Quelle histoire que celle du Black
Metal norvégien au début des années 90... incendies criminels, menaces de morts, suicides, meurtres, etc... le Black
Metal est à l'apogée de son horreur. Cependant, bien qu'il soit important de situer le contexte historique de cet album mythique, nous ne retracerons pas toutes les aventures du Black Inner
Circle. Nous sommes en mars 1992, et cet album éponyme de
Burzum voit le jour sur le label du célèbre Euronymous :
Deathlike Silence Production. Auteur de deux démos auto-produites, le one man band du également célèbre Varg Vikernes avait séduit le guitariste par le son « extrême et nouveau » qu'il proposait alors. Varg était déjà connu de quelques membres aujourd'hui piliers de la scène Black
Metal pour avoir joué dans le groupe, splitté depuis,
Old Funeral (avec entre autres
Abbath et
Demonaz). C'était donc plein d'espoir que Euronymous prit
Burzum sous son aile pour le promouvoir...
La pochette, tout d'abord. Réalisée par Jannicke Wiise-Hansen (qui a également conçu la pochette de
Det Som Engang Var, le logo d'
Enslaved et d'
Immortal pour ne citer qu'eux...), elle est extrêmement sombre. Une nuit noire et un brouillard laissant voir quelques arbres morts et une ombre. Simplement. C'est le premier aperçu de la noirceur qui nous attend dans cet album, qui s'ouvre sur «
Feeble Screams from Forests Unknown », une piste de 7 minutes, révélant alors rapidement la voix torturée de Varg Vikernes qui va hurler tout le long de cet album. Un premier riff relativement rapide et typique du Black
Metal tel qu'on le connaît laisse alors place, après cette introduction, à un riff lent et morbide, qui hypnotisera n'importe quel adepte du genre. La voix glaciale, possédée, plaintive, voire même agonisante, de Varg Vikernes est sûrement un des traits les plus marquants de cet album. On ne la retrouvera plus tard que sur les albums «
Det Som Engang Var » et «
Hvis Lyset Tar Oss ».
Vient ensuite « Ea,
Lord Of The
Depths » (que Euronymous avait imprimé par erreur Ea,
Lord Of The Deeps), morceau désormais culte parmi les cultes, qui se lance par une fameuse double pédale ô combien utilisée dans le milieu du metal en général. Les riffs se lancent et se ressemblent globalement il faut le dire. Ce morceau reste relativement rapide sur tout le long.
A noter que quelques solos de guitares trouvent leur place, ce qui nous permet de savourer plus amplement ce son de guitare si particulier, propre à cet album. Ce brouillon pourtant clair, cette laideur si attrayante, c'est un sentiment indescriptible qui nous envoûte à travers ses cordes. Et ce sentiment est terriblement présent sur « Black
Spell of Destruction », qui est peut-être la meilleure piste de cette œuvre. Sombres à en mourir, de la première à la dernière seconde, les riffs morbides de guitares vous attrapent au fond des tripes et vous maintiennent dans un stress moribond... sans parler des horribles hurlements de torture qui nous sont proposés dès la quatrième minute du morceau, accompagnés encore une fois par cette sinistre guitare dont le riff va grouiller dans votre esprit sans jamais en sortir. Ce morceau est au-delà de tout.
Nous vient ensuite une piste instrumentale presque apaisante : « Channelling The
Power Of Souls Into A New
God », entièrement jouée au synthétiseur, c'est ce qui se rapproche le plus de ce que nous proposera alors le Count lors de son séjour en prison en 1997 avec son album Daudi Baldrs (également composé au synthétiseur, seul instrument auquel il avait accès alors). Très envoûtant, le morceau vous relaxerait même après cette perle noire qu'est Black
Spell of Destruction, avant d'enchaîner sur, à nouveau, un hymne du Black
Metal : «
War »
Qui, bercé dans le Black
Metal, n'a jamais entendu
War ? Réellement ? Morceau rapide, rythmé, ô combien repris,
War est une figure emblématique du Black
Metal actuel et encore plus de celui d'antan. Le morceau s'achève sur ce qui est pour moi le meilleur solo de l'album, car beaucoup plus prenant aux tripes. Il reste intéressant de savoir que ce fameux solo est joué par... Euronymous !
Ce «
War !! » hurlé en guise de refrain ne pourra jamais vous laisser indifférent.
La guerre finie, « The Crying Orc », piste instrumentale de moins d'une minute vous prépare pour le célèbre « A
Lost Forgotten Sad Spirit ». Une pièce longue de presque onze minute, alternant entre ces fameux riffs rapides où la double pédale domine et ses riffs lents et glacials.
« My
Journey To The Stars », titre qui replonge dans les ténèbres du premier morceau. D'une longueur relativement similaire (huit minutes), la piste reste fidèle au reste de l'album, et cette batterie vers les six minutes quarante, les toms frappés tels des tambours de guerre vont donneront des frissons dans le dos.
Encore une fois, morceau on ne peut plus ambiant : « Dungeons
Of Darkness ». Quelques grincements, un bruit profond et omniprésent, de plus en plus pesant, un (presque) silence mortuaire assez long, puisque le morceau dure presque cinq minutes. Ce seront cinq longues minutes pour les non adeptes de l'ambiant. Et ces cinq minutes clôtureront donc l'écoute de ce monument norvégien : l'album éponyme du célèbre one man band
Burzum.
Voilà, considérons en conclusion que cet album est... exceptionnel. Oui, je le qualifierais d'exceptionnel car tout y est unique. Ce son est unique, ce chant est unique, cette froideur dans les riffs de guitare est unique, cette ambiance morbide est unique. Nombreux sont les groupes qui témoignent d'une ambiance morbide, funéraire, glaciale, glauque, malsaine et tout autre adjectif du même genre, mais aucune n'est celle de cet album de
Burzum, preuve que cette production n'aura probablement jamais son pareil. Il pourra s'avérer répétitif, long, ennuyeux pour certains, c'est évident, mais il ne pourra jamais laisser indifférent ou ne pas surprendre son auditeur.
Cependant, on pourrait se poser une question en écoutant cette merveille : d'où est tiré son succès ? Est-ce bien en effet du talent du Count, ou est-ce dû aux événements qui suivirent peu de temps après ? Il est évidemment sûr que l'année 93 a créé une vague dans le milieu du Black
Metal et de nombreux groupes ont alors commencé leur carrière. Comme disait Metalion, personne ne connaissait Vikernes lors de son arrivée sur la scène Black
Metal. Euronymous semblait très enthousiaste devant l’œuvre de
Burzum, ce qui n'est probablement pas un manque de goût, preuve en est. Il est également impossible de nier que les actes de Varg n'ont pas aidé à sa popularité croissante et à son influence plus que gigantesque dans la scène. Cependant, parmi les milliers de one man bands qui existent, est-ce qu'un seul a su créer cette atmosphère dont cet album fait preuve ?
Et si rien ne s'était passé, est-ce que
Burzum serait allé aussi haut ? Impossible de le dire car l'Histoire s'est déroulée autrement. Toujours est-il, qu'à mes yeux, cet album est inimitable, doté d'une force misanthropique malsaine, moribonde. Les influences de Varg Vikernes sont notables aussi, notamment Ea, divinité mésopotamienne connue aussi sous le nom d'Enki, ainsi que l'écrivain J.R.R Tolkien, évidemment. L'homme a donc fait parler son âme à travers ce chef-d'oeuvre, et pour moi, c'est du talent.
Un album hypnotisant, fascinant et dégoulinant de noirceur, inimitable, unique et gravé dans l'Histoire du Black
Metal.
Petite précision quant à la pochette (également valable pour celle de Det Som Engang Var) : elle est bien signée Jannicke Wiise-Hansen, mais il s’agit en réalité d’une reprise frôlant la contrefaçon d’une illustration réalisée à l’origine par Keith Parkinson pour un antique module d’Advanced Dungeons & Dragons : The Temple of Elemental Evil. Quand on sait que Vikerness était un énorme fan de jeux de rôles dans sa jeunesse (et même encore maintenant, puisqu’il en a récemment publié un), ce gros clin d’œil n’est guère étonnant.
L’illustration originale peut être vue ici :
https://www.tumblr.com/search/the temple of elemental evil
Merci pour la kro ! :)
Intéressant à savoir, je ne connaissais pas tant de chose sur cette pochette, merci!
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