SINISTER (NL)
THE SILENT HOWLING (Album)
2008, Massacre Records




BEERGRINDER : 16/20
Ces vétérans du Death Metal ont parcouru un long bout de chemin depuis leur premier et excellent méfait Cross the Styx (1992). Entre départs de musiciens, changements d’instruments de certains, aller et retour pour d’autres, ce n’est pas simple de s’y retrouver pour ceux qui découvrent le groupe, mais pour cela je vous invite à consulter les excellentes chroniques de Fabien des albums précédents.

Quoi qu’il en soit Afterburner (2006) avait constitué un retour en forme que l’ont attendait plus après une doublette Creative Killings / Savage or Grace peu inspiré. Et le quatuor a l’air de vouloir faire durer le plaisir et le prouve avec The Silent Howling (2008) sorti chez Massacre Records (le groupe semble avoir définitivement coupé les ponts avec leur label historique Nuclear Blast), on retrouve d’ailleurs avec plaisir sur la pochette les gargouilles, qui sont un peu la marque de fabrique du groupe, leur « Eddie » ou « Vic Rattlehead » à eux.

L’amateur reconnaîtra d’ailleurs assez aisément la patte et le son Sinister dès les premières notes de Republic Of The Grave, toutefois on note une certaine modernisation des hollandais, la structure de ce titre rappelant un peu les dernières productions de Behemoth, particulièrement dans les parties de blast de Edwin (Aad a bien fait de lâcher les baguettes pour le micro).

Le style Sinister est plus marqué sur le début de Summit Of Sacrifice, son départ canon et ses breaks abruptes, en revanche la deuxième partie du titre est beaucoup moins conventionnelle avec un solo d’inspiration Heavy Metal, et surtout un passage acoustique suivi d’une rythmique Death mélodique (pas typée Göteborg je vous rassure) qui surprend quelque peu.
Mais le Death brutal n’est jamais loin et on retombe en plein dedans avec Fortified Bravery dont le premier riff n’est pas sans rappeler celui très rapide de Bastard Saints, et quand Sinister calme le jeu sur des tempo plus lents et même une pointe de clavier en fond, c’est pour mieux nous achever sur une ultime accélération dévastatrice.

On précisera que les titres sont plutôt longs et naviguent allègrement autour des 6-7 minutes et plus. C’est notamment le cas sur le pavé The Silent Howling (10:15), proposant le meilleur de leur savoir-faire : riffs et soli accrocheurs, ambiance glauque lorgnant parfois vers le Black Metal, mid-tempos « brise-nuques », breaks avec arpèges, accélération crescendo, j’en passe et des meilleurs, on a même droit à une partie acoustique rappelant le meilleur de In Flames (époque Lunar Strain ou The Jester Race évidemment !).

Alternant riffs old-school et techniques avec des touches plus modernes et par moment mélodiques, Sinister prouve qu’il n’est pas un groupe figé dans le souvenir de la gloire passée que représentent Cross the Styx et Diabolical Summoning, il en a d’ailleurs gardé indéniablement l’essence, The Kill To Come alternant parties lourdes et blast-beats en est la preuve.
Le morceau le plus surprenant du CD est sans aucun doute Palace Of The Fates, distillant des sonorités très orientales avec un riff d’Alex très mille et une nuits, preuve supplémentaire s’il en est de la créativité d’Alex et ses acolytes.
Les bataves n’oublient pas de nous balancer un dernier titre bien rapide histoire que l’ont oublie pas que Sinister jouait du Death brutal alors que le guitariste de Children Of Bodom pissait encore au lit (ah ? c’est plus le cas).

Sinister revit une seconde jeunesse et a bien l’air de vouloir faire durer cette cure de jouvence, tant mieux pour nous. Les gardiens du temple tels Malevolent Creation, Immolation ou Morbid Angel et donc Sinister sont encore là pour montrer les dents et c’est tant mieux.
Décidément avec les sorties en 2008 des albums de Brain Drill, Krisiun, Origin, Prostitute Disfigurement, Deicide, Hate Eternal, The Monolith Deathcult et d’autres encore, la lutte pour l’attribution du titre d’album Death de l’année va être serrée (bien que pour ma part Origin soit loin devant), The Silent Howling peut se placer en outsider.
Vous m’en direz des nouvelles.

BG

2008-09-12 00:00:00


dark_omens : 16/20
Après les déconvenues incessantes égrenant un parcours chaotique, destin engendré par des turpitudes nées de ces trajectoires aléatoires aux musiciens variables, de ces bouleversements dus aux changements de label mais surtout créé de ces déceptions issues de deux albums moyennement attrayant, Creative Killings (2001) et Savage or Grace (2003), les hollandais de Sinister vinrent pourtant démentir cette douloureuse agonie pernicieuse qui, semblait-il, leur était promise. Pour échapper à cette fin tragique, ils reprirent le droit chemin de leur Death Metal traditionnel construit avec discernement, et sortirent, en 2006, un Afterburner délicieusement inopinée. Cette absolution inespérée devait absolument se traduire dans la continuité. Ainsi, poursuivant sur cette route d’une salutaire rédemption, The Silent Howling vint confirmer cette miraculeuse résurrection.

D’emblée ce qu’il convient obligatoirement d’évoquer, et ce afin de définir plus précisément la nature de la musique de Sinister, c’est cette volonté de prolongement incontestablement estampillé du sceau "old school" qui imprègne subtilement cet album. Pourtant si le son et le style des bataves, reste très caractéristique de ce travail qu’ils firent autrefois, se souciant peu des aspirations et des tendances actuelles, l’œuvre ici présentée revêt aussi un aspect très contemporain, et varié, qui lui évite de tomber dans le déplaisant écueil d’un art profondément désespérant, profondément similaire, profondément ennuyeux. Bien évidement, évoquer la modernité de ces hollandais n’est assurément pas anodin. Et s’ils parviennent à s’inscrire aussi redoutablement dans l’ère du temps, et ce malgré un passéisme conservateur évident, c’est incontestablement le résultat d’une créativité et d’une intelligence remarquable. En effet non content de composer un Death très intéressant, Sinister offre une formidable parure à sa musique. Pour se faire il orne son propos de certaines influences diverses. Et afin de le rendre plus nuancé encore, il embellit les atmosphères sombres de son œuvre, d’une obscurité malsaine supplémentaire incarné par ces voix "radiophonique" désuètes, donnant ainsi à son art un visage d’exception. Pourtant ici le postulat de départ est sincère. Point de mensonge. Point de références mélodiques saugrenues. Point de sacrifice à une musicalité absurde. Chaque note, chaque instrument, chaque intonation, chaque passage mélodique est indubitablement dédiée à un Death Metal, certes fondamentalement classique et de l'ancienne école, mais cependant terriblement attirant.

Ainsi certains titres de cet opus témoignent formidablement du caractère particulier de la musique de ces Néerlandais. Evoquons les excellents Republic of the Graves et The Silent Howling alternant, tous deux, plans dévastateurs à d’autres plus mélodiques aux guitares claires et aux voix narratives crépitantes, pour un climat des plus impurs, mais aussi un Summit of Sacrifice aux passages acoustiques délicieusement déconcertant, ou encore un splendide Palace of the Fates aux climats orientaux dépaysant.

Dans la démarche éminemment respectable d’une évolution, normale, de sa musique, sans, pour autant en trahir toutes les valeurs originelles, Sinister aura su, avec The Silent Howling, non seulement, formidablement confirmé toutes les espérances nés après un Afterburner prometteur, mais aussi admirablement transformer ces espoirs en convictions.

2014-05-04 14:43:16