S’attaquer à une « référence incontournable » du
Metal symphonique qui en son temps sortait des sentiers battus, qui a gagné au fil du temps une solide réputation et qui pourtant vous laisse de marbre... Tâche on ne peut plus délicate, car quand le cœur n’y est pas, il est souvent plus prudent de passer son chemin et de laisser les fans transis s’extasier devant la merveille qu’ils idolâtrent ; si cette œuvre les transporte, on ne pourra pas leur reprocher cet enthousiasme.
Mais bref, toujours est-il que si l’on ne craint pas les jets de pierres, rien n’empêche de suivre son instinct et de dire tout haut que l’album en question est un peu (voire beaucoup) surestimé... même s’il s’avère (légèrement) novateur.
Nous voici donc devant
Mother Earth, second effort studio de
Within Temptation, sorti en décembre 2000 aux Pays-Bas et qui voit un changement musical radical de la part de la fomation batave : à la trappe les éléments gothic présents sur son debut-album
Enter et l’EP
The Dance ! Place à une musique plus grandiloquente, avec beaucoup (beaucoup) de claviers exécutant ouvertures, breakdowns et tout le tralala mélodique accolé aux power chorus des guitares, si discrètes soient-elles. Les grunts masculins ont disparu et chacun des morceaux est calibré pour laisser la frontwoman (et auteure des paroles des chansons) pleinement s’exprimer, avec des structures en couplet/refrain pas vraiment prise de tête, des riffs minimalistes mais parfois tranchants comme sur “
Mother Earth ” (le titre le plus heavy de l’album avec “
Dark Wings ”) et une batterie souvent reléguée au rang de simple métronome. On retiendra quand même quelques intruses parmi les chansons, mais j’y reviendrai.
Parlons d'abord du chant : qu’en dire au juste ? Le timbre est bon, la variété est là, c’est incontestable. L’emploi, par contre... le refrain de “
Ice Queen ” ou celui de “
Deceiver of
Fools ” sont autant d’exemples de passages où les montées dans les aigus de la belle pourront rebuter les âmes peu sensibles à l’aspect « popesque » de sa voix... allons, pas la peine de me regarder avec ces yeux furibonds, fans transis que vous êtes ! Je ne demande pas à Sharon den Adel d’atteindre la technique ou la puissance vocale de la chanteuse de
Nightwish et je n’ai rien contre la bonne musique pop, mais quelques notes justes de plus ne feraient pas de mal.
De leur côté, “ Caged ” se veut plus rageuse et “
Dark Wings ” (morceau précédé d’une... “ Intro ”...) plus risquée et exotique, mais sans grand succès pour l'une ou pour l'autre, en raison d’envolées vocales perfectibles (surtout pour le premier ; dommage ! Sharon met pourtant du cœur à l’ouvrage) et des ponts de guitares exécutant juste le minimum syndical ;
Arjen Anthony Lucassen, membre d’
Ayreon invité par le groupe pour exécuter un petit solo sur l’avant-dernière piste n’est qu’un faire-valoir supplémentaire aux orchestrations de Martijn Westerholt. Le frère du guitariste Robert Westerholt, épaulé par Guus Eikens, est décidément celui qui fait la neige, la pluie et le beau temps sur tout l'album, en nous déversant tantôt des chœurs ou un arrière-fond BO plutôt convenus, tantôt des passages grandiloquents, tantôt des mélodies empreintes de musique celtique. Tiens, parlons-en d’influence musicale : c’est fou à quel point on peut ressentir ici ou là des ressemblances avec la musique d’Enya !
...Hein ? Comment ça ce nom ne vous dit rien ?!? Que les fans transis qui ont le tort de ne pas connaître ce nom fassent deux pas en avant !
Sinon, à l’instar de “
Our Farewell ”, power ballad aux accents enfantins débutant au piano, le morceau final, lui, à de quoi surprendre : “ In Perfect Harmony ”, avec ses sonorités de petit oiseau et son long slow-tempo, constitue peut-être la piste du disque au plus fort potentiel émotionnel. On peut en effet la ranger parmi ces ballades sans guitares ni batterie qui ont le don soit de vous assoupir, soit de vous faire écarquiller les yeux et de vous faire dire à haute voix : « Mais que c’est niais !!! »
Notons toutefois que cette réaction peut se produire durant telle ou telle autre chanson, sachant que pratiquement toutes baignent dans une atmosphère très guimauve et sont parsemées d’au moins un passage inutile ou in-inspiré ; le longuet et pourtant varié “ The
Promises ” se retrouve ainsi doté de backing voices sans aucun intérêt.
... Ah, non ! Il y a une petite exception dans cet océan de verdure un tant soit peu enchanté : l’autre piste « intruse » (comprenez : non métallique) de l’album, “
Never-Ending Story ” est une chanson mieux réussie et moins lisse ou fleur bleue, à mon sens, que toutes les autres, avec ses petites percussions et sa jolie basse fretless.
Enfin bref, tout ceci est bien cohérent et mignon, mais j’ignore pour quelle raison cet album devrait faire partie « des indispensables devant lesquels tout bon metalleux qui se respecte doit se recueillir avant de se coucher » - parole de fan transi, encore une fois. L’iconoclaste un tantinet provocateur et amateur de
Metal atmo ou sympho qui sommeille en moi a plutôt pour réflexe de placer ce genre de galette débordante de sentimentalité ou de fantaisie bon marché et véhiculant une ode à la nature aussi mièvre dans un recoin de son étagère et de ne le ressortir qu’une fois l’an (sans doute au printemps).
Comment expliquer alors le succès phénoménal de
Mother Earth ? Je ne vois que deux possibilités : ou bien je fais partie de ceux qui possèdent un cœur de pierre, ou bien ce disque a mal vieilli... J’opte pour la seconde option, commandant !
--------
Éclaireur Lunuy – fin du rapport.
12/20
Enya c'est chouette, ça me rappelle mon enfance d'y penser, mais un peu redondant je crois.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire