From the Inside

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16/20
Nom du groupe Alice Cooper
Nom de l'album From the Inside
Type Album
Date de parution 17 Novembre 1978
Style MusicalHard Rock
Membres possèdant cet album172

Tracklist

1.
 From the Inside
 03:59
2.
 Wish I Were Born in Beverly Hills
 03:37
3.
 The Quiet Room
 03:57
4.
 Nurse Rozetta
 04:20
5.
 Millie and Billie
 04:16
6.
 Serious
 02:47
7.
 How You Gonna See Me Now
 03:52
8.
 For Veronica's Sake
 03:40
9.
 Jackknife Johnny
 03:46
10.
 Inmates (We're All Crazy)
 05:04

Durée totale : 39:18

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Alice Cooper


Chronique @ ZazPanzer

24 Avril 2012

Psychose...

Fermer les yeux. Faire semblant. Remettre au lendemain. Prendre la vie au jour le jour. On trouve des échappatoires pour ne pas y penser ; parce qu’on ne peut rien y faire. Mais dès qu’on s’arrête de vivre pour réfléchir quelques minutes, ça finit par nous rattraper et nous exploser à la gueule. Nos enfants vont grandir au sein d’un cauchemar écologique et économique, dans une société agonisante amputée de tous ses repères.

La politesse, le respect des aînés, des adultes et d’autrui, le respect du matériel et des biens - personnels et publics -, l’éducation, l’orthographe, la culture, la nécessité des règles dans une société, la valeur de l’argent… Ce qui était la norme dans la plupart des familles il y a une trentaine d’années semble être devenu accessoire, incompréhensible, ou peut-être même incompatible avec la génération iPod. Oui, de nos jours, ces idées d’un autre temps vous font au mieux passer pour un dangereux activiste de droite ultraconservateur.

Et ce qu’il faut bien appeler la déliquescence de la société se déroule dans l’indifférence générale de nos concitoyens, et surtout de la classe politique; c’est un état de fait qui paraît aujourd’hui accepté par tous et qui devrait pourtant nous rendre fous...

Fou, Alice Cooper le devient depuis quelques temps déjà en 1977. Ivrogne dépendant depuis plusieurs années, peut-être est-ce pour sauver son récent mariage (Mars 1976) avec la jolie Sheryl Goddard, 19 ans, une des danseuse du "Welcome to My Nightmare" show, qu'il accepte après le " King of The Silver Screen Tour" (1977-1978) de se faire interner dans un sanatorium newyorkais [ces établissements accueillent indifféremment à l'époque malades mentaux, tueurs en série ou alcooliques]. Alice ressort de cette expérience sobre mais traumatisé... Ça tombe bien, il a un nouvel album à écrire ! Il l'appellera "From the Inside" (1978), le titre faisant donc allusion à cet asile, mais également à la vie intérieure dans laquelle chaque patient finit par se réfugier à plus ou moins long terme.

Le vinyle d'époque, que je ne possède malheureusement pas encore, est un régal. Après la culotte de "School's Out", Alice nous offre cette fois une pochette à rabats. Maurice Escargot, le détective de "Lace and Whiskey" s'est effacé pour que nous retrouvions le visage remaquillé d'Alice. Celui-ci laisse la place à la salle commune de l'institution psychiatrique peuplée de dégénérés; puis, sur la back-cover, les porte de l'asile s'ouvrent sur la sortie des internés, notre crooner aliéné en tête, tenant à la main son bon de sortie "Released" - une photo superbe, honteusement absente de la réédition CD.

"From the Inside" est le dernier album '70s d'Alice. À cette époque, les provocations du Shock-Rocker n'effraient plus personne depuis longtemps. Musicalement, le Coop' a également été très loin, fusionnant des styles improbables, créant des délires musicaux complètement barrés, repoussant avec génie les limites d'un Rock alors loin d'être figé... Refaire caricaturalement deux fois le même disque n'étant pas envisageable, se posent alors deux questions : Quelle orientation musicale choisir cette fois, et comment renouveler un succès déclinant, "Lace and Whiskey" ayant moins bien marché que "Alice Goes To Hell" (disque d'or aux USA) ? Après, au choix, mûre réflexion ou cuite carabinée, Alice décide, pour la première fois de sa carrière, de faire appel à des songwriters en vogue...

Ayant beaucoup écouté Elton John enfant avant de découvrir les bienfaits de la guitare électrique, j'ai cru halluciner en voyant figurer le nom de Bernie Taupin au côté de celui d'Alice au dessus des portes blanches de la clinique ! Une première surprise, qui est loin d'être la dernière : exit Bob Ezrin pour la production, c'est David Foster (plus connu ensuite pour ses collaborations pop avec notamment Whitney Houston, Madonna, ou Michael Jackson) qui est engagé pour cet opus, sous la direction artistique du parolier et célèbre complice d'Elton... J'en vois déjà qui tremblent, ils ont raison, cet album ne plaira effectivement pas à tout le monde. Alice et le fidèle Dick Wagner, guitariste compositeur depuis "Welcome to My Nightmare" sont donc épaulés par la paire Taupin/Foster pour composer les dix pièces qui constituent cette œuvre, et, dernier rebondissement, Steve Lukather (Toto, dois-je le préciser, mais surtout "first call session man" à cette époque) cosigne "Nurse Rozetta" et "Serious".

Comme sur plusieurs albums d'Alice par la suite, on retrouve pléthore d'invités prestigieux pour accompagner le duo Dick Wagner / Steve Hunter, à commencer par Jim Keltner (John Lennon, Georges Harrison, Bob Dylan, JJ Cale, Pink Floyd, Eric Clapton) à la batterie. Bernie Taupin ayant peut-être eu peur d'affronter Cooper sobre, il a emmené avec lui ses copains du Elton John band : le guitariste Davey Johnstone, le bassiste Dee Murray et même la chanteuse Kiki Dee que vous connaissez tous (si, si... Le duo avec Elton sur "Don't Go Breaking My Heart" - 1976). Lukather est également venu accompagné de son bassiste attitré de l'époque, David Hungate, et du fabuleux Bobby Kimball, chanteur de Toto. Rajoutez à ce mélange improbable quelques interventions à la six-cordes de Rick Nielsen (Cheap Trick) et vous commencerez à vous faire une idée du joyeux bordel qu'on peut entendre sur "From the Inside".

Car les noms cités ci-dessus sont bien représentatifs de cet opus, un mélange fascinant entre du Elton et du Toto, qui sonne... Alice Cooper. La patte Bernie Taupin est particulièrement transparente sur les ballades : "How You Gonna See Me Now" aurait pu sans équivoque être écrite pour John, ainsi que les couplets de "The Quiet Room", le bridge du morceau étant plus typique du style Cooper. L'époque étant ce qu'elle était, on pourra déceler un fond de disco dans la rythmique du titre éponyme, ou en tous cas un groove, tout comme sur "Nurse Rozetta", qui n'est pas sans rappeler certains morceaux ("Girl Goodbye")du génialissime premier album de Toto, sorti cette même année. Quelques morceaux Rock plus classiques ("Wish I Were Born In Beverly Hills"/ "Serious"/ "For Veronica's Sake") durcissent légèrement le ton, mais c'est l'émotion qui marque cet onzième effort d'Alice.

J'aimerais à ce titre attirer l'attention sur "Millie And Billie", énième ballade du disque dans lequel beaucoup ne verront que de la soupe, peut-être à juste titre. Composé par Alice, Bernie Taupin et Bruce Roberts (également auteur de "Only My Heart Talkin'" sur "Trash"), ce duo d'Alice avec Marcella Detroit (choriste de Bob Seger puis d'Eric Clapton) me hérisse les poils à chaque écoute, malgré son côté cucul indéniable. Et c'est bien le tour de force de "From the Inside". Peut-être grâce à ses lyrics poignants, empreints de poésie, racontant sans ménagement un internement psychiatrique, émane de ce full-length une forme de Vérité indéfinissable, quelque chose de grand qui transforme des mièvreries pour midinettes en un voyage passionnant au plus profond d'Alice... ou de soi-même, pour ceux qui arriveront à passer outre quelques écoutes pas forcément faciles.

Faites vos bagages pour la clinique, n'oubliez pas la camisole... Alice explique sur le titre d'ouverture comment il en est arrivé là (en même temps on s'en serait douté) : "drinking whiskey in the morning light - at first we laughed about it -the old Road sure screwed me good this time"; puis s'ensuit une série de portraits réjouissants, inspirés de personnages réels rencontrés lors de son séjour au pays des dingos. Nous croisons ainsi une bourgeoise imbibée d'alcool façon Sue Ellen ("Wish I Were Born In Beverly Hills") un vétéran traumatisé par les horreurs de la Guerre ("Jacknife Johnny"), mais également l'infirmière sexy "Nurse Rozetta", fantasme des nuits de Vince, ou encore un couple de meurtriers psychopathes, Millie & Billie. Les autres morceaux dépeignent le quotidien de notre malade préféré, de la chambre d'isolement ("The Quiet Room" - sublime), au séances introspectives de "Serious" : " All of my life was a laugh and a joke, and a drink and a smoke, and then I passed out on the floor", en passant par une lettre émouvante adressée à sa femme, qui ne l'a encore jamais vu sobre, et dont il appréhende la réaction lors de son retour à la maison (regardez la vidéo de "How You Gonna See Me Now, humour noir et désespoir...). L'album se clôt comme il se doit par un morceau typique du Coop qui n'est pas sans rappeler "I love The Dead" dans sa forme, le génial "Inmates (We're All Crazy)", hymne à la folie, plaidoyer humoristique en faveur des cinglés. Dont on a parfois envie de faire partie, pour ne plus penser...

Oui, je vous l'assure, le retour à la réalité sera particulièrement difficile en ces temps d'élection où l'on essaie encore une fois de nous faire croire que tout va changer, que les politiques ont un réel pouvoir décisionnaire et qu'ils ne sont pas les pantins d'un système économique désormais autonome et incontrôlable, et pourtant voué à un échec inéluctable. Une fois ce constat fait, et le dégoût qu’il inspire passé, on a envie de fermer les yeux. De faire semblant. De remettre au lendemain. De prendre la vie au jour le jour. Mais, je l'espère de tout cœur, l’autruche relevera la tête. Peut-être parce qu’elle pense à ses enfants, innocents, à qui un jour on réclamera le recouvrement d’impayés laissés par plusieurs générations insouciantes, inconscientes, incapables ou malhonnêtes.

22 Commentaires

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lamiche - 26 Avril 2012: Belle chronique pleines anecdotes que je connaissais pour la plus part, mais qui a été mis en ligne avec brio.
Je possède ce vinyl depuis sa sortie et pourtant à l'époque il n'avait pas fait trop de bruit, à part peut-être chez les amoureux du Cooper.Et c'est vrai que c'est un excellent disque dans son ensemble avec une pléiade de personnel qui on fait leur chemin par la suite. Comme quoi, cette ivrogne d'Alice connaissait les talents de ces paires.
samolice - 28 Avril 2012: Merci Zaz. J'arrive un peu après la bataille mais je voulais prendre le temps d'écouter l'album avant de réagir.
C'est surprenant.
Je ne suis pas archi fan mais ce n'est pas désagréable non plus.

Le clip posté au bas de ta chro est génial. Quel second degré.

N'étant pas du tout un spécialiste de Cooper, j'ai parfois eu du mal à reconnaitre la voix d'Alice sur ce disque, moi qui ne connaît que ses albums des 80's.
choahardoc - 28 Avril 2012: Chapeau bas once again, Zaz! Encore un des très nombreux Alice à côté duquel je suis passé; ça donne envie.
Pour ce qui est du lien entre folie, désespérance politique et Alice Cooper, je le trouve pertinent tant le personnage invite assidûment à l'onirisme et ... à la rechute fatale.
"Celui qui rêve mais n'agit pas, cultive le cauchemar." William Blake
Arthron - 29 Avril 2012: Pareil que Choahardoc, un des nombreux albums du coop que je n'ai pas encore écouté.
Belle chro ;-)
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