Après les sorties magistrales, mirifiques, renversantes, Hiroshima, ect… (des hyperboles en veux-tu et en voilà) des derniers «
Kreator », «
Testament », ou autre «
Annihilator », on attendait la réponse qu’allait apporter nos citoyens San Franciscains de «
Death Angel », autre grand nom du thrash metal. Et la réponse ne serait tarder, soit deux ans après un «
Killing Season » à la hauteur de nos intentions, «
Relentless Retribution » arrive avec une vitrine, gueule ouverte, alléchante. Branle bas de combat. Nota bene, «
Death Angel » en a profité pour faire un petit ravalement de façade; autrement dit changement de line up. « Ah? » Dennis Pepa et Andy Galeon virent, et sont respectivement remplacés par Damien Sisson (« Nullsake »?!?) et
Will Caroll (ex-
Machine Head, ex-
Vicious Rumors). Le groupe, en accueillant deux blonds, perd son côté exotique philippo-américain, mais passons, ce n’est que du détail. Les réjouissances avec ce groupe risquent d’être gâchées par le doute. On sent planer l’ombre du changement. Un changement qui ne saurait tous nous satisfaire dans nos attentes.
Petite histoire pour faire dodo ou simple résumé imagé: Les loups surgissent du bois et s’attaquent à nouveau à la bergerie. Il y a beaucoup de remous, ça bêle, ça mord. Mais méfiance, car le propriétaire et sa carabine sont de sortie. Il y aura du plomb dans l’air, et nos bêtes sauvages risqueraient bien de finir en descentes de lit.
En parlant de coups de fusil ou d’air plombé, commençons par le début à savoir le titre «
Relentless Revolution ». Tout avance à pas constant sur des pics agressifs de guitare (RAS). Puis un chant nerveux scandé, presque vociféré nous prend par surprise. On constate alors qu’un rapprochement direct a été opéré vers le metalcore (plus crossover thrash, si je respecte correctement l’appellation; un sujet à discutions et à controverses). Par conséquent le thrash qui ressortira de cet album sera distinctement plus moderne, mais ne semble pas ici être trop à la portée de la formation. Les cordes métalliques, ajoutées à une batterie mal inspirée, ne rejoindront pas Mark Osegueda dans sa fureur. Petite situation de décalage donc. On pourrait contrebalancer cela, en signalant une nette remise en jambe sur les parties instrumentales traditionnelles , généralement situées aux 2/3 de piste. Interloquant à la première écoute, "
Relentless Retribution" n’a pas franchement de quoi extasier. En décomposant bien le chant des instruments, sur la majorité des titres "modernisés", on arrive à constater amèrement que le chant gueulé permet de camoufler les lacunes des instrus plutôt mal embouchés, trainards parfois.
Ainsi, dans la même fibre et la même constitution que le titre "
Relentless Revolution" ou plus exactement sur le même funiculaire en train de tanguer, « Into the Arms of Righteous
Anger » ou encore « This
Hate » avaient pourtant bien aussi démarrés; sur un air ombrageux et orageux pour l’un, et sur de bonnes descentes de guitare au son éminemment thrash pour l’autre. La voix, toujours la même est ici sans grande envergure et manque d’ambition. Les instruments sont la majorité du temps poussifs et adoptent des formules hasardeuses presque trop anticipées. Lorsqu’il s’agit de « poussif », voir de linéaire « Absence of Light » bat le fleuron. Les instruments jouent par intermittence avant de dérouler doucement avec douleur. Le chant suit cela au pas à pas. Après une petite montée de volume on passe à l’étage précédent. Ce titre est plus concevable à la première écoute, mais à plusieurs cela devient très vite lassant, et j’oserais aller au mot « chiant ». Dans le très inégal, on a « Death of the Meek », on retrouve côte à côte des passages vifs, quelques excellentes prises de vitesse, avec des parties linéaires, écrasées, sans la moindre envergure (écouter le premier passage instrumental, le même d’ailleurs que le dernier de fin de piste).
Ce nouveau thrash que l'on nous initie un peu trop fraichement apporte néanmoins quelques bons lots de consolation: Le chant brut et les instrus offriront plus de détachement et passerons enfin à la vitesse supérieure sur « River of
Rapture », mais plus encore, pour les guitares surtout, sur «
Truce ». On assiste ici à un fameux départ sur les chapeaux de roue, avec un gain de tranchant. Des riffs qui ne feront plus l’objet de doute, enfin respectables. La composition est également un peu plus riche et attractive, malgré que ce nouveau chant de Mark qui demande autant de temps à s’assimiler.
En plus inclassable mais toujours dans la veine, «
Claws in so Deep » se distingue plus étrangement, autour de ce même registre nouveau de "
Death Angel", qui est en train d'aller dans un esprit bien plus "core" que les versions de thrashs dont ils nous ont habitué, aussi bien avant l'opus "
The Art of Dying", qu'après jusqu'à maintenant.
Le jeu est intempestif, des chœurs au refrain apportent une touche moins agressive, permettant d’aérer le morceau, cependant ceux-ci sont accompagnés par des riffs « bourdons », assez indignes d’une formation aussi prestigieuse que «
Death Angel ». Il y a une petite surprise. Le dernier tiers du titre s’ouvre sans crier gare sur un très joli passage, très simple et appliqué, de guitare acoustique. Une longue et soyeuse crinière, parasitée toutefois par quelques « puces ». Des sons bizarroïdes artificiels s’incrustent en indésirables sur la ballade. A se demander ce que cela vient à foutre là.
On change pratiquement de registre sur la fin, explorant d'autres différents horizons, vers quelque chose de bien plus commun et généralisateur, et la qualité, sans trop d'étonnement s’en trouve bien meilleure. Hormis cependant «
Volcanic » où Rob Cavestany s’essaye au chant sur un titre qui porte bien mal son nom. On pourrait se rapprocher davantage des Monts d’Auvergne (volcans éteints) que du Mont Etna. C’est en fait une espèce de ballade acoustique, plus moyenne et bien moins performante que celle qui s’est illustrée au dernier tiers de «
Claws in so Deep ». La voix est quelque peu niaise et ne nous touche pas des masses.
Dans un thrash plus reposé et positif cette fois, « I Chose the Sky » et « Where they Lay » offrent un chant plus à notre portée, dans une agréable ambiance apocalyptique. Sur ce dernier titre des voix groupées s’entremêlent à une musique intense, frénétique. Les instruments tant décriés pour leurs démonstrations pataudes se font beaucoup plus vivaces et explosifs. Ils font enfin office de présence et ne se contentent plus de se cacher derrière Mark.
Un titre se démarquera, encore plus de tout cela, sortant littéralement du lot, voir même à la frontière du style thrash tout court. Il s’agit du titre « Opponents at Sides ». Les riffs sont ici appliqués, mais le jeu comme le chant d’ailleurs s’exercent dans un tout autre registre que le thrash plus ou moins officieux de cet album. On a une configuration assez élaborée mêlant metal alternatif, heavy metal et thrash. Le chaud fait place au froid à la moitié de la piste avec un instant de plénitude, d’évaporation. Les sons qu’ils nous offrent à ce niveau de l’album sont des plus sublimes et recherchés.
Ceux qui iront jusqu’à acheter l’album en version édition limitée, s’enorgueillirons de découvrir un DVD bonus. Ils contrôleront leur joie en parcourant plus de 20 minutes d’interviews des membres, des prises studios, avec «
Death Angel » en plein enregistrement (des sons sifflants et bourrés ayant demandé beaucoup de boulot en mixage).
«
Relentless Retribution » aura sans nul doute ses partisans. Ceux qui aiment les arrangements « punk » et « brutal » trouveront leur compte. C’est vrai que l’album fait plus office de pure violence que dans les précédentes œuvres de la formation. Mais le seul regain de violence tapageuse apportée par le chant ne fait pas le tout. Chaque piste apporte son propre lot de déceptions et d'appréciations. Il est fréquent de passer à des stades poussifs, puis accélérés à chaque fois, tout en pouvant rester linéaire parfois (le comble). Les amateurs d’un thrash stylisé (à l'ancienne diront certains) allant de pair avec des riffs ultra rapides et enchainés seront moins bien lotis. Un album qui a tout pour alimenter la confusion et la division entre les fans du genre et du groupe.
12/20
Moi je le trouve hargneux et rageur cet album, mélodique et violent, une tuerie quoi ! Comme souvent chez Death Angel, ça veut bouffer tout cru !
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