Peu après l’enregistrement de
Scream Bloody Gore en Californie, Chuck Schuldiner prend le mal du pays, désireux de regagner sa Floride natale. Avant de partir, il propose le voyage à Chris Reifert qui, préférant rester sur ses terres, fonde dans la foulée
Autopsy aux côtés d’Eric Cutler. De retour à Tampa, Chuck débauche la quasi intégralité des membres de
Massacre, Rick
Rozz, Bill Andrews & Terry Butler, laissant alors
Kam Lee et son groupe sur la touche, pendant près de deux années.
Rompant avec son habitude de composer seul, le jeune leader signe alors cinq nouveaux titres avec Rick, ainsi que deux en solitaire, tandis que son acolyte apporte un tout dernier morceau. Fin prêt, le quatuor rejoint les Morrisound Studios en été 1988, sous la houlette de Dan Johnson assisté du jeune Scott Burns, pour les sessions de son second album.
Leprosy sort ainsi en novembre de la même année (en même temps que
Blood Leprosy Death de
Bathory), brillamment illustré par le maître Ed Repka, qui signe l’un de ses travaux les plus remarquables. En outre, le disque est impeccablement couvert par Combat Records, dont le passage sous la coupe de Relativity permet une distribution mondiale, notamment en Europe grâce au renouvellement précieux de l’association avec Under One Flag, division de Music for Nations.
Les moyens mis en oeuvre valent largement la chandelle,
Leprosy surpasse en effet son aîné en terme de lourdeur et de musicalité, affichant des titres désormais plus longs et plus travaillés. L’album subjugue dès le premier titre éponyme, servi par les rythmiques de Bill d’une lourdeur encore inédite, et par les lignes de basse fouillées de Chuck (en lieu et place de Terry), servant de véritable moteur à des rafales de riffs fracassants. Le guttural effroyable de Chuck, plus imposant qu’auparavant, ainsi que les duels de soli entre Chuck et Rizz, aux jeux très différents, épaississent alors considérablement les compositions et décuplent littéralement leur puissance.
Ainsi, depuis les riffs redoutables de Pull the Plug & Choke On It jusqu’aux tempi percutants de
Born Dead &
Forgotten Past, en passant par les soli somptueux de Left to
Die et les rythmiques tapageuses & écrasantes de l'impitoyable Open Casket,
Leprosy impressionne autant par sa brutalité pure et son côté gore, que par sa finesse et son étonnante variété. La production de Dan Johnson enfonce alors le clou, dotant l'ensemble d'une profondeur et une clarté incroyables pour l’époque, notamment grâce au son si imposant offert à la batterie. Rien ne vient décidément tenir ce joyau, à l'exception du plus linéaire
Primitive Ways (le seul morceau signé en intégralité par Rick
Rozz) et des coups de vibrato du guitariste sans commune mesure avec les leads articulées et intenses et Chuck Schuldiner, bien que le contraste entre leurs soli soit parallèlement une arme imparable.
Plus mature et plus massif que son prédécesseur, aux thèmes plus proches de la réalité (lèpre, euthanasie),
Leprosy rencontre un succès retentissant, apportant au deathmetal toutes ses lettres de noblesse en cette année 1988. Il confirme ainsi la force et l’avenir de ce style désormais incontournable, offrant une véritable alternative au thrashmetal Bay
Area maintes fois rabâché à cette époque. Grâce aux étonnants moyens déployés par son label, bénéficiant alors d’interview et de chroniques sur les grands magazines metal du moment, ainsi que d’une insertion remarquée sur la terrible compilation Speed Kills Vol.IV d’Under One Flag aux côtés d’
Exodus,
Nuclear Assault,
Possessed, Forbidden,
Dark Angel ou
Bathory, Death connaît dès lors une consécration planétaire, parfaitement justifiée.
Fabien.
Je suis en train de faire ma culture death metal (les origines du moins, je ne suis non plus étranger au genre) et tes chroniques sont toutes plus savoureuses les unes que les autres, avec tous ces détails qui permettent de resituer un contexte que je n'ai pu connaitre! Pour cet album je me souviens l'avoir écouté il y a quelque année sur Youtube d'une oreille distraite et je m'étais dis "mais c'est génial le death metal des débuts rien à voir avec la soupe actuelle!", sans pour autant approfondir plus que ça. Et là, alors que je viens d'écouter les premiers Amorphis, j'ai décidé de me replonger dedans et je ne peux que dire que cet album est une monstruosité à toute épreuve. Ce son est tellement monumental, il dégage une telle puissance et une telle violence qui n'ont pas pris une seule ride, c'est hallucinant. Rien n'est à jeter. A tel point que cet album va très certainement finir dans ma discographie plus tôt que prévu =)
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