Les seigneurs du grunge ont déposé leurs armes.
Alice In Chains n'a pas signé son arrêt de mort pour autant mais aucun des signaux espérés ne nous est encore parvenu, seul
Pearl Jam continue de tracer sa route sans bien évidemment connaître le succès foudroyant de ses premiers opus ("
Ten" et "Vs." surtout). Le Big Four n'est donc plus qu'un vaste souvenir mais l'espoir est par-delà les frontières des States, où ère péniblement un certain
Nickelback possédant un sang grunge presque intact. L'apparition se fait certes, bien trop tardive pour pouvoir réellement percer sur la scène du Seattle Sound mais toujours est-il que notre combo compte bien faire parler de lui avec ce second opus progressant nettement dans l'art de créer des mélodies.
Quel qu'en soit la cause et avant même que le quatuor ne perturbe ses activités pour se rendre à l'enregistrement de ce nouveau méfait, le cercle familial des Kroeger vient se réduire un peu plus avec le départ précipité du batteur (et cousin des deux frères du même nom) Brandon Kroeger en 1997. Très vite remplacé au sein de
Nickelback, le scénario se renouvellera pourtant une année plus tard avec Mitch Guindon qui quittera son poste expressément sans avoir eu le temps de déposer la moindre contribution au sein du groupe. Cela permettra néanmoins au line-up de se stabiliser grâce à l'entrée de Ryan Vikedal en 1998 et de saisir la plus belle opportunité de sa carrière : l'obtention d'une signature avec l'un des plus grands labels de musique metal, Roadrunner Records (dans un laps de temps très court). Des noms connus de l'équipe de production, on peut bien évidemment citer Garth Richardson (Melvins,
Rage Against the
Machine...) pour le mixage et Brett Zilahi (
Rush,
Triumph par exemple) occupant la fonction du mastering, à qui on doit ce "
The State" - premier opus du combo à avoir reçu une plus ample visibilité.
Du Canada, on se sent comme transporté dans les grands déserts ricains du Nevada puis dans les immenses massifs montagneux secs et inhabités. En fait, la prod' plus propre (mais bien plus grasse et surtout moins brouillonne) - ce son assez lourd appuyant davantage le côté mélodique et cet avant-goût, cet arriéré parfois stoner y étant pour beaucoup de choses à vrai dire. Oui, du grunge huilé, tout juste. Si l'on souhaite maintenant en retirer le meilleur exemple, il faudra bien sûr se diriger vers "Diggin' This" où la basse de Mike est si perceptible, massive, et le solo, doté d'une sonorisation et d'effets fuzz propres au genre du desert rock ou encore pourrait-on évoquer l'entêtante et quasi hypnotique "Deep".
Sinon, au milieu de tout cela, les Canadiens de
Nickelback semblent bel et bien profiter de la situation pour garder les cochons sur l'ouverture plaisante assurée par "
Breathe" (les guitares poussant très souvent des gémissements en intro/outro) et plus étonnant même, ils se permettent aussi un petit détour, un passage très bref sur la plateforme du monde Oriental via des percussions très rythmées et des passages encore plus étonnants pour une formation de grunge dite traditionnelle à travers "Hold
Out Your
Hand" (cf. à partir de 02:37). Mais les auditeurs n'en seront pas dépaysés pour autant si l'on se réfère aux meilleurs tubes de l'album, ou aux ressemblances repérées sur des titres tels que le fameux "Cowboy
Hat" avec une intensité et des lignes vocales comparables aux jeunes Australiens de Silverchair période "Frogstomp".
Mis à part cela, rien de bien choquant, le quatuor commençant tout juste à prendre son envol, à oublier
Nirvana et à se forger une identité qui leur correspond. Ça passe notamment par davantage de jeux de guitares ("
Breathe" justement - le petit solo de "Not Leavin' Yet" ou les guitares qui font fureur sur "
Old Enough"). C'est un peu imagé, bien sûr, mais pour se représenter la chose telle quelle, il serait intéressant d'évoquer le paysage assez spécial introduit par "Worthy to Say" qui se veut à la fois bien asséché et rocailleux, intégrant par moments, un air bluesy/country rétro à la
ZZ Top dans les parties les plus mélodiques. Déchaîné, intense et produisant ainsi une âme grunge essentielle à la vie et au bon déroulé de cet opus, "Leader of Man" pourrait être un bon point de départ pour les auditeurs qui souhaitent s'aventurer dans les débuts de
Nickelback.
"
The State" respire une telle forme de liberté qu'à l'écoute de celui-ci, on pourrait s'imaginer différentes scènes (toutefois assez improbables) dans lesquelles le bouton play se serait naturellement imposé à nous. Bon, maintenant, c'est simple, je compte jusqu'à trois Cow-boy et si tu n'as pas dégainé ton pistolet à temps, c'est terminé pour toi... Puis continue de causer de la chaleur qu'il fera demain avec Billy Gibbons et Neil Young, tu vas finir par te recevoir un pain dans la figure.
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