Même les sanctuaires les plus pacificateurs de la Terre peuvent renfermer dans leurs tréfonds des caches obscures où on ne voudrait pas y végéter. Quand on écoute du «
Black Label Society », on se dit très souvent que c’est cool, que c’est de la musique qui ne fait pas dans la surenchère, qui calme les ardeurs de façon nette et sans bavure, un lieu de culte aux remparts solides, où l’auditeur en santiags habillé de cuir aime y méditer. Pourtant les paroles de
Zakk Wylde ouvrent des tombeaux, s’accoquinent parfois avec la mort et l’obscurité. Il est important de ne pas retenir que l’apparence, même si on peut largement s’en contenter. La formation américaine «
Black Label Society » en est rendue en 2014 à son neuvième album studio. C’est ce que corrige
Zakk Wylde à ceux qui prétendent qu’il en est à son dixième, «
The Song Remains Not the Same » sorti en 2011 comprend d’anciens morceaux de « B.L.S » en mode acoustique mais aussi des reprises. Ce n’est pas un album à part entière contrairement à «
Catacombs of the Black Vatican » qui est la véritable suite au génial «
Order of the Black ». On peut y voir là un lien avec les propres studios de Zakk à
Los Angeles nommés «
The Black Vatican », où l’album a d’ailleurs été enregistré. Moins audacieux et percutant que son digne prédécesseur «
Order of the Black », «
Catacombs of the Black Vatican » se contente d’une musique claire, précise et sans complexe. Comme pour tout tombeau, les catacombes sont des lieux de recueillements, mais plus encore, un endroit où l’on vient se réfugier.
«
Black Label Society » s’attache cette fois à la sobriété. Point d’excès et d’excentricité sur cet album, point de tenue de
Kill Bill ou de scénario à la Tarantino. On reste sage cette fois. « Fields of Unforgiveness » qui ouvre les hostilités n’a rien d’un morceau dantesque. Le groupe s’attache à un stoner US bien assis sur sa chaise, avec des riffs gras, sexy, acérés dans une atmosphère aride et caniculaire. Rien d’intrépide non plus sur «
Beyond the
Down » qui se contente de la simplicité, éloigné de tout excès, et qui parvient pourtant à accomplir son but de nous distraire. Son refrain marque un certain sursaut, une reprise de fermeté bien utile pour éviter au morceau de tomber dans la monotonie. C’est aussi à ça que peuvent servir les solos, et nous en avons un remarquable au dernier tiers de piste du très tempéré et larvé « Believe ». Toujours dans cette donne du stoner aéré à l’engagement juste et mesuré, «
My Dying Time » est encore l’occasion pour Zakk de s’illustrer par une sortie dont lui seul, apparemment, a le secret. Nous notons là que la batterie métronomique de Chad Szeliga fait presque jeu égal avec les riffs endurcis de ce morceau alléchant.
La seconde moitié du disque est davantage propice aux démonstrations énergiques, malgré l’exception offerte, et pas des moindres, par le hard graveleux et solide de «
Heart of
Darkness » sur la première moitié. C’est une règle qui se vérifie principalement à partir du trépidant « Damn the Flood », où on sent enfin le «
Black Label Society » déchaîné que l’on connaissait, même si quelques riffs larvés viennent s’incruster en milieu de piste, peu avant le solo magistral du maître. Il faut bien parler de coup de génie pour « I’ve Gone Away », véritablement le tube de l’album. Un titre tout en subtilité, usant parfois de riffs massifs et écrasés. En fait, on passe incessamment de l’homogénéité à la plus grande fluidité. Zakk use moins ici de son chant osbournien, il laisse planer sa voix, comme une longue et tranquille respiration. Ce qui donne au final un titre transcendant, assez à part au sein de l’opus. « Empty
Promises » est pourtant lui aussi assez particulier, notamment si on s’attache à son entame très intimidante. Mais on revient vite à un stoner endurci et plus habituel. Ce morceau est surtout attachant pour son refrain. Il vient débusquer un ensemble terré et assez ombrageux. Ce qui s’associe bien aux paroles, révélant un goût amer, des promesses non exécutées qui appellent à la colère, voire à la vengeance.
La présence de ballades fait partie des us et coutumes de «
Black Label Society ». Et comme chaque fois nous en avons toujours un peu plus que d’accoutumée chez les autres formations. On retiendra parmi eux le remarquable «
Angel of
Mercy », extrêmement tendre et léger, avec un soutien symphonique en fond sonore. Il se différencie quelque peu de « Shades of Gray », qui s’identifie plus à un slow eu égard à son rythmique extrêmement lent. Il y aura un certain rapprochement possible avec le titre «
Angel of
Mercy » sur « Scars », bénéficiant également d’un petit support classique lors du refrain. On ressent cette fois davantage l’essence nord-américaine dans la musique, avec sa part country et blues. Ces deux éléments sont d’ailleurs éminemment présents sur le morceau bonus «
Blind Man » sur l’édition limitée de l’album. Fait étrange, à la lecture on vous affichera le titre « The
Nomad », que l’on trouve sur l’édition noire de «
Catacombs of the Black Vatican ». Mais, il s’agit bien en fait de «
Blind Man ». Le bonus «
Dark Side of the Sun » est présent sur les deux versions.
Pas d’erreur possible. C’est un titre qui a énormément de répondant, aux riffs contorsionnés et nerveux, s’inscrivant dans ce que nous avons croisé sur une bonne partie de la seconde moitié de l’opus.
Dans les catacombes ne règne que la quiétude. C’est vrai que ce nouvel effort de «
Black Label Society » marque un certain retour à l’assagissement. Dommage que l’on peine cette fois à y trouver des titres proprement monstrueux.
Zakk Wylde n’a pas affiché le désir de foutre le feu, juste de prendre son plaisir et de nous emmener plus en douceur dans les contrées désertiques de son grand pays. « Repose en Paix », c’est un peu le message qui nous traverserait l’esprit en écoutant cet album. Les piles de têtes de mort que l’on retrouve à profusion dans l’artwork ne font que corroborer cette idée. Certains pourront y voir un avant-goût du sinistre, mais ce sera vite démenti par l’écoute qui fera un bien meilleur accueil que la pochette à l’auditeur, tout en finesse et en chaleur. Je vous avais précisé qu’il ne fallait pas retenir que l’apparence. Un tas d’os n’a jamais mangé personne. En revanche, «
Black Label Society » a su garder tout son appétit.
14/20
à mon souvenir, le fait qu'il y ait un excès de ballade était déjà le cas du disque qui a précédé "Order of the Black", c'est à dire "Shot to Hell". Je comprends que cette coutume peut paraître gonflante, même s'il faut bien reconnaître que Zakk a le don de produire de belles ballades.
@SF
Quand on prend de l'âge on a tendance à se montrer plus sage. Ce n'est pas vrai pour tout le monde, malheureusement ^^
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