Etrange entité qu’est
Urfaust, le genre de groupe inclassable qu’on ne sait jamais vraiment si on aime ou si on déteste, parce que c'est ignoble, parce que ça nous rapproche de notre folie qu'on cherche habituellement à camoufler, mais qu'on retrouve pourtant avec un plaisir à peine dissimulé à l'écoute d'un tel groupe. Après deux albums aussi étranges qu’improbables,
Urfaust nous revient avec une nouvelle offrande, semblant directement venue du fond des abysses pour répandre sa noirceur. C’est Debemur Morti qui nous sort ce mcd, et l’on peut dire qu’ils ont vu juste.
Les deux premiers albums mélangeaient un black très raw, aux ambiances plutôt dépressives, avec quelques excursions dans des domaines presque folk à mon sens, ainsi que des compositions purement classiques. La particularité du groupe réside cependant dans la voix, on imagine de suite le type ayant vigoureusement abusé de substances alcoolisées, si possible fortement, qui déclame son désarroi et sa solitude. Cette voix se scinde en deux, comme pour signifier le clivage de l’entité qui la scande, l’autre voix se rapprochant d’un cri à la Vikernes et autres hurleurs de même acabit.
Soyons clair, ici
Urfaust a pris un tournant radical. Impossible de dire pour le moment s’il s’agit d’une parenthèse dans l’œuvre du groupe ou d’une nouvelle optique de démence. Peut-être s’agit-il aussi d’un acte de fin, car après avoir créé pareil chaos, il semble bien difficile de survivre. Chaos tant sur le plan de la musique que ce qu’elle procure. La musique se résume à une batterie psalmodiant un tempo répétitif et des espèces de riffs dont on ne sait pas trop s’il s’agit d’un son de gratte saturée ou d’un clavier bidouillé. Sur le premier titre on dirait un sample de vent trafiqué, quelque chose de la sorte. Sur le second titre, on peut reconnaître en fond un larsen, qui donne ce côté agressif à la musique, qui la rend violente, comme une longue lame froide enfoncée au plus profond de votre être. Le point commun est l'aspect "à la limite" de ces riffs, qui donnent l'impression de frôler le point de rupture à chaque instant. Et puis il y a ces petits passages ambiants qui donnent toute cette atmosphère si inquiétante. Enfin, il y a cette voix… Parlons-en de cette voix… Vous aimez les voix torturées ? Les vois complètement arrachées que seul un dément pourrait oser crier ? Et bien vous êtes encore loin. C’est la voix des enfers, la voix de l’innommable. Le genre de voix dont la seule pensée suffit à faire trembler votre échine.
Que se passe-t-il durant ces 20 minutes contenues sur cette étrange galette ? On ne sait pas vraiment. Le temps semble s’effacer, tout comme l’espace. Une aura de noirceur s’étend à travers votre être, glaçant toute once d’espoir sur son passage. Dépression semble le maître mot du premier riff qui vous assaille, et restera le leitmotiv de cet assaut sonore. Et puis cette voix surgie d’on ne sait trop où. Mais impossible d’y échapper, tout semble tourbillonner dans une spirale infernale, il n’y a plus aucun repère. Les cris, ces ignobles cris, se répétant au travers de ces mélodies atrophiées, ne cessant jamais de triturer votre cervelle pourtant déjà quasiment annihilée, ces horribles cris toujours présents pour vous raboter la caboche. Une chute sans fin, une errance mentale aux confins de l’anéantissement. Et l’on arrive à ce dernier morceau, débutant sur un ignoble rire, effrayant au possible, démentiel. Un riff terminal, accompagné par cette voix oscillant entre colère, folie et désespoir. Et l’on s’échoue sur un son astral avant de percuter la réalité, à demi conscient, encore abasourdi par ce qui vient de se dérouler. Que s’est-il passé ? Je ne saurais vous le dire. A chaque écoute le même scénario se répète, comme une réalité qui s’ouvre à nos sens aveuglés, effrayante mais pourtant bien présente.
Urfaust à entrepris sa destruction depuis quelques années déjà, et souhaite avec ce mcd vous amener aussi bas que lui.
Drei Rituale Jenseits des Kosmos signe votre déchéance, il semble n’avoir été conçu que dans ce but. Rarement j’ai pu entendre pareille musique, et rarement j’ai été assailli par pareille noirceur.
Une expérience à ne tenter uniquement que si plus rien ne vous retient à la vie…
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