Les émotions et l’aura qui entoure un groupe sont toujours palpables. Partiellement irrationnel aussi. Certains artistes évoquent du respect. De la prestance. Du stoïcisme, de la rigueur, de la passion.
Klone, en France comme désormais à l’étranger, devient synonyme de classe et de finesse. Délaissant petit à petit les terrains acerbes d’un metal rugueux et abrasif, les poitevins effleurent aujourd’hui une musique aérienne, pleine de touché et empreint d’un certain onirisme qui ramène inéluctablement le groupe au répertoire de
Porcupine Tree,
Steven Wilson ou
Katatonia.
Après les fantastiques "Here Come the Sun" et "
Le Grand Voyage", parfaits succès critique, acclamés par les fans et ayant emmenés le combo aux quatre coins de l’Europe, en Australie et aux Etats-Unis (en support de
Pain of
Salvation ou
Devin Townsend), c’est un septième album (8 si l’on compte l’intermède "
Unplugged") qui arrive sous la forme de ce "
Meanwhile" à l’artwork tempétueux.
Pour parfaire cette nouvelle oeuvre,
Klone n’a rien changer à son équipe, que ce soit pour la production, le soutien de Kscope ou dans les musiciens puisque Morgan Berthet est toujours derrière les baguettes pour faire parler sa créativité, Enzo Alfino est désormais ancré à la basse et Matthieu Metzger, toujours dans le coin, se retrouve plus prégnant encore dans la forme de ces nouvelles compositions. Le tout sous la houlette de son indéfectible trio, porté par les doigts magiques de Guillaume Bernard et la voix enchanteresse de Yann Ligner. "
Within Reach" ouvre ainsi grand les portes de "
Meanwhile" …
A l’instar des groupes déjà nommés, ce qui frappe désormais, c’est l’identité et le son devenu si caractéristique avec le temps de
Klone. Dès le premier coup de caisse claire, le premier riff et le premier souffle de Yann, on reconnaît instantanément les poitevins. Cette aura atmosphérique, ce mélange de riffs rugueux emmenés par Aldrick Guadagnino (celui même qui remplaça au pied levé Christian Andreu chez
Gojira pendant leur dernière tournée américaine) et d’arpèges si aériens de Guillaume Bernard sont désormais une marque de fabriqué déposée, tout autant que ce chant enchanteur, poétique et aérien qui sait néanmoins se montrer bien plus aride comme le démontre ce premier titre, rappelant parfois aux bons souvenirs de "The
Dreamer’s Hideaway". Dès lors, une synthèse prend forme dans notre esprit : celui de la parfaite alliance de la rudesse des débuts avec l’expérience et la finesse stellaire des travaux récents.
Difficile de ne pas voir en "
Bystander", porté par un sublime clip, une forme d’aboutissement de la musique du groupe. La ligne mélodique est une merveille de poésie, le refrain est d’une beauté hypnotique, terriblement humaine et sensible, avec ce qu’il faut de complexité pour que musicalité rime toujours avec créativité. De cette première partie très légère et fluide où les arrangements de Metzger sont magiques, va découler un break saturé à la "Rocket
Smoke", propre à vous foudroyer dans votre béatitude. Les riffs deviennent écrasants et, l’espace de moins d’une minute, c’est la forme la plus lourde du quintette qui surgit, à l’image d’une nature, humaine ou animale, qui à tout moment peut montrer sa facette la plus sauvage sans pour autant renier son agilité.
Un aspect plus agressif que l’on retrouvera, majoritairement par intermittence, sur des morceaux comme "Disobedience" et son riffing hachuré, "The Unknown" et ses cassures rythmiques radicales (dont le refrain ramène beaucoup à "Here Come the Sun") ou encore "Elusive" qui parvient à marier des riffs massifs aux sonorités expérimentales de Matthieu pour permettre à Yann d’évoluer dans un univers moins confortable, moins lumineux pour en être le phare et le point d’accroche mélodique constant. Le rôle du chanteur est central depuis quelques albums et il prend une dimension toujours plus importante, faisant voguer l’auditeur au gré de son timbre pouvant se permettre toutes les facéties.
C’est d’ailleurs dans son profil le plus atmosphérique qu’il fera des merveilles, comme par exemple sur ce "Scarcity" plein de feeling, laissant beaucoup d’espace à la basse, et faisant d’un titre presque jazzy une sublime pièce de rock progressif. "Blink of an Eye" s’inscrit également dans cette sphère rock prog aux multiples sonorités presque retro, comme si un vieux Pink Floyd cherchait à ouvrir une faille vers le
Klone du "Grand Voyage". Mais la perle mélancolique du disque sera sans contexte le titre final éponyme, véritable merveille à fleur de peau et suspendue. Le break, orchestré par les pulsations rythmiques de Morgan, est d’une immense richesse sonore et aurait même mérité d’être allongé dans le temps, tout en annonçant, il faut espérer, de superbes frissons en live, particulièrement sur la montée en puissance finale et se riff qui se gargarise avec les secondes et devient de plus en plus massif.
"
Meanwhile" est-il une surprise ? Non. Est-ce qu’il est meilleur que les deux ou trois précédents opus de
Klone ?
Pas nécessairement mais il vient asseoir, s’il y en avait encore besoin, le talent, l’expérience et la musicalité de ces musiciens discrets dont on entend parler uniquement pour la musique. Sans parler de bilan, ce nouveau disque est une belle continuité, sans apport majeur, qui boucle probablement un cycle créatif qu’il sera bon de renouveler dans le temps pour ne pas s’enfermer dans une routine créative comme on pu le faire
Opeth ou
Katatonia à un moment de leur carrière. En attendant, "
Meanwhile" est un nouveau voyage aux confins des émotions et de la sensibilité …
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