I Am.
Comme une intention. Une volonté d’exister. Autant qu’une pulsion cathartique de se forcer à renaître.
Peter Tägtgren nous avait habitué à être partout, sur tous les fronts entre
Hypocrisy et
Pain tout comme à la production de multiples groupes mais il s’est montré plus discret la dernière décennie. Accaparé par son duo avec Lindermann ou occupé à composer avec
Joe Lynn Turner pour son "Belly of the
Beast", le suédois s’est montré plutôt calme avec
Hypocrisy et encore plus avec
Pain, avec qui il n’a sorti qu’un seul album en treize ans (après en avoir sorti 4 en 5 ans !). Malheureusement, "
Coming Home" qui arrivait déjà 5 ans après l’énervé "
You Only Live Twice", avait laissé de marbre et dévoilé un Peter plus fatigué qu’à l’accoutumé, avec une production moyenne et quasiment aucune composition à ressortir du lot (à part "
Black Knight Satellite").
Après le covid, Peter a décidé de partir en tournée avec
Pain en dévoilant "
Party in My Head", un sympathique single qui, néanmoins, isolé du reste, ne laissait pas énormément d’indices sur l’avenir du groupe.
C’est facilement chose faite désormais avec la sortie de "
I Am", neuvième opus du projet indus du multi instrumentiste qui annonce lui-même s’être un peu trompé sur son précédent disque.
Désireux de revenir à une musique plus sale et industrielle, plus belliqueuse également, le chanteur guitariste s’est entouré de ses fidèles musiciens et de son fils pour la seconde fois,
Sebastian, autant pour la batterie que pour des compositions.
La première chose qui saute littéralement aux oreilles, c’est le son !
Finie la production lisse et policée de "
Coming Home", "
I Am" sonne comme un mix entre "
You Only Live Twice" pour son côté énorme, "
Cynic Paradise" pour sa rudesse et "
Psalms of Extinction" pour sa froideur. "I Just Dropped By (to say Goodbye)" démarre sans crier gare par un hurlement guttural qui annonce les intentions du disque. Le riff est sec, ça suinte l’indus par tous les pores et Peter retrouve toute la versatilité de sa voix. Le refrain se fait plus mélodique et déjà, on ressent ce qui fait le sel de
Pain. C’est à dire des passages sous formes de missiles qui vont pourtant amener un refrain catchy propre à sonner plus électro qu’industriel, avec la voix inimitable d’un vocaliste qui avait visiblement envie de se lâcher.
J’évoquais l’apport de
Sebastian à la composition. Il est crédité de deux compositions radicalement différente mais s’intégrant tellement parfaitement dans le style de
Pain qu’ils auraient pu être écrit par son père. "Don’t
Wake the
Dead" (sujet qui revient régulièrement dans le groupe) aurait pu figurer sur "
Dancing with the Dead" tant il évoque cette époque plus mélodique, véritable tube à refrain où les claviers sont au centre du spectre sonore, avec une ligne de chant limpide et un refrain qui entre dans la tête dès la première écoute. Comme un "
Same Old Song" ou "Not Afraid to
Die", ce morceau apparaît déjà comme un indispensable des futurs concerts. Dans son registre le plus brutal, "
Revolution" s’ouvre quant à lui sur un hurlement typique du suédois et un riff à vous déboîter la nuque qui lorgne du côté d’un
Hypocrisy (comme c’était le cas sur plusieurs titres de "
You Only Live Twice"). Et le moins que l’on puisse dire, c’est que dans les deux registres, le fils Tägtgren s’en sort à merveille et démontre que le père a été un bel artisan du talent de sa progéniture.
Au milieu de tout ça, plus qu’une révolution, c’est surtout un
Pain en pleine forme que nous retrouvons et qui fait plaisir à entendre là où nous ne savions pas vraiment quoi attendre du groupe à l’heure actuelle. Un "Not for Sale" irrévérencieux autant dans les textes que ce refrain teintés de sonorités 80 avec le chant grave et unique de Peter (on pense à "Psalms" ici), un "
Go with the Flow" qui joue avec la new-wave (si Depeche Mode rencontrait
Pain) pour multiplier les arrangements synthétiques ou encore un "
Push the Pusher" qui s’articule autour d’un riff massif et d’un refrain assez radical comme en leur temps "Walking on
Glass", "
Nailed to the
Ground" ou "Feed the Demons". Des titres qui s'enchaînent de façon logique et cohérente et dont on retient souvent des éléments pour donner envie d’y revenir. "
Party in My Head", dans ce contexte, fait office de joyeux bordel “hit single” qui n’aurait visiblement pas été déconnant à l’Eurovision (pour ceux qui ont remarqué que le refrain de "Rim Tim Tagi Dim" de Baby Lasagna - le candidat croate - avait de sérieuses ressemblances pour ne pas dire plus) et qui pourra devenir un autre moment pour headbanger en rythme avec Peter.
Le titre éponyme se veut plus mélancolique, évoquant le cancer et la maladie, trouvant sa force dans une interprétation pleine de pudeur prenant aux tripes. On pourrait presque retirer les arrangements pour en faire un titre acoustique, ce qu’il est parfois presque, la guitare clean se parant de reverb et la batterie s’effaçant au profit d’une boite à rythme. On regrettera un peu plus la présence de "
My Angel", titre electro pop où Peter avait collaboré avec Cécile Siméone (le titre avait disparu de la circulation et des plateformes de streaming) mais qui ressemble plutôt à un titre de
Pain passé à la moulinette de Mylene Farmer (avec des orchestrations qui sortent de "
Nothing Remains the Same"). Cette fin d’album tombe d’ailleurs un peu à plat puisque "Fair Game", juste après, reste dans ce registre de balade mélancolique conférant à ce final un côté mou et peu engageant.
Néanmoins, cela n’enlève rien au reste du disque qui ramène fièrement
Pain au centre des débats et, espérons-le, avec une fréquence de sorties plus cadencée. "
I Am". Oui,
Pain existe toujours, animé par ses machines et sa volonté. Entre furie et indus, un retour que nous n’attendions plus mais que nous accueillons pleinement.
Totalement d'accord, un gros feeling Dancing With The Dead/Psalms Of Extinction, et du très bon malgré un gros manque de nouveautés (ça passe pour celui-là, mais sur le prochaine va falloir enclencher la vitesse supérieure) et une fin d'album un peu... mollassonne.
Toujours un plaisir de lire tes chroniques Eternalis.
Oui, ce "I Am" fait plaisir après le moyen "Coming Home". J'espère que le père "tas-d'graines" va continuer à nous régaler.
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