Même après quelques efforts de recherche des plus poussés, on peut facilement se rendre compte que les sols Canadiens sont pourtant bien loin d'être réputés pour l'étendue de leurs formations grunge. Cela étant dit, il ne faut pas en oublier pour autant l'oeuvre culte qu'est "Ragged
Glory" issue de la collaboration entre celui que l'on considère maintenant comme le Godfather of Grunge Neil Young et les Américains de Crazy Horse. Avant tout considéré comme l'un des opus les plus influents de la future scène de Seattle (
Nirvana,
Pearl Jam ou encore Sonic Youth s'en étant notamment inspirés sur certains de leurs albums) qui ne se développera réellement qu'à partir de 1991, il fût également l'un des tout premiers albums à être affiliés au mouvement grunge.
Pour parcourir les sentiers déjà bien entamés du genre sale et crasseux de l'arène de Seattle, la famille Kroeger (Chad/Mike/Brandon) et accessoirement, le second guitariste du line-up, Ryan Peake, se sont octroyés les services du producteur et mixeur Larry Anschell (à l'origine du mixage et de l'ingénierie de
Dinosaur Jr. sur le EP "Whatever's Cool with Me") tandis que le mastering nous est signé par le très imposant George
Marino (
Nirvana, L7,
Led Zeppelin,
Ozzy Osbourne et même AC/DC, Jimi Hendrix, Elvis Presley...). Fidèle aux grandes heures du genre, ce "
Curb" se fond donc dans la masse en proposant des riffs distordus, un chant éraillé mais surtout quelques influences très repérables que nous détaillerons plus tard.
La première impression est d'ailleurs très positive puisque la composition qui nous ouvre le bal semble être l'une des plus efficaces et marquantes de cet opus. Le Chad Kroeger qui se pointe sur "Little Friend" est agressif, son chant puissant, rocailleux, et lorsque le petit solo de guitare boueux fait son entrée vers le milieu du titre, on se dit assez impatient de découvrir la suite tant et si bien qu'elle reste du même acabit. De manière très simple, il s'agit donc d'un album grunge qui s'écoute d'un trait, sans interruption pour apprécier son contenu, mais il se trouve que d'un autre côté, nos Canadiens de
Nickelback ont réellement du mal à se détacher de leurs idoles.
Au-delà du fait qu'un timbre éraillé seul ne suffit évidemment pas à forcer la comparaison avec la célèbre bande à
Kurt Cobain, certains auditeurs s'étrangleront presque devant la pâle copie de
Nirvana réalisée tout au long du single promo "Fly". Il est alors utile de préciser que ce l'on peut justement reprocher à ce morceau est son interprétation, et non la démarche musicale à proprement parler qui consistait à mettre ces influences en avant. Car, même si on aperçoit encore une fois du
Nirvana-like sur l'introduction de "Detangler" ainsi qu'une une sorte de révolte punk assez similaire qui s'anime, ce qui frappe sur "Fly" - c'est ce son faiblard et ces mélodies peu profondes, servies par un refrain plat et ennuyeux au possible. Hasard ou pas, toujours est-il que ces deux pièces citées correspondent à celles co-écrites par Jeff Boyd (déjà présent en tant que producteur sur le EP "
Hesher") en plus de "Where?" contenant un son souvent très saturé et "Window Shopper" où la batterie claire et bien clean égale presque les vocaux déformés de Chad qui restent en retrait.
Cependant, "Just Four" reste l'espoir d'une véritable identité, souvent cachée derrière un grunge plutôt simple et brute. Il en ressort ainsi des sonorités plus lourdes, de très bons riffs, des mélodies intéressantes et là où le chant de Chad Kroeger pouvait paraître trop conventionnel voire se répéter, une profonde émotion, mélancolie, passe à travers ces quatre minutes d'intense nostalgie et de punch bien grungy. L'éponyme "
Curb" reste également sympathique, quoique l'on retiendra surtout les breaks puissants et efficaces qui y sont intégrés, plus que nos deux guests (Boyd Grealy à la batterie et Ariel Watson au violoncelle) qui se font très timides.
L'essentiel est assimilé, et ce "
Curb" détient un son grunge à l'état pur pour le grand plaisir des fans. En revanche, il dispose de quelques vides et reste fragile à bien des égards (influence de
Nirvana très présente, identité musicale parfois compromise par des titres pour le moins anodins etc...). Mais qu'importe, les gars de
Nickelback n'ont pas à se bousculer au portillon pour s'imposer sur la scène grunge Canadienne, du moins, pour l'instant.
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