Une invitation à se rendre dans les tréfonds les plus sombres de sa personnalité. De son humanité. Cette “forêt” métaphorique qui n’est rien d’autre que nos fantômes intimes, notre “
Pennywise” (l’évocation de Grippe-Sou le clown sur la pochette, avec une sortie le jour d’
Halloween et le retour du personnage emblématique dans la série “Welcome to Derry” ne semble pas anodine), qui nous pousse parfois dans nos retranchements.
Annoncé par Johannes Eckerström, le vocaliste illuminé du combo suédois, comme leur opus le plus sombre et personnel depuis longtemps, ce dixième opus se veut clairement moins dansant que son prédécesseur à l’ironie dominante (“
Dance Devil Dance”). Néanmoins, “
Don’t Go in the Forest” n’est pas un retour en arrière à “
Black Waltz” (qui porte désormais le nom du label fondé par le groupe pour distribuer le disque) ou “
Hail the Apocalypse” mais embrase les différentes facettes d'
Avatar pour le faire tremper dans une marmite sombre, expérimentale, parfois complètement folle mais aussi mélancolique et plus émotionnelle que par le passé.
L’invitation débute presque positivement, avec un déroutant “Tonight We Must Be
Warriors” sifflotant qui pourrait être un chant de soldats avant de partir au combat, un cri de ralliement guerrier mais plein d’espoir. Une invitation presque folk (au clip psychédélique), aux chœurs chaleureux, explorant le registre vocal chanté de Johannes et les harmonies de guitare qui pourront surprendre ceux qui attendaient un environnement plus sombre. Cette ruse n’était qu’un appât pour mieux se faire broyer par le carnassier “
In the Airwaves” s’imposant comme l’un des titres les plus violents du groupe depuis ses débuts (le clip est là encore totalement hypnotique). La production se matérialise momentanément en un étau beaucoup plus lourd, le riff est d’une lourdeur implacable, la voix death se veut imposante et presque dogmatique pendant que des relents de neo et de metalcore rendent l’ensemble encore plus froid (à la manière d’un Slipknot récent).
“
Captain Goat” continu de prendre l’auditeur à revers avec ses chœurs marins et cette aura malsaine qui plane, son riff lancinant et l’amplitude vocal de son leader en plein état de grâce (passant d’une voix chaude et rassurante à ses chœurs en lorgnant parfois vers des growls caverneux et sombres). Une chose est certaine, les premières écoutes surprennent et, sous cette créativité débridée et cette fausse accessibilité se cache un énorme travail d’interprétation et une folie latente et schizophrénique, devenant plus sombre écoute après écoute. “
Don’t Go in the Forest” (et son clip reprenant l’artwork de l’album) sonne certes groovy et mélodique, il n’en reste pas moins menaçant et délicatement dérangeant (comme si nous entendions ce sourire machiavélique chanté à notre oreille), s’offrant au passage un superbe refrain.
Avatar propose avec ce dixième album une grande variété de tons, se permettant désormais l’entière complétude des idées saugrenues que le quintette à en tête. Il faut noter la mélancolie bouleversante du sublime “Howling at the Waves” portée par la voix suave de Johannes et un piano d’une réelle sensibilité, la radicalité d’un “
Abduction Song” rappelant “
Hail the Apocalypse” ou l’aspect death mélodique “made in Gotebörg” d’un “Take this
Heart and
Burn It” totalement déluré. “Magic
Lantern” conclut ce périple dans une musicalité plus planante, plus 70s rock psyché avec une production moderne rendant l’atmosphère plus poisseuse, plus vicieuse et dangereuse (les quelques growls, les sonorités de claviers vintage ...).
Avatar signe une œuvre complète et personnelle, à mon sens bien plus aboutie que ses deux prédécesseurs et rappelant la cohérence de “
Avatar Country”. Un album portant le sceau de son géniteur, auquel il faut évidemment accrocher pour pénétrer dans cet univers si particulier, à la fois dangereux et accueillant, glacial mais rassurant, abrasif mais sucré.
Je l'avais écouté il y a qq jours déjà et j'ai adhéré immédiatement ! Tout me plaît dans cet album !
Pour ma part Howling at the Waves est une purge. J'ai l'impression d'entendre Coldplay.
Sinon je suis entièrement d'accord avecc cette très bonne chronique.
Merci pour la chronique !
Je viens de le faire tourner pour la première fois. Et bien je suis très agréablement surpris. C'est peut-être pour moi le meilleur depuis au moins Feathers & Flesh. Très varié, comme tu le soulignes on se balade un peu dans toutes les époques. Bon tout n'est pas parfait, Howling at the Waves en tête (des accords et mélodies entendues 1000 fois avant pour un morceau pop lambda), et certains morceaux manquent un peu de variété (Captain Goat est trop répétitif), et certains refrains sont un peu trop bateaux (Don't Go In The Forest). Mais à part ces quelques petits désagréments c'est du tout bon.
J'ai vraiment dû louper quelque chose dans cet album car je ne rejoins pas du tout l'enthousiasme général. Bien que je ne l'ai pas trouvé si mauvais, contrairement à ce qui est évoqué dans la chronique, je ne ressens pas vraiment l'expérimentation, ni même la variété au sein des compositions. Ça manque sérieusement de folie et de punch, on voit bien le travail autour de l'atmosphère sombre de l'opus mais passé les premiers morceaux, je trouve le renouvellement insuffisant et peu intéressant. Je regrette également l'absence de titres rapides et de riffs originaux, tout semble assez linéaire de mon point de vue.
Merci pour le texte néanmoins !
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