Déjà deux EP («
At the Edge of the World » (2009) et «
Hard as Ice » (2013)), mais aussi, et surtout, deux albums full length (l'encourageant «
Awakening », sorti en 2010, suivi du sémillant «
Echoes of Betrayal », en
2012) au compteur en à peine 6 ans d'existence, un bagage loin d'être mince pour le quintet britannique ! Porté par ce déjà solide background et mû par un soudain élan d'inspiration, ce dernier reviendra dans les rangs, deux ans plus tard, avec, sous le bras, un troisième effort de longue durée intitulé «
Court of Conscience ». A l'aune de ses 11 pistes égrainées sur une bande auditive de 49 minutes, en quoi cette auto-production permettrait-elle au combo de se démarquer de ses si nombreux homologues stylistiques ? Suivrait-elle alors simplement les traces de son illustre aînée pour recueillir quelques lauriers ou chercherait-elle plutôt à s'en distinguer par quelques digressions qui en fonderaient précisément son originalité ?
Dans ce dessein, auprès de la parolière et chanteuse au timbre frissonnant de profondeur, Vicky Johnson, sévissent à nouveau le fin claviériste et orchestrateur Steve Johnson, le polyvalent guitariste Sam Cull et le bassiste
Ian Heddle, le batteur
Wayne McAloon se voyant, lui, remplacé par Steve Hauxwell (ex-
Marshall Law). Aventure à laquelle ont également été conviés : Damian
Wilson (
Headspace, Star One,
Maiden United, ex-
Threshold...) à la narration ; Jermain van der Bogt (
For All We Know, guest chez
Ayreon et
Bong-Ra) et Nathaly Heijne aux choeurs ; Sietse van Gorkum au violon ;
Jonas Pap (
Red Limo String Quartet, The Kyteman Orchestra, guest chez
Epica,
Xandria,
Within Temptation,
The Gathering) au violoncelle. Une belle distribution, s'il en est, renforçant tout en la magnifiant la ''symphonicité'' du message musical délivré.
Ce faisant, le combo britannique nous plonge, cette fois, dans un univers metal mélodico-symphonique gothique aux relents heavy, progressif et cinématique. Bien moins orientalisant que son prédécesseur, cet opus à la fois vitaminé, enjoué, énigmatique et romantique se calerait davantage dans le sillage de ''
Awakening'', leur premier bébé, non sans d'inédites sonorités au programme des réjouissances. Aussi, ce troisième effort demeure-t-il dans l'ombre des mêmes modèles identificatoires, dont
Nightwish,
Xandria,
Stream Of Passion,
Autumn et
Diabulus In Musica, la touche personnelle en prime.
Côté production, le degré d'exigence du collectif d'outre-Manche en la matière ne saurait là non plus être démenti. Produit par le guitariste de
Within Temptation, Ruud Jolie, mastérisé par un certain U.E. Nastasi (
Dream Theater,
Soilwork,
Visions Of Atlantis,
Paradise Lost,
Cradle Of Filth,
Devin Townsend,
Gojira...), et mixé, à l'instar de
Delain et Elleanore, par le guitariste Stefan Helleblad (
Within Temptation, JoNo...), le méfait jouit, en effet, d'un enregistrement de fort bonne facture, n'accusant dès lors que d'infimes sonorités résiduelles, d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation, et surtout d'une saisissante profondeur de champ acoustique. Indices révélateurs d'une impérieuse envie de porter l'estocade de la part de nos cinq belligérants...
A l'image du précédent effort, c'est à la lecture de leurs pistes les plus magmatiques que nos acolytes parviennent le,plus aisément à nous aspirer dans la tourmente. A commencer par «
Knife Edge » et « Order of Your
Faith », ''xandriens'' up tempi recelant tous deux un refrain immersif à souhait mis en exergue par les chatoyantes inflexions de la sirène. Dans cette énergie, on ne saurait davantage éluder l'entraînant et ''nightwishien'' « Before It Began » aussi bien pour ses sémillants arpèges d'accords que pour son enveloppante ligne mélodique et son bref mais vibrant solo de guitare. Non moins engageants tout en variant leurs phases rythmiques à l'envi, et mis en habits de lumière par les limpides oscillations de la princesse, l'''autumnien'' « Constant Tomorrows » comme le ''diabulussien'' « Behind Closed Doors » auraient, eux aussi, les arguments pour se voir aisément inscrits dans les charts.
Lorsqu'il s'adonne à d'amples plages symphonico-progressives, exercice de style auquel il est déjà rompu, le collectif ne s'est guère avéré plus malhabile, loin s'en faut. Ainsi, abondant en péripéties tout en révélant une mélodicité toute de fines nuances cousue, dévoilant parallèlement un fin picking à la guitare acoustique doublé de délicats arpèges au piano, les 6 minutes du ''nightwishien'' « Critical
Mass Part 1 - Burdened » aspireront sans ambages le pavillon de l'amateur du genre. Et ce ne sont ni les poignantes impulsions de la déesse, ni le bref mais infiltrant récitatif dispensé par Damian
Wilson, ni le final en crescendo qui nous débouteront davantage de cette gemme.
Quand le rythme de leurs frappes se fait un tantinet plus mesuré, nos compères trouvent là encore les clés pour nous assigner à résidence. Ce qu'atteste, en premier lieu, l'énigmatique et ''diabulussien'' mid/up tempo syncopé « With Intent », tant pour son pont techniciste exécuté avec maestria et la soudaineté de ses accélérations que pour ses couplets d'une confondante sensualité. Non sans rappeler
Stream Of Passion, le mid tempo progressif « It's Not Enough », pour sa part, dévoile à la fois un refrain catchy, un fin legato à la lead guitare ainsi qu'une insoupçonnée et grisante gradation du corps orchestral.
Comme ils nous y avaient accoutumés, nos compères se muent parfois en de véritables bourreaux des cœurs en bataille. Ce qu'illustre « The Script », ballade romantique jusqu'au bout des ongles, que n'auraient sans doute reniée ni
Nightwish ni
Stream Of Passion ; sublimé par le poignant toucher d'archet du violoniste, alors secondé par celui, plus en profondeur, du violoncelliste, instillé de la chatoyante empreinte vocale des deux choristes venus s'agréger aux prégnantes patines de la maîtresse de cérémonie, se chargeant en émotion au fil de sa progression, l'instant privilégié ne se quittera qu'à regret.
Est-ce à dire qu'un sans faute serait au bout du chemin ?
Pas tout à fait. Ainsi, en raison d'une sente mélodique en proie à quelques linéarités et accusant une tenace répétibilité de son schéma d'harmoniques, le mid tempo « Toxicate » demeure dans l'ombre de ses voisins de bobine. S'il s'avère apte à nous pousser à un headbang bien senti et si ses arrangements instrumentaux s'avèrent de bon aloi, au regard de séries d'accords tendant à l'uniformité et à une césure prématurément amenée, le mid tempo heavy mélodique « Affliction » peinera lui également à nous convaincre de son efficacité, voire de sa raison d'être.
Au final, le prolifique quintet britannique nous livre un message musical aussi puissant et enjoué qu'empreint de délicatesse, que l'aficionado de ce registre metal se plaira à se repasser une fois l'ultime mesure de la galette envolée. Diversifié sur le plan rythmique et vocal, le skeud l'est en revanche bien moins que son aîné quant à ses ambiances, ambiances qui, ici, tendraient même à une certaine stéréotypie. Bénéficiant, par ailleurs, d'une ingénierie du son plutôt soignée, d'une technicité instrumentale ne souffrant que de rares approximations et d'exercices de style variés, ce troisième full length se fait toutefois un poil moins enivrant que son devancier quant à ses mélodies, et non exempt de bémols dont certaines pistes s'en font l'écho. Etat de fait qui ne saurait entraver la marche en avant du collectif ni l'empêcher de le propulser dès lors parmi les valeurs confirmées du metal symphonique à chant féminin. Moins racé et galvanisant que son devancier, ce troisième effort confirme toutefois le potentiel pressenti...
Note : 14,5/20
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