Décidé à ne pas jouer les figurants dans un registre metal gothique symphonique déjà visité par une sévère concurrence européenne, le groupe britannique a réagi, et de quelle manière ! Ainsi, avec pas moins de treize titre se succédant sur plus de cinquante-deux minutes, il semble déjà imposer le respect. Est-ce à dire que les
Xandria,
Diabulus In Musica et autres
Autumn, n'auraient qu'à bien se tenir ? Compte tenu de l'imposant arsenal instrumental déployé, de la qualité de leurs compositions, de celle de leurs textes autant que de leur interprète, la question se pose en effet.
Le quintet compte dans ses rangs Vicky Johnson, chanteuse au timbre frissonnant de profondeur. Elle s'accompagne du prodigieux claviériste Steve Johnson, du polyvalent guitariste Sam Cull, du bassiste
Ian Heddle et du fin technicien en la personne de
Wayne McAloon, batteur du groupe. L'ensemble ainsi constitué forme une belle unité, insérant les instruments dans une parfaite cohésion. Et ce, tout en veillant à équilibrer orchestration et parties chantées. De plus, autant la technique fait preuve d'une grande efficacité, autant les harmonies distillées sont prégnantes et ne lâchent nos émotions qu'en de rares occasions.
L'immersion s'effectue progressivement et s'accentue dès la quatrième piste. C'est au cours d'instants rythmiquement entraînants que le magicien opère le plus adroitement. Il y mêle un metal gothique symphonique imposant et une empreinte pop rock, à la fois dans les arpèges et les lignes mélodiques, au demeurant nuancées et épurées.
Au coeur de l'opus apparaît l'imparable "Ruled by Fear", au tempo soutenu et aux refrains catchy. Ce hit nous octroie également un break opportun et un solo de guitare au picking véloce. Sous les ondulations vocales de Vicky en complément, difficile de rester impassible.
Harmoniquement plus dense s'ensuit le tout aussi mélodieux "Frustrated
Dreamer", introduit par un délicat toucher au piano. Des riffs échevelés s'invitent alors en parallèle à une rythmique invitante. En outre, des notes perlées s'égrainent le long d'un train synthétique et contribuent à magnifier les refrains, d'ailleurs finement servis par les jolis médiums modulés de la sirène. Cette dernière propose même des variations de tonalité et des reprises saisissantes. On a alors le sentiment de retrouver quelques lignes mélodiques dans le sillage de
Xandria. Idem pour le fondant "
At the Edge of the World", où riffs incisifs, rythmique incitative et nuances harmoniques sont au programme. Sans parler des refrains qui ne manquent pas de nous émouvoir par la justesse des accords inondant nos pavillons de leur lumière. Un beau solo de guitare n'a pas non plus été omis dans le décor. Ces trois morceaux successifs témoignent déjà de l'impact recherché autant que des aspirations artistiques et des capacités techniques du groupe.
Dans cette mouvance, s'agrège "Stolen Fairytale", lui aussi initialisé par quelques arpèges au piano. Si ce titre délivre une souplesse rythmique d'inspiration pop rock, les riffs demeurent cependant rageurs. Rien ne vient perturber le plaisir prodigué par l'écoute des couplets habités et des refrains ouatés, et ce, suivant une ligne mélodique proche de la perfection. Puis, le morceau finit comme il a commencé, en notes moelleuses au piano.
Lorsque la batterie se fait plus roborative, le combo ne faillit pas à la tâche, loin s'en faut. Avec ses riffs roulants, le plombant "
Fate Will Oblige" rappelle
Amberian Dawn. Telles des gouttes de pluie glissant sur la chaussée, les suites de notes qui se dessinent témoignent, là encore, de l'habile doigté du pianiste. Les refrains nuancés sont finement vêtus du châle vocal de la diva. On jouit aussi d'un original break en piano/voix précédant une surprenante reprise en guitare/voix. Enfin, le volet se referme sur quelques touches judicieusement effleurées par Steve. Même ambiance gothique symphonique pour "The
Awakening Chapter One : Introspection". Tel un fil conducteur, ici plus qu'ailleurs, le piano est omniprésent. Mais, la scène appartient bien à l'experte chanteuse qui, de sa voix profonde et limpide, nous prend par la main sur des couplets qu'elle peint avec grâce. Les refrains, en revanche, se montrent curieusement plus ternes. On remarquera enfin un break au piano rapidement suivi d'un synthé ondulant et d'une guitare/voix plutôt agréable.
Pour diversifier son propos musical, le combo a saupoudré certaines plages d'une touche progressive. L'exercice s'est avéré convaincant sur le sulfureux "
Cry", qui n'est pas sans évoquer
Diabulus In Musica. Les claviers se succèdent sans encombres, le délicat piano s'effaçant au moment où s'éveille le serpent synthétique. Des perles de notes à la guitare complètent cette riche panoplie instrumentale qui, d'ailleurs, s'embrase au final avant qu'un autre dégradé au piano ne prenne le relai. On remarquera, au passage, le vibrato pleinement maîtrisé tout comme l'ampleur des inflexions de la belle. Une petite empreinte progressive se fait jour également sur l'outro "The
Awakening Chapter
Two :
Unspoken". Un agréable piano/voix introduit ce titre sensible, à la mélodie assez linéaire. Cela dit, la progressivité se fait attendre pour n'apparaître qu'un peu avant la sortie. Enfin, le piano reprend le flambeau pour conclure l'opus de belle manière.
Comme pour marquer une pause, à cinq pistes d'intervalle l'une de l'autre, apparaissent des instants exclusivement instrumentaux. Si le grandiose "
Aragon" bénéficie d'arrangements de qualité, de par sa brièveté, il ne fait que jouer le rôle d'interlude. Il en va tout autrement pour le dynamique "Windelfell". Arpèges savoureux, riffs arrondis, nappes synthétiques enveloppantes, accords précis sont au rendez-vous. A la manière d'
Edenbridge, le combo a su conjuguer technicité et mélodicité. Il en ressort une impression d'allégresse et d'une belle unité instrumentale au son de ce chatoyant bain orchestral.
Enfin, les riffs peuvent se montrer plus acérés, comme sur l'entame "Oblivion", à la fin brutale, ou sur "
Inside", au rythme syncopé. Dans ce contexte, les lignes mélodiques se montrent plus floues, moins impactantes que pour les morceaux sus-cités. Malgré les appels de la sirène et un beau solo aux claviers, le premier titre accroche moins aisément que prévu et s'achève précipitamment. Sur le second, malgré ses couplets bien ciselés, les refrains ne font pas mouche et le solo de guitare est bien trop fluet pour retenir l'attention.
Plus charismatique, l'énergique "
Alighieri" s'en sort mieux grâce à la belle patine de ses refrains.
On comprend dès lors qu'on assiste là à l'émergence d'un gemme du metal gothique à chant féminin. Certes, quelques imprécisions jalonnent le parcours du chemin mélodique général, mais les rares défauts de production compensent cette irrégularité. On ne boude pas longtemps son plaisir sous l'impact des gammes expertes qui viennent lécher nos pavillons, se loger dans nos âmes pour certaines. On aurait peut-être souhaité une ou deux ballades pour parachever cette oeuvre d'une densité artistique déjà imposante.
On conseillera cet album aux amateurs de metal gothique à tendance symphonique. Les fans des groupes sus-cités, eux aussi, y trouveront matière à satisfaire leurs aspirations. Cette galette, de par sa convivialité harmonique, conviendra également à des publics non forcément initiés aux codes du genre.
le groupe signe là un premier opus qui saura trouver sa place parmi les oeuvres significatives du metal gothique symphonique. Il lui faudra encore peaufiner ses prestations scéniques pour les rendre plus conformes à celles dispensées en studio. Ceci dit, l'expérience aidant, le talent et l'opiniâtreté du combo sauront l'imposer dans le paysage metal européen. On attend déjà une suite au projet du groupe. L'intuition fait penser votre humble serviteur que le groupe saura rapidement ne pas se faire oublier...
Ceci dit, je trouve que ce groupe britannique se défend pas mal du tout face à des concurrents plus en vue sur cette scène metal-là.
Pour un premier opus, celui-ci m'avait déjà impressionné tant par l'inspiration des compositions, le brio des musiciens que par les talents de l'interprète.
En fait, il fait partie de ces albums dont on ne se lasse pas.
J'ai comme l'impression qu'après leurs trois opus, ils ne vont pas en rester là...
Ta chronique donne vraiment envie d'aller écouté cet album.
De plus si tu dis qu'il pourrait rivaliser facilement avec des groupes comme Xandria,Diabolus In Musica,ect.. Alors là respect !
Encore merci pour cette chronique ericb4!
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