Il était une nuit noire qui fut électrisé au point de devenir un instant majeur, un tournant ésotérique et artistique, une fracture dans un brasier industrielle et macabre. Éminemment créé dans un alliage fait de lumière et de ténèbres, "
Night Electric Night" fut la création du changement, celui qui amena un public différent, une vision plus ouverte et très clairement une dimension internationale à une entité encore fragile et aléatoire.
"
Termination Bliss" avait pourtant permis à
Deathstars de se placer en haut de la hiérarchie metal industriel mais le groupe n’était pas encore un grand groupe de scène et le passé de ses membres laissaient penser un side project qui ne verrait sans doute pas de lendemains trop chantant. "
Night Electric Night" changea tout ça, en multipliant les tournées supports à travers le monde, un show de plus en plus rodé et surtout un groupe solide devenu pilier de la scène (et tournant logiquement avec
Rammstein).
Après cinq ans, "
The Perfect Cult", plusieurs fois repoussé, arrive enfin et la bande à Whiplasher Bernadotte et
Nightmare Industries (Emil Nödtveit) ont la lourde tâche de donner suite à leur premier véritable « best-seller » vendu par palettes entières. Si "
Night Electric Night" avait déjà déçu certains par sa plus grande accessibilité et une place laissée aux claviers bien plus conséquente, il en sera de même avec "
The Perfect Cult". L’ambiance lourde, malsaine et glauque de "
Termination Bliss" appartient au passé et c’est bien un metal catchy que
Deathstars livre aujourd’hui. Reste à savoir si la recette du précédent, mélangeant les saveurs et contenant tout de même une véritable part d’ombre, fera de nouveau effet.
"
The Perfect Cult" ne surprend pas. Jamais. Et c’est dommage, clairement.
Les suédois donnent l’impression de réciter un cahier des charges tellement répété durant leurs précédentes tournées qu’on a souvent la désagréable impression de connaitre les morceaux avant même de les avoir écouter entièrement. Les lignes vocales de Wiplasher, les riffs d’Emil, la place encore plus prépondérantes des nappes de claviers et des effets electroniques, la rondeur de la basse…tout cela rend "
The Perfect Cult" aseptisé et effroyablement creux. Là où "
Night Electric Night" se défendait aisément par la performance exceptionnelle de ce vocaliste schizophrène, il parait ici bien pale, traditionnel, sans folie…restant ancré dans le confort d’un registre qu’il maitrise si parfaitement qu’il n’impressionne plus, voir lasse. La preuve en est sur le titre éponyme, l’un de ceux où il use le plus de son spectre sonore sans pour autant impressionner plus que cela, malgré un timbre allant du grave vers des sonorités plus aigües et nasillardes dont lui seul à le secret. L’utilisation de syllabes et de mots clés identiques aux albums précédents n’aident pas non plus (les « I » ou «
Die » à répétition, repris en chœur).
Que dire des "Explode", "All the
Devil’s Toys" ou encore "
Temple of the Insects" ? Si ce n’est que chacun rappelle le passé direct du groupe et ne provoque rien, si ce n’est déception, agacement ou lassitude. Les mêmes effets, les mêmes idées, la même production, les mêmes riffs…
Deathstars certes veut rester dans sa dynamique mais lorsque votre dernier album a déjà cinq années au compteur, l’excuse est différente que lorsqu’on enchaine deux albums en deux ans et qu’on est dans une vibe logiquement similaire. Certes, le refrain de "All the
Devil’s Toy", le premier single, reste gravé en tête et l’ensemble est efficace mais c’est à peu près tout ce que l’on trouvera de positif au morceau.
Heureusement, certains titres relèveront la tête pour sortir du lot et démontrer une interprétation de très haute volée (comme pour "Arclight" ou "
Opium" sur l’opus précédent). "
Bodies" particulièrement, pour son ambiance suffocante et crade, pernicieuse presque. Les riffs y sont lourds et véritablement écrasant, possédant ce supplément de force faisant défaut à trop de titres de l’album. La ligne vocale est assez incroyable, autant dans les phases narratives que plus chantées, illustrant un réel malaise, une volonté d’avancer et surtout de proposer des émotions ambivalentes et profondément glauques. Le constat est le même sur l’intriguant "Noise Cuts", très atmosphérique mais incroyablement prenant et émotionnel, attrapant les tripes et jouant avec jusqu’à ce qu’il n’en reste rien. Ce n’en est que plus décevant quand on écoute le reste et arrivons à cet avis sans retour possible, cette déception irréversible d’un groupe ne s’étant pas remis en question et n’ayant fait que servir ce qu’il pensait que les fans attendraient de lui.
Ce sera peut-être le cas cette fois-ci, la sauce prendra probablement et le succès sera au rendez-vous mais pour les plus exigeants, ou ceux qui appréciaient justement les humeurs différentes sur chacun de leurs opus, "
The Perfect Cult" est une première erreur qui se devra d’être unique afin de justifier la « thèse de l’accident ». Ce sera la seule et unique fois, sous peine de voir s’effondrer l’un des groupes amener à façonner les prochaines années de son empreinte.
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