Solefald est-il encore un groupe qu'il est nécessaire de présenter ?
En effet, à l'aube de leur huitième album qui devrait sortir début 2015 et au moment où sort leur premier (?) EP, il s'agit bien d'un groupe expérimenté et suivi par un public de connaisseurs.
Mais peut-être du fait de leur coté avant-gardiste touche-à-tout assez lourd à digérer dés les premières écoutes, développé depuis leurs débuts et notamment depuis leur second (et peut-être encore œuvre phare à l'heure actuelle) album «
Neonism » ou plus sûrement par le peu de présence du duo sur les planches des concerts, le groupe demeure un nom pas forcément si connu du grand public.
Si tout au long de leur carrière, le duo norvégien formé du polyglotte Cornelius Jakhelln (allemand par ses racines mais ayant vécu en France également) et de l'artiste multi-casquettes
Lazare Nedland (dont le groupe le plus connu est le trop rare par chez nous compo de black progressif
Borknagar mais qui a également fait partie de multiples projets avec divers instruments notamment la batterie sur le premier
Carpathian Forest) a su produire une musique extrêmement variée, cocktail iconoclaste et détonnant d'influences hétéroclites, fruit de la somme de leurs qualités à la fois de compositeurs et d'interprètes maniant plusieurs instruments et tressant par leurs voix complémentaires, celle grave et parfois hurlée de Cornelius et celle plus aiguë et mélodique de
Lazare. La surprise de ce «
Norrønasongen - Kosmopolis Nord » sera que pour la première fois, la musique de
Solefald, loin de sa variété habituelle sera basé sur une inaltérable homogénéité.
En effet, nonobstant le passé avant-gardiste plus tape-à-l'oeil de
Solefald, si un jeune groupe démarrait avec cet Ep comme démo, ils seraient placés dans une veine folk ambiant, certes étrange et quelque peu évolutive, mais guère plus...
En fait, on a à faire à 37 minutes qui prennent le temps de poser une vraie ambiance comme
Solefald s'est rarement permis de le faire (hormis peut-être lors de la période «
Red for
Fire »-« Black For Death » mais les différences entre les morceaux étaient bien moins ténues qu'ici. Cette musique glissera dans nos tympans sans véritablement les heurter.
Lorsque commence le premier morceau « Norrønaprogen », on a intérêt à apprécier le premier thème présenté, tout simplement parce qu'il reviendra régulièrement que ce soit sur le court interlude « Norskdom » (qui sera globalement une nouvelle exposition de ce motif sur toute sa longueur dans une interprétation folk traditionnelle avec choeurs et violon) et surtout dans « Norrøna: Ljodet Som Ljoma » soit les deux morceaux les plus longs de l'album.
« Norrønaprogen ».
Le tout est basé sur une lente rengaine, interprété de manière folk ambiant sur sa première version, s'approchant pas mal d'un
Falkenbach, sans véritable growl avec la voix grave de Cornelius tel un narrateur mélancolique,
Lazare intervenant lui dans les passages plus guillerets de l'oeuvre.
La version « Norrøna: Ljodet Som Ljoma » (oui, j'ai du mal à dissocier les deux morceaux) est une variante totalement atmosphérique, à la fois plus triste avec un mode mineur plus prononcé et plus moderne, avec omniprésence de bruitages industriels qu'on aurait pu retrouver chez
Ulver.
En fait, il s'agirait d'une collaboration avec Strumgeist & The
Fall of
Rome, des projets dont le maitre à penser est : Cornelius Jakhelln lui-même...
Les autres titres sont tout aussi étranges, entre l'ambiant et bruitiste à l'occasion « Det Siste
Landskap (An Icelandic Odyssey Part IV) » et le folklorique « Songen: Vargen » avec son violon traditionnel dans un contexte moderne assez particulier.
Si le coté hybride de
Solefald demeure, tout est ici en retenue et contrôlé, développant un aspect inconnu de leur personnalité mais l'ennui ne naîtra jamais malgré l'uniformité relative des structures (lenteur, calme, etc).
Il est notable que nul trace d'anglais n'est perceptible ici, aux dépens du norvégien, poursuivant le parcours en ce sens déjà largement ébauché par le duo, au fil des albums (un seul titre en anglais sur le dernier).
Ainsi, «
Norrønasongen - Kosmopolis Nord » est une nouvelle production dans un registre tout à fait inattendu de la part de
Solefald et qui intrigue à l'aube de sa nouvelle œuvre à venir. Les norvégiens ont-ils choisi une nouvelle voie folklorico-ambiante ?
Probablement pas, a priori l'album devrait être très différent de l'EP qui est donc à voir plutôt comme une ellipse qui leur a permis au passage de s'offrir quelques invités de renom dont Kvitrafn, chanteur de
Wardruna, Zweizz de
Fleurety ou Baard Kolstad, batteur de
Leprous,
Borknagar,
God Seed,
Solefald en concert, etc, etc, etc...
Si
Solefald fait ici le plaisir de s'ouvrir à nouveau et donc de surprendre le grand amateur que je suis, et pourra peut-être séduire quelques personnes imperméables au reste de leur œuvre, le coté à part et quelque peu accessoire de cet EP doit quand même être souligné.
On apprécie à sa valeur cette mouture tout en émettant des doutes sur le fait que le combo reste à terme aussi intéressant si son énergie créatrice devait être absorbée par la démarche qui l'a animé ici ; mais on est loin d'en être là...
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