Si la scène deathmetal possède déjà une existence underground dès la seconde partie des années 80, notamment au coeur du foyer nord et sud américain avec
Sepultura,
Morbid Angel,
Master,
Repulsion ou Xecutionner influencés par
Celtic Frost &
Possessed, il faut bien sûr reconnaitre la parution de
Scream Bloody Gore &
Leprosy de Death en 87 & 88 comme le mètre-étalon du style à cette époque et aujourd’hui encore. Cette scène outre-atlantique, et notamment floridienne, a eu un impact déterminant sur les jeunes formations européennes de notre vieux continent.
Dès 1989, sans compter la scène deathmetal / grindcore britannique en pleine explosion (
Napalm Death,
Bolt Thrower,
Carcass), les premiers albums européens de deathmetal ou de thrash fleuretant de très près avec le style apparaissent, les deux plus lourds et mémorables d’entre eux, pouvant revendiquer une pureté et pleine appartenance au style, étant sans conteste Consuming
Impulse du monstre néerlandais
Pestilence et
Resurrection Absurd de son confrère allemand
Morgoth.
Le quintette outre-rhin se forme en 1985 avant de stabiliser son style, son line-up et son patronyme quelques années plus tard, optant ainsi pour
Morgoth, puissant protagoniste ayant basculé du côté obscur dans l’oeuvre de JRR Tolkien. Amie de Robert Kampf, qui vient tout juste de créer son label
Century Media afin de promouvoir les futures réalisations de son groupe de thrashmetal
Despair, notre machine allemande s’embarque ainsi dans l’aventure avec son jeune directeur. L’association se conclut par l'édition en mini-LP de la seconde demo-tape
Resurrection Absurd et sa parution en ce milieu d'année 1989, muni d’une illustration du jeune Axel Hermann, qui signera plus tard de nombreuses pochettes dans le domaine.
Le style pratiqué par
Morgoth est incroyablement lourd pour son époque, montrant toute l’influence du culte album
Leprosy sur les jeunes interprètes germaniques. Chargé en double pédale, le jeu de Rudiger Hennecke impose ses rythmes massifs, supportant le riffing tranchant d’Harald Busse & Carsten Otterbach et le guttural arraché de Mark Grewe, au chant déjà si singulier. A ce titre, malgré le peu de références dans le style à cette période, la capture de l’ingénieur du son Dirk Draeger est remarquable, dotant la batterie d’une lourdeur et les guitares d’une incision toute particulières.
Débutant par le rapide
Dictated Deliverance, sur ses rythmes de batterie tapageurs,
Resurrection Absurd donne de suite le ton, imposant un niveau de brutalité si novateur à l’époque. Impossible de résister ensuite au riffing imparable de Travel, suivi d’une double pédale écrasante et des vocaux si terrifiants de Mark Grewe.
Morgoth prend ensuite le temps d’épaissir la densité de ses atmosphères sur l’incontournable The Afterthough, l’un des instrumentaux plus redoutables de l’histoire du deathmetal. Et que dire du terrible morceau Selected Killing au passage acoustique si sombre et si intense en son coeur. Mais malheureusement après le bon final
Lies of
Distrust, le mini-album prend une fin prématurée alors qu’il exigeait encore plusieurs morceaux pour prendre entièrement corps et terrasser définitivement le deathster.
Jusqu’au boutiste dans sa quête de la brutalité, à une époque où tout reste encore à définir dans un style deathmetal dépassant tout juste son stade embryonnaire,
Morgoth se hisse d’entrée parmi les acteurs incontournables d’un style s’apprêtant à dominer la musique extrême durant plusieurs années. Hélas, ce premier format vinyle mini-LP dessert plus qu’autre chose le quintette, qui manque d’une promotion suffisante et d'un album complet, à l’inverse de ses homonymes
Morbid Angel,
Carcass,
Bolt Thrower,
Pestilence ou
Obituary bénéficiant déjà d’une pleine frappe dès cette année 1989. Il faudra ainsi attendre la sortie du second mini-LP
The Eternal Fall dès l’année suivante et la réunion des deux moitiés en un seul CD, pour que
Morgoth connaisse enfin une véritable consécration.
Fabien.
Merci Fabien pour cette chronique....nostalgique
je me rappelle en 1990 et un ami (allemand d'ailleurs) qui m'avait fait découvrir ce groupe et son chanteur que j'avais trouvé incroyable avec son timbre sisingulier comme tu le fais si justement remarquer.
et cette créature sur la pochette rendue plus pathétique qu'effrayante à cause de ces larmes qui coulent.
comme dit plus haut, merci pour cette tranche de nostalgie.
Merci Fabien pour tout ton travail autour de ces groupes qui ont véritablement batit le Death .
Une perle !
"Selected Killing", c'est la voiture des victimes qui fonce dans une forêt sombre peuplées de monstres - dans un plan à la "Shinning" -, avec des Metalleux dedans et de la bière dans le coffre...
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