Sous l’impulsion de
Mayhem,
Darkthrone,
Burzum,
Immortal,
Emperor ou
Satyricon, le blackmetal norvégien bat son plein en cette année
1994, lâchant tant de sorties de qualité et de nouveaux groupes que son vivier semble alors inépuisable. Cette année, c’est aussi l’arrivée de la marque « true norvegian blackmetal » inscrite au dos de l’inénarrable Transilvanian Hunger de
Darkthrone, label sous-entendant un code musical précis, une pureté black et une absence totale de concession, auxquels on peut aussi volontiers rattacher le terrible
Pentagram, le premier album de
Gorgoroth paru cette même année.
Fondé en
1994 autour de Vitcotnik et Aldrahn, respectivement batteur et guitariste/chanteur, Dødheimsgard s’affiche clairement dans cette mouvance intransigeante durant ses premières années, désireux selon les propres termes de ses interprètes de créer un blackmetal dans la plus parfaite tradition du style, sans recherche d’originalité mais avant tout guidé vers cette quête de la noirceur. Le duo s’entoure d’ailleurs de Fenriz en tant que bassiste, le fameux batteur de
Darkthrone, ayant certainement vécu ses années musicales les plus fermées, mais aussi les plus intenses, lors de la période d’Under a
Funeral Moon et Transilvanian Hunger.
Notre trio signe alors avec la petite écurie Malicious Records qui semble suivre de près ce style en Norvège, et qui ralliera rapidement sous sa bannière d’autres groupes comme
Zyklon-B,
Gorgoroth,
Borknagar,
Kampfar ou
Aura Noir, autant de formations gravitant souvent autour des mêmes protagonistes. Capturé en février 1995 et paru durant le second semestre, le premier album de Dødheimsgard baptisé
Kronet til Konge arbore ainsi une illustration minimaliste en noir & blanc, symbole de cette volonté d’épuration et d’absence d’esthétique, le tout avec une revendication relativement claire de ses racines, qui passe par un chant majoritairement norvégien.
Sombre, violent et parfois chaotique,
Kronet til Konge lâche effectivement un blackmetal sans concession, idéalement retranscrit sur ses morceaux A Skalte Gud et En
Krig A Seire en ouverture. Si la technicité et la recherche d’une production limpide ne sont bien sûr pas les moteurs premiers de Dødheimsgard, les compositions du trio sont bien moins simples qu’en apparence, chaque titre renfermant de nombreuses idées et un vrai travail de mise en place, tant et si bien que chaque écoute apporte des éléments nouveaux et relance l’intérêt de l’opus.
Au-delà de cette intégrité qui ne peut être prise en défaut,
Kronet til Konge tire également sa force dans son atmosphère sombre et dans l’intensité de ses riffs, à l’image du fabuleux titre Midnattskogens Sorte Kjerne montant idéalement au fil de son avancée, du tout aussi saisissant Kuldeblest Over Evig, ou encore de Når Vi Har Dolket Guds Hjerte où tant d’émotions se succèdent, chacun dominé par une rage de tout instant. Arme imparable, le chant charbonneux d’Aldrahn si singulier complète idéalement ce tableau noir dressé par Dødheimsgard.
Si
Kronet til Konge n’a pas la prétention d’être une œuvre originale, reprenant volontairement les principaux codes du blackmetal norvégien dans sa première définition, il n’en reste pas moins un album singulier, grâce au talent et à la personnalité de ses trois interprètes. Dødheimsgard façonne en cette année 1995 un album envoutant, à l’éclat toujours aussi noir les années passant, et si emblématique de cette époque où le blackmetal nordique, encore exempt des ravages du business, possédait encore une signification et semblait être un puits aux ressources intarissables.
Fabien.
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