Les trois bouchers du metal alternatif de San Francisco sortirent ce grand n’importe quoi attachant en 1993, la même année du décevant maxi-cd
Miscellaneous Debris.
Le titre était déjà évocateur du ton général de l’album, à savoir du drôle, du gros, du pétillant, et du crade. Débarque donc le grand
Pork Soda.
Le disque s’ouvre notamment sur un petit extrait de l’avant dernière chanson qui sera Pork’s little ditty. Dans ces vingt premières secondes, on devine déjà le coté décalé et humoristique propre aux compositions du groupe.
L’album commence ensuite avec un très bon My Name is
Mud, qui concentre tous les ingrédients habituels qui ont fait la renommée de
Primus, une slapping-basse sonnant très distordue et la voix moqueuse de
Les Claypool, la guitare sifflante et stressante de Larry Lalonde, et la batterie variée et juste de Herb’.
Les amateurs de son lourd, de doubles-pédales mitrailleuses, de voix gutturales, de solos ravageurs seront sans doute désabusés, car ici c’est tout l’inverse, avec des rythmes et des riffs guignolesques, suivis d’une voix volontairement « ridicule ». Et pourtant, cet ensemble qu’on pourrait croire caricatural fait mouche, et on se prend naturellement à chanter My Name is
Mud dès les premiers écoutes.
Welcome to this World est aussi un modèle du genre, avec une mélodie cartoonesque secondée par la voix mozinorienne de
Les Claypool.
La chanson Bob est une sympathique ballade qui perpétue la même formule. Le décalage est complet, on se demande alors pourquoi on classe
Primus dans les groupes de
Metal. Puis survient une basse plus forte, et un rythme plus rock’n’roll ! Donc
Primus reste un groupe satellite entre le metal alternatif et le rock, au style original et inimitable.
DMV est plus rythmée et est aussi un bon cru. A noter à la fin de cette chanson une excellente séquence où Lalonde nous cale un long solo psychédélique par-dessus des combos artisanaux de Herb’ dont lui seul a le secret.
Ol’ Diamondback Sturgeon (fisherman’s chronicles pt3) est comme son nom l’indique une ballade enjouée nous racontant une histoire de pêcheur. On fait dans l’humour et la voix de Les convient pour ce genre de moments.
Dans Nature Boy le ton est volontairement moins joyeux, plus sombre, plus dramatique, et la chanson est ponctuée par de nombreuses pauses durant lesquelles le son peut être qualifié de psychédélique voire fantomatique. A noter un bon développement de Claypool à la basse. Ce genre de faux-rythmes peut en agacer plus d’un, mais
Primus, c’est aussi çà, des séquences volontairement troublantes pour ronger les neurones de l’auditeur.
Dans Wouded Knee, on goûte à l’air frais et chaleureux de la campagne. Herb’ nous fait un espèce de solo par-dessus un rythme composé par de simples cloches bovines. L’ensemble est vraiment amusant au fur et à mesure de la chanson, lorsque ce rythme s’accélère.
Vient ensuite le crade
Pork Soda. En effet, ce que je décrivais comme gros, crade, pétillant et drôle se retrouve pleinement dans la chanson, avec un espèce de mugissement grossier qui sert de métronome à la voix et la basse excrémentielles (dans le bon sens du terme) de
Les Claypool. Une chanson qui n'a rien de hardcore, mais la chanson s'inscrit quand même dans un ton crade.
Avec Pressman, on a cette fois dans nos oreilles une chanson très simple, moyennement aboutie, et très (trop) lancinante qui nous presse de passer à la chanson suivante, et ce malgré quelques soubresauts d’humeurs à la fin.
Si vous avez joui (chacun ses fantasmes) sur le titre
Pork Soda, vous aimerez surement Mr Krinkle, où ce coté crade et grossier revient, le tout sur un rythme de numéro de cirque (encore une fois dans le bon sens du terme).
The Air is getting
Slippery poursuit dans le style « foutage de gueule » primussien, avec la voix toujours aussi décadente de Claypool qui se cale sur un rythme assez amusant.
La palme du gore qu’on croyait atteinte avec
Pork Soda aurait pu aussi être décernée à Hamburger Train. Cet instrumental de huit minutes très prenant permet à chacun des trois gars de San Francisco de s’exprimer, à savoir Les toujours aussi excellent avec sa basse six cordes, avec des slaps puis des sonorités bucoliques voire extra-terrestres, Larry qui torture sa guitare dans tous les sens, et enfin un Tim Alexander « Herb’ » impeccable, qui nous trouve toujours des rythmes sympas sur sa collection de tomes, de cymbales, de cloches, de tam-tam, etc.
Indéniablement, le morceau le plus « primussien » à l’extrême restera celui-ci.
Puis c’est le retour dans le country-ambient. Avec un peu d’imagination, Pork Chop’s Little Ditty nous évoque vraiment quelque chose de crade. Dans l’esprit primussien, on pourrait songer à des poissons morts flottant sur les rives du Mississipi, ou bien à une boucherie infâme, avec des mouches à merde pondant leurs œufs sur une tête de porc avariée (comme dans le remake de massacre à la tronçonneuse).
La dernière chanson
Hail Santa est bof, mais qu’importe, le reste de l’album est vraiment plus que correct.
Bref, tout ce décalage, ce coté grand-guignolesque, cette grossièreté, c’est çà l’état d’esprit de
Primus, et c’est pour çà qu’on aime ce groupe. On les aime car ils se lâchent, osent, ne se prennent jamais au sérieux.
Comme quoi on peut faire grand avec du n’importe quoi, ce qui m’amène à dire que la musique de
Primus reste originale, et que des personnes de divers horizons musicaux sont susceptibles d’aimer ce disque, ainsi que
Primus en général.
"'cause im the most boring son of a bitch..."
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire