Neuf ans. C’est long. Presque une décennie pour attendre. Presque une décennie pour s’impatienter. Probablement autant pour oublier.
Dans un monde désormais en proie à une immédiateté constante et souveraine, l’idée d’attendre est déjà un reproche. Aussi longtemps presque synonyme de mort collective dans l’esprit commun.
Deathstars avait, à une époque, tout pour devenir le fer de lance d’un scène indus urbaine légèrement malsaine et impertinente (particulièrement dans les visuels, le côté SM et cette volonté de choquer) tout en gardant une musique suffisamment accessible pour également plaire aux fans plus mainstream d’un
Rammstein ou d’un
Oomph!. Un vocaliste aux possibilités mutante, un guitariste frère du leader de
Dissection, le plus gros label metal pour les épauler (
Nuclear Blast) et surtout deux albums peuplés de hits avec le phénoménal second opus "
Termination Bliss" et son successeur moins sombre mais addictif "
Night Electric Night". Une ascension évidente, des tournées, un quatrième album plus conservateur ("
The Perfect Cult") puis …
End.
Blackout. Pourtant, dès 2017, Emil Nödtveit évoquait déjà le travail d’un cinquième album. Puis le temps passa. Le covid également. L’absence de concerts. La reprise. L’oubli …
Alors que "
Everything Destroys You" est arrivé dans les bacs, c’est dans un certain anonymat que cela se fait. Peu de promos, peu d’interviews, pas beaucoup de pub ou de visibilité sur les réseaux sociaux du label … comme si personne n’y croyait vraiment. L’usure des tournées, le covid et les difficultés conjucturelles sont évoquées pour justifier ces énièmes retards mais cela importe peu ; il est enfin là. En toute transparence, si je n’en attends plus rien, "
Termination Bliss" reste parmi ces albums de chevet qui ressorte très régulièrement et qui, en plus d’évoquer de beaux souvenirs d’une époque pleine de découvertes, compte ce qui se fait de mieux dans le genre avec une performance de cinglé de la part de Whiplasher.
"This Is", premier titre, premier extrait et premier clip, donne d’entrée le ton. Rien n’a changé et nous sommes exactement dans le même moule que "
The Perfect Cult", avec tout juste un changement de batteur dans le paysage. La voix du bonhomme n’a pas bougé (en comparaison d’un visage plus bouffi et d’un costume le laissant plus à l’étroit qu’il y a quinze ans), les riffs sont similaires et la production, de la main-même du guitariste, est dans la droite lignée de ce que nous connaissons déjà. Un refrain convenu mais des couplets intéressants avec toujours de belles prouesses vocales et cette schizophrénie ambiante, cette capacité de multiplier les approches et les intonations pour laisser se répandre la noirceur et la folie dans une musique désormais plus sage.
Tout est probablement dit dans cette phrase.
Plus sage.
Plus propre. Moins surprenant, presque anachronique,
Deathstars semble avoir arrêté le temps et reprendre sa musique comme si nous étions deux ans après son dernier opus. Est-ce en soi un défaut ? Un reproche ? Chacun y donnera sa réponse mais, en soi, après un "
The Perfect Cult" qui voyait déjà la recette tourner en rond (malgré d’excellents moments), nous étions en droit d’attendre quelque chose d’un semblant différent après tant d’années. Il n’en sera rien.
Les titres s’enchainent. "Midnight Party" sonne comme un "
Night Electric Night" du pauvre (la reprise d’un certain vocabulaire offre en plus une malheureuse résonance nuisant à l’indépendance du titre) pendant que "
Everything Destroys You" et son vocodeur fait planer l’ombre d’un "Arclight" ou "
Opium" mais en beaucoup moins marquant et possédé. On ne retrouve malheureusement pas le travail sur les chœurs, les synthés ou les arrangements qui avait fait des deux albums déjà nommés des références en la matière. L’album se perd dans des tempos très similaires les uns des autres et il est difficile de sortir les morceaux les uns des autres. "An
Atomic Prayer" ralenti le rythme mais son riff martial manque singulièrement de mordant (surtout si l’on compare à un déchirant "Via the
End") et les apparitions féminines ne sont pas franchement marquantes. Il en va de même sur "
Blood for Miles" et les chœurs qui sonnent bien trop pop (dans le mauvais sens du terme), tout comme un solo ultra sucré n’ayant pas vraiment sa place ici.
"
Everything Destroys You" sonne simplement fatigué. Un comble pour un disque sortant après un si long sommeil. Malgré une dernière tentative de réveil sur un beaucoup plus dark "
Angel of
Fortune and Crime", où le phrasé si caractéristique et pervers de Whiplasher refait surface, le résultat se veut malheureusement bien fade en comparaison de l’attente. Peut-être le moyen de se remettre le pied à l’étriller, repartir en live et revenir avec un disque plus massif, travaillé et passionné ?
Seul l’avenir le dira, mais il faudra plus de conviction pour se refaire une place dans une scène en constant mouvement et n’attendant malheureusement jamais les anciennes gloires pour en faire émerger de nouvelles …
Je l'ai trouvé très répétitif mais cuireusement plaisant. J'ai un peu de mal à différencier les pistes les unes des autres si je l'écoute d'une traite même je passe néanmoins un bon moment.
Aucune prise de risque nous sommes d'accord. Par contre il me plaît davantage que son prédécesseur direct, mais reste loin des opus auxquels tu le compares. Mention spéciale toutefois au travail d'illustration à l'intérieur du livret, qui est à mes yeux le plus fin de la discographie, particulièrement pour "An Atomic Prayer".
Merci en tous cas pour la chronique Eternalis.
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