Paradise Lost

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17/20
Nom du groupe Cirith Ungol
Nom de l'album Paradise Lost
Type Album
Date de parution 23 Août 1991
Style MusicalHeavy Metal
Membres possèdant cet album80

Tracklist

Re-Issue in 2016 with 5 bonustracks.
1. Join the Legion 04:33
2. The Troll 03:50
3. Fire (The Crazy World of Arthur Brown Cover) 03:01
4. Heaven Help Us 06:24
5. Before the Lash 04:41
6. Go It Alone 04:23
7. Chaos Rising 08:42
8. Fallen Idols 06:45
9. Paradise Lost 06:13
Bonustracks (Re-Issue 2016)
10. Join the Legion (Alternative Mix)
11. The Troll (Alternative Mix)
12. Before the Lash (Alternative Mix)
13. Chaos Rising (Aternative Mix)
14. Paradise Lost (Alternative Mix)
Total playing time 48:32

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Cirith Ungol


Chronique @ AlonewithL

04 Décembre 2016

Le déséquilibre et l'infortune de "Paradise Lost".

Les lecteurs assidus des sagas d'Elric se souviennent probablement de cet épisode tragique, où à la tête de vaisseaux pirates il s'en prit à sa cité d'origine, Melniboné. Une conquête qui aboutira à l'annihilation d'une patrie orgueilleuse et autrefois conquérante dont les traces remontaient presque à la nuit des temps, à la chute d'une race qui entrevoyait déjà son déclin, à la perte d'une famille mal-aimante, à la perte de celle qui l'a aimé. Le héros Elric commit là l'un des actes les plus nihilistes de toute la littérature de l'héroic-fantasy, qui s'ensuit en plus de la trahison d'une partie de ses frères d'armes dans l'aventure. Pourquoi évoquer ce passage précis? Tout d'abord parce que la pochette du quatrième album de "Cirith Ungol" signée par Michael Whelan pourrait en faire allusion, bien que l'illustration ait servi à l'origine pour présenter la nouvelle "Le Navigateur sur les mers du destin" où il est question d'un Elric marin voguant vers d'autres périls. Mais, en ayant conscience de l'évolution de la formation américaine "Cirith Ungol", on pourrait en faire un parallèle entre la chute de Melniboné et la sortie du fameux "Paradise Lost", à la fois objet de vénération et de division. Et les deux phénomènes ont leurs causes.

Fâché par les techniques de managment de leur maison de disque sur l'album "One Foot in Hell", qui avait marqué un tournant vers un heavy metal plus conventionnel en 1986, "Cirith Ungol" va une nouvelle fois goûter aux plaisirs et aux affres procurés par les lois du business musical sur leur album suivant. Entre-temps, le groupe acte en 1988 la séparation avec son guitariste historique Jerry Fogle, bien décidé d'arrêter de jouer et sombrant dans la dépression et l'alcoolisme. Il décédera 10 ans plus tard d'une hépatite. C'est également cette année que le bassiste Michael Vujejia quitte la bande. Ils seront remplacés respectivement par Jimmy Barraza à la guitare et Vernon Green à la basse. Ces derniers participeront à l'enregistrement du quatrième opus de "Cirith Ungol", "Paradise Lost". Le label Restless Records ne va pas faciliter la tâche du groupe lors de la réalisation de ce forfait. Face aux difficultés que connait le heavy metal au tout début des années 90, il sera encore plus question de contrôler le travail des différents groupes. "Cirith Ungol" se voit du coup totalement privé de sa liberté de composition. Le ton monte régulièrement entre le batteur Robert Garven et le producteur Ron Goudie. D'autres musiciens viennent se greffer au groupe et imposent des compositions qui ne rentrent pas dans les codes de "Cirith Ungol". On comprend mieux ainsi le déséquilibre et l'infortune de "Paradise Lost".

Point d'infortune dans les prémices de l'objet. "Join the Legion" est à placer dans les titres phares de "Cirith Ungol". Palpitant et pétaradant même, produisant un heavy metal classique, mais bâti pour en faire un véritable hymne, plus excentrique qu'épique donc. Morceau qui incorpore un break lancinant et paresseux, dans les codes d'un heavy metal fin années 80 tout début années 90. On peut sentir là une forme de rapprochement physique avec la grande formation en vogue à l'époque, "Savatage". On reste dans la réussite pour "Chaos Rising", titre long et lent, méticuleux, ténébreux aussi, ouvrant d'ailleurs sur un bel arpège plein de solennité. Le rythme ne s'affole pas non plus sur "Fallen Idols". Titre qui gagne cependant en percutant et bien inscrit dans la tradition "Cirith Ungol" comme son précédent cité, avec une forte teneur épique et deux solos de guitare très stylés. Le titre éponyme aurait pu remporter la palme devant "Join the Legion" si le mixage n'avait pas été aussi faiblard. Le chant de Tim Baker est complètement étouffé. Il manque aussi cette spiritualité qui faisait la force des titres de "Cirith Ungol" dans ce qui ressemble ici à une cavalcade.

Le groupe va clairement manquer d'inspiration en ce qui concerne "Before the Lash". Un hard rock ténébreux, longuet, où on retrouve pourtant le vrai chant prédateur de Tim Baker, en mauvaise posture sur plusieurs morceaux de l'album. La reprise de "Fire" d'Arthur Brown illustre chez lui d'une baisse de puissance, et étonne aussi par le choix de la chanson en question. Mais le style proposé par la formation ne s'éloigne pas de sa propre tradition, même si la performance gravite entre le potable et l'ordinaire. ça n'a rien de proprement extraordinaire ou mémorable musicalement. "Go it Alone" par contre va laisser des traces. De vilaines traces. Le guitariste Greg Lindstrom, retiré à cette époque de "Cirith Ungol", l'estime d'ailleurs comme ce que le groupe a fait de pire dans sa carrière. Et pour cause, on se retrouve avec du heavy glam façon "Poison", avec tout ce que cela peut comporter de naïveté et d'excentricité. Imaginez des sombres guerriers en cotte de mailles s'affubler subitement de boas à plumes. Ce n'est pas mauvais du tout en soi, mais le choc est rude et le malaise est latent.

On peut ici vérifier l'absence de liberté de composition. "Cirith Ungol" cherche ostensiblement à se raccrocher à ce qui faisait sa force dans le passé, comme on l'observe bien sur les trois derniers morceaux de l'effort, mais les impératifs de vente liés au label ainsi que les directives de Ron Goudie le poussent malgré la résistance à produire ce qu'il n'avait jamais réalisé auparavant. La pression est telle que deux morceaux inclus dans le disque "Paradise Lost" n'ont pas été composés par des membres de la formation. C'est le cas de "Troll", signé et également interprété par le guitariste Joe Malatesta ; extrait au rythme par à coups, étrange et inhabituel pour "Cirith Ungol", en plus de son développement quelque peu confus. L'autre titre imposé est "Heaven Help Us" du bassiste Bob Warrenburg, illustrant un heavy tempéré, sans véritable relief, faisant ressortir une rythmique vite lassante et un ton beaucoup trop gentillet pour ce type de formation.

De cette aventure il en est resté un goût amer. "Paradise Lost" devait être le meilleur forfait de "Cirith Ungol", les membres s'étaient en tout cas préparés à la chose, il comportera en fait des morceaux comme le groupe n'en avait jamais fait de pire. Certains sont cependant à sauver, malgré la pression exercée à les faire coïncider avec le circuit mainstream. Les techniques de managment qui ont enchaîné "Cirith Ungol" n'ont pas réalisé pour autant leurs objectifs de vente. Ce fut un gâchis et une frustration à tous les étages. Une frustration telle que le groupe décidera un peu plus tard de tout raccrocher, définitivement dégoûté de la politique des labels à l'encontre des artistes. La réédition de "Paradise Lost" fera l'objet d'un long conflit avec Restless Records. Brian Slagel de Metal Blade avait contacté ce label en vue d'une réédition de cet album. Restless lui opposera une fin de non-recevoir, exigeant même de bénéficier de tous les droits y compris ceux des artistes sur cet opus. Ce que le groupe a logiquement refusé. Une réédition de l'oeuvre est apparue chez Noble Rot en 2008. Bien qu'elle était considérée comme pirate, les membres de "Cirith Ungol" lui octroieront un cachet d'officialité. C'est plus tard encore que l'on voit une réédition toute officielle cette fois chez Metal Blade, en 2016. Un an avant "Cirith Ungol" s'est reformé. Il est encore loin l'épisode où Stormbringer tuera Elric. Pourtant nous y avons tous cru.

13/20

6 Commentaires

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HorseFucker - 05 Décembre 2016: Bon, soyons direct, en toute franchise, le rideau est tiré, passons à table. Je dirais tout, sans l'aide d'un avocat, disant la vérité, parlant sans aléas et sans crainte.
Je ne suis pas fan de Cirith Ungol.

Vous l'aurez deviné : je considère bien Paradise Lost comme le meilleur album qu'ils,aient fait. De même, le statut de groupe culte est bien le seul qu'on pourrait lui discerner.
Sans avoir lu Le Cycle d'Elric (je m'y attellerai toutefois bientôt), la chronique est très bien et du côté du bon sens. En effet, des musiciens de session et un label de plus en plus envahissant, ça ne donne pas de grandes choses (au hasard : Metallica dans Some Kind of Monster).
Mais je pense quelque part, que Paradise Lost est une preuve de la capacité d'un artiste de pouvoir lui aussi juger ses propres œuvres, malgré les nombreux contre exemples.

En effet, en regardant le contexte (1991 : déjà que pour le Heavy ça va pas fort) et les notes de Baker, Barraza et Garven, le recul y est appréciable. Et raccord avec la musique. Outre la très bonne trilogie finale, célébrons "Join the Legion", la reprise d'Arthur Brown et réhabilitons "Got It Alone" où le soleil de la Californie reprend ses droits. "Heaven Help Us" et "Before the Lash" sont ceux que j'aime le moins car l'un rate le coche bien comme il faut et l'autre m'évoque déjà le passé.

Quant aux remixes présents sur la réédition de cette année, je dirais critique de normand. Des fois bien des fois pas bien. Ajoutons la prod déséquilibrée (aïe la batterie) pour donner l'album le plus étrange, le plus tiraillé. Mais un album que je préfère à tous ses prédécesseurs que j'ai toujours trouvés trop lourdingue et encore plus daté que leurs collègues (la toccata sur King of the Dead m'est insupportable). Et dont je n'ai jamais compris le qualitatif "épique".

AlonewithL - 05 Décembre 2016: Ah! King of the Dead, c'est celui qui défend pourtant le plus l'identité recherchée par Cirith Ungol. Paradise Lost est paradoxalement l'album le plus abordable de la discographie, pourtant celui qui comporte le plus de tares à mon sens. Mais suivant l'évolution du style (volontaire ou non), on se retrouve inconsciemment à s'approprier un album particulier sans trop en venir sur les détails propres à chacun.
Elevator - 06 Décembre 2016: Merci pour un excellent texte une fois encore. Je ne suis pas d'accord sur tout mais c'est un plaisir de te lire. Ok pour dire que cet album n'égale pas les meilleurs du groupe et que "Got It Alone" craint un peu, mais par contre j'adore "Heaven Help Us" certes atypique pour le groupe car très heavy metal mélodique conventionnel, mais j'aime les riffs et la mélodie, ça ne se commande pas ...
PhuckingPhiphi - 08 Mars 2024:

Détail rarement relevé et que peu de gens semblent connaître : la fameuse chanson « Go It Alone » est en réalité une reprise de Prophecy, précédent groupe du guitariste Jim Barraza, présente sur l’unique démo jamais produite par cette formation en 1987. Il a dû l’amener dans ses valises et la proposer lorsque le groupe s’est vu demander d’adopter un ton plus « radio friendly », ce qui explique sans doute pourquoi la patte Cirith Ungol en est si clairement absente.

Pour le reste, « Paradise Lost » reste un album agréable à mes modestes zoreilles, certes pas d’une inspiration ni d’une pureté comparables à celles d’un « King of the Dead », mais tout à fait honorable dès lors qu’on prend la peine d’en ignorer les petits faux-pas. Le triptyque final « Chaos Rising / Fallen Idols / Paradise Lost » est magistral.

Merci pour la kro ! :)

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