En avril 2013,
Prophecy Productions, prestigieux label allemand, décidait de nous gratifier d’un single pour promouvoir le nouvel album de
Falkenbach, ayant récemment rejoint ses rangs. Ce single, nommé
Eweroun ("pour toujours / à tout jamais"), dont le titre même sentait l’envie de reconquête après un
Tiurida décevant, rejetait littéralement toutes les craintes que l’on pouvait avoir sur le futur de
Falkenbach. Une mélodie acoustique enivrante, un chant puissant et harmonieux, on ne pouvait tout simplement pas imaginer mieux. Un titre qui avait de quoi nous laisser rêveur sur le reste de l’album.
Un nouveau label, de nouveaux horizons
Revenons un peu en arrière. Là où
Tiurida péchait, (car c’est un fait, l’album était en-deçà des espérances) c’était principalement au niveau des vocaux, et pour cause, ceux-ci étaient quasiment absents. Sur un total de huit titres, dont une intro franchement dispensable, cinq titres étaient en grande partie voir entièrement instrumentaux. L’album nous laissait du coup un malheureux sentiment d’inachevé. Vratyas Vakyas avouera lui-même par la suite être déçu de l’album, car inachevé, la faute en revenant plus ou moins à
Napalm Records. Car depuis quelques années en effet le mastodonte autrichien semble de plus en plus presser ses artistes les moins prolifiques. En 2008 déjà les Norvégiens d’
Asmegin en avaient fait les frais. Habitués à prendre leur temps, comme Vakyas, ils avaient été contraints de pondre Arv en seulement trois mois, de l’écriture au mastering. Chez
Napalm on ne plaisante pas avec le calendrier, et c’est ainsi que, pressé par le temps, le label refusera à
Falkenbach un délai supplémentaire pour finir l’enregistrement (des parties vocales notamment). C’est donc cet épisode malheureux qui impactera sur le contenu de l’album, mais également sur l’avenir du groupe chez
Napalm, Vakyas décidant peu après de quitter le label autrichien pour rejoindre
Prophecy, et ainsi se permettre de peaufiner l’écriture de ce sixième album.
L’album du renouveau
Connaissant le contexte, intéressons-nous maintenant à ce nouvel album, Asa. Avant même d’en lancer la lecture, plusieurs choses nous frapperont visuellement. L’artwork tout d’abord qui, s’il fait encore une fois la part belle à un peintre romantique allemand (avec, à l’instar de
Tiurida une œuvre d’Albert Bierstadt), nous interpelle par sa dominante bleu nuit, très inhabituelle chez
Falkenbach. Un bleu qui semble nous indiquer que ce sixième album sera plus froid que les précédents. Mais à part l’artwork, on se rendra vite compte d’un autre changement important, la langue utilisée. Car si par le passé
Falkenbach a quasiment toujours utilisé l’anglais (quand les textes n’étaient pas tirés des Eddas et autres textes mythologiques), sur Asa, hormis un titre qui demeure en anglais, Vratyas Vakyas à décidé d’utiliser un ancien dialecte allemand, autrefois parlé par ses grand-parents. Un dialecte que Vakyas lui-même aura dû apprendre pour écrire les paroles de ce nouvel album, rendant ainsi un hommage fort à ses ancêtres, et conférant à l’album un côté plus personnel encore qu’aucun de ses albums précédents.
Une musique contrastée
Pour la structure de l’album, Vakyas a choisi de reprendre la recette qui avait fait le succès d’Heralding The Fireblade, à savoir une moitié de titres en chant clair et une moitié de titres beaucoup plus agressifs. Ainsi l’ouverture se fait avec un titre léger, Vaer Stjernar Vaerdan puis s’enchaîne rapidement avec Wulfarweijd, surprenant de par son agressivité. Et c’est le même schéma qui sera repris tout au long de l’album, alternant systématiquement les rythmes et les ambiances. C’est d’ailleurs ce mot, ambiances, avec un "s", qui résumerait au mieux l’album. Car si les visuels et la langue allemande contrastent avec les albums précédents, à l’écoute du cd on remarquera que la musique est empreinte de plusieurs styles, déjà propres à
Falkenbach ou non. Si Mijn Leazt Wourd, par exemple, semble sortir tout droit de l’époque
Ok Nefna Tysvar Ty, l’agressif I Nattens Stilta se rapprocherait lui plus des débuts (période En Their Medh Riki Fara). Et ces liens se font parfois par de simples détails, comme les chœurs utilisés sur le premier titre, qui étaient déjà utilisés sur Skirnir en 2005.
Plus surprenant, certains titres (notamment les plus agressifs) feront parfois penser à d’autres groupes. Ainsi,
Ensiferum n’aurait pas renié Wulfarweijd, qui, tant par son rythme, sa mélodie, que par le chant de
Tyrann, se rapproche assez du groupe finlandais. Il en sera de même avec Bronzen Embrace, assurément le titre le plus écrasant de l’album (loin des standards de
Falkenbach), qui nous fera immanquablement penser aux premières heures de
Kampfar, tant par son rythme soutenu que par son chant proche de celui de Dolk.
D’autres titres encore, comme le magnifique
Eweroun, ou le final Ufirstanan Folk feront également figure d’ovnis, par leurs ambiances beaucoup plus folklorique.
Pendant quarante minutes nous avons donc droit à un tour d’horizon impressionnant de toutes les facettes de
Falkenbach, renouant avec le passé pour certains titres, et marquant l’arrivée de nouveaux éléments pour d’autres. On remarquera aussi que la plupart des titres sont assez courts, tournant autour des quatre minutes.
Plus courts, et plus expéditif, (à l’image de Stikke
Wound exécuté en moins de trois minutes), mais tout cela n’est évidemment pas le fruit du hasard. En effet, les membres du Grand Guignol (ex-Vindsval), Boltthorn,
Tyrann et Hagalaz, autrefois simples musiciens de session, faisant aujourd’hui officiellement partie du groupe, ont pour la première fois pu prendre part à l’écriture. On se doutera donc que ce détail n’est pas étranger à la plus grande agressivité de Asa.
Un album à plusieurs facettes… parfois difficile à appréhender.
Si tout cela combiné apporte de la fraîcheur et de l’énergie à l’ensemble, cela a aussi, malheureusement quelques inconvénients. Car si sur Heralding The Fireblade l’alternance entre titres folks et titres plus agressifs semblait logique, fluide, car étant tous liés par une certaine harmonie, ici ce n’est pas le cas du tout. A tel point qu’on en vient à s’interroger sur la pertinence de cette structure, alternant titres blacks et titres folks de manière systématique et proportionnelle. Car si dans sa conception l’album renoue avec Heralding, les titres sont ici trop contrastés. En effet, si tous les titres pris individuellement sont bons, voir très bons, ce que l’on retient de Asa c’est son changement incessant de rythmes, parfois difficile à appréhender, et l’enchaînement des titres pas toujours évidents, l’exemple le plus flagrant étant certainement la transition entre Bronzen Embrace et
Eweroun. Au final ces nombreux changements de rythmes nous donnent l’impression de passer constamment d’un album à un autre, ce qui malheureusement déséquilibre le tout.
Loin d’être mauvais, Asa souffre d’un manque de cohérence qui le rendra plus difficile à appréhender. Cependant, si les premières écoutes seront plus difficiles, l’album n’est pour autant pas dépourvu de qualités. De ce fait, à aucun moment on ne remettra en cause la bonne volonté du groupe qui signe là un album parfois innovant, mais toujours puissant, qui lui permettra sûrement d’asseoir un peu plus, malgré tout, sa place au panthéon des maîtres du genre.
Katla.
bref merci pour l'effort de rédaction...
@Vanadis : track by track proscrit sur les chroniques... nous ne sommes pas au collège.
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