémas éculés et tirer jusqu’à la corde. Pour preuve un "It Takes Me" au refrain clair affreux (Nathan a fait des progrès techniquement mais pas toujours dans la création de ses lignes vocales…) et aux couplets d’une platitude extrême ou encore un "So
Addicted" aux parties acoustiques et aux claviers sensiblement symphoniques sombrant dans un mielleux complet et des stéréotypes à chaque instant (les patterns de batterie, le chant clair dupliqué, le chant extrême cru mais sans aspérité, rage ni virulence, les « explosions » avant chaque refrain…).
Certes, avec les morceaux précédemment loués, et quelque autre comme "
Black Hole Halo" ayant tout d’un tube en puissance, cet opus éponyme remonte le niveau désespérément bas du précédent album mais les suédois sont encore loin du compte en terme de crédibilité et de créativité. On notera aussi un "Catching
Fire" au refrain réussi et énergique, restant facilement en tête (si on fait abstraction des parties narratives en début de titre pas forcément subtiles) et impeccablement chanté. Quant au dernier morceau, "The
Flame That Changed The World", on sombre une nouvelle fois dans tous les soucis de "We Rule the
Night" avec des éléments « pouet pouet » aux claviers absolument dispensables, un chant extrême sans aucune densité et une pauvreté de riffs à pleurer (toujours cette syncope systématique sur une corde) et un environnement global bien peu dangereux en comparaison du texte évoqué.
C’est surtout là où pêche
Sonic Syndicate, dans la création de riffs marquants, de passages réellement saisissants ou de refrains qui feraient immédiatement mouches. Malgré des progrès, le groupe ne parvient jamais à écrire un titre complètement réussi de la première à la dernière note, en rajoutant toujours trop ou au contraire n’en faisant pas assez pour captiver son auditeur. Cette pauvreté artistique n’est pas nouvelle mais à l’heure où le metalcore essaie de sortir la tête de l’eau pour renouveler son image et son identité (pour preuve, le dernier
Architects sorti en début d’année, le nouvel opus de
Monuments…),
Sonic Syndicate a malheureusement plusieurs trains de retard. Retard qui s’est visiblement tellement accumulé avec le temps qu’il semble inimaginable à rattraper dans un futur proche…mais comme ce n’est pas ça qui empêchera le groupe de fouler les plus grandes planches d’
Europe et d’Amérique, à la rigueur, pourquoi s’en plaindre…
Puis les deux frères guitariste-chanteur sont partis pour former avec Roland The Inguided qui est très proche de l'ancien Sonic Syndicate.
Ca m'étonne pas qu'ils aient quitté le navire, ça commençait à faire pitié ce groupe, dommage pour le virage merdique extrême depuis quelques années...
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