Erei Cross

Erei Cross est le nouveau bébé d’Adrien Grousset (Carpenter Brut, Hacride), qui continue d’explorer un metal plus ouvert, rock ou électronique, évoquant sorcières occultes et thèmes féministes plus modernes. A la sortie de son premier opus full-lenght “The Widow and the Others”, j’ai pris un petit moment pour discuter avec lui en marge de l’exceptionnel concert qu’il aura donné avec Carpenter Brut en fermeture de la journée du Samedi au Hellfest ! 

[Par Eternalis]
 

Comment vas-tu Adrien ?

Super ! Chaudement (rires). On est arrivé ce matin, on jouait à Lille hier soir avec Carpenter donc on a fait la route derrière et nous sommes là depuis 8/9h environ !

 

Nous allons parler de Erei Cross ! Il y a eu pas mal de temps entre la sortie du premier ep et de l’album qui contient en fait l’intégralité du premier ep et le second qui forme un disque complet. Ca ne devait pas être si long à la base ? 

C’était prévu qu’il y ait un moment mais ça a été repoussé plusieurs fois c’est vrai. Ce sont les conséquences du Covid avec un énorme embouteillage de sorties d’albums, de concerts, de dates et ça a été un vrai bazar. On en a payé les conséquences de ce côté-là. Disons qu’il aurait dû sortir il y a six mois mais ce n’est pas très grave. 

 

Est-ce que l’activité avec Carpenter Brut, très présente sur scène, a jouée dans le report ? 

Pas vraiment. La sortie d’un album est toujours très différente et tu peux t’en occuper pendant que tu es en tournée, surtout que je ne suis pas le leader du groupe. Donc je peux me dégager du temps dans la journée, contacter les différentes parties du processus … mais c’est vrai que Carpenter prend beaucoup de temps. 

 

"En termes de composition, c’est bien de se mettre un peu en danger, de changer ses habitudes."

 

C’est vrai que Carpenter joue beaucoup, partout, dans le monde entier et semble ne jamais vraiment s’arrêter. Où et comment as-tu trouver le temps de te poser pour finaliser tes idées sur “The Widow and the Others” et travailler avec Laetitia notamment ? 

Pas forcément car Laetitia est très présente et aide beaucoup quand je ne suis pas là. On a une agent de presse, Pat [ndlr : de Klonosphere] qui s’occupe très bien de nous et on a cette opportunité quand tu es musicien de pouvoir te poser, parfois pendant plusieurs semaines, pour bosser et travailler dur et vite sur tes projets. C’est un luxe et ça permet de faire avancer les choses d’un coup. 

 

Les titres du deuxième ep étaient déjà écrits à la sortie du premier si je me souviens bien. Est-ce que tu les as modifiés avec le temps ? Est-ce qu’ils ont évolué ? 

Déjà, on les a enregistrés (rires). 

On a eu le temps de bien les peaufiner, les travailler et de se poser sur les détails. Comme tu dis, les titres étaient composés, j’avais déjà des démos donc la base était là. Dans ce sens, le second ep est peut-être plus léché, plus travaillé du côté du son, des arrangements et des sonorités car nous avons pris ce temps là. Sur le premier ep, il y avait une certaine urgence, une envie de proposer les titres assez vite. 

 

Je trouve justement qu’ils sont plus arrangés. Il y a probablement moins de riffs, mais beaucoup plus d’ambiances. Je pense particulièrement au titre “The Others” dont Leatitia avait évoqué à demi-mots certaines influences et quand je l’ai entendu pour la première fois, je me suis dis “C’est Lui !” avec cette ambiance schizophrénique et toutes ces voix qui résonnent …

C’est vraiment LE morceau phare comme tu dis. Comment on a bossé ça ? C’est difficile à dire. On échange sur plein de choses avec elle, que ce soit sur des films, des séries, des bandes sons, des groupes … Pour ce titre spécialement, l’idée vient d’un jeu vidéo [ndlr : Senua’s Sacrifice] que elle a fait et que j’ai mélangé, dans mon esprit, avec une ambiance à la Dune de Dennis Villeneuve. J’ai ensuite voulu donner une aura encore plus schizophrénique, cette injonction culturelle concernant les femmes que l’on retrouve dans les textes mais sans que ce soit mentionné …

En fait, quand les morceaux sont déjà écrits, tu as le temps de travailler tout ça, toute cette ambiance, tout ce qu’il y a autour. Et je trouve que c’est même le plus fun à faire. 


 

Est-ce que pour toi, c’est rafraîchissant de lâcher un peu la guitare et de plutôt te focaliser sur les claviers et les arrangements ? 

Carrément ! Je le faisais déjà pas mal avec Hacride mais le groupe était beaucoup plus centré sur la guitare, et surtout beaucoup plus technique. Si tu prends un morceau comme “The Others”, il y a un seul riff. Tu utilises la guitare uniquement quand c’est percutant, c’est un outil et ce n’est pas du tout la base de la composition. Il arrive uniquement à la fin et il est là pour te défoncer la gueule (rires). 

En termes de composition, c’est bien de se mettre un peu en danger, de changer ses habitudes. 

 

Des concerts sont-ils prévus ? 

C’est en train de s’organiser. Il n’y a encore rien d’officiel mais c’est en train de se mettre tranquillement en place. 

 

 

Est-ce que tu considères que Erei Cross pourrait devenir ton projet principal, au moins en tant que compositeur ? 

Je n’en sais rien en fait, je ne me mets pas trop de barrière de ce côté là. C’est l’une de mes priorités de projets on va dire. Tout le monde sait que Carpenter Brut tourne beaucoup et qu’il prend beaucoup de place mais c’est en place, c’est calé et il s’agit surtout de maintenir le groupe à ce niveau. 

Pour Erei Cross, nous sommes plus jeunes donc ça demande du travail, de l’attention pour faire émerger un nom aujourd’hui. Pourtant, je ne me refuse rien. De créer autre chose, de composer pour encore un autre projet. 

 

Peut-être un retour à Hacride, comme nous avions déjà parlé …

Hum … (sourires) … ce n’est pas aujourd’hui d’actualité mais comme je dis, je ne refuse rien. Et je sais qu’un jour, ça reviendra, c’est évident. Nous n’avons pas tout dit. 

 

Carpenter Brut reste le projet de Franck, qui compose et définit la thématique conceptuelle des albums. Est-ce que, hormis le live, vous avez un rôle en studio ? Des suggestions ? 

Tout dépend de l’album. C’est LE projet de Franck c’est évident. 

Sur “Leather Teeth” par exemple, j’ai été beaucoup plus engagé. J’ai joué toutes les parties de guitares, j’ai même composé un morceau. Alors que sur “Leather Terror”, je n’ai absolument rien fait ! C’était l’idée d’avoir des synthés absolument partout. 

 

[concernant Carpenter Brut] "On arrive, c’est lourd et on casse des dents donc ça peut surprendre ceux qui ne s'attendaient pas à ça. On ne fait pas de la pop. On est les plus violents sur ces affiches, c’est une évidence et en live, on est TRÈS violent (rires)." 

 

Alors qu’il est beaucoup plus metal !

Justement ! C’était son trip de dire “Comme l’album est beaucoup plus metal, on va supprimer toutes les guitares” (rires). Ce qui peut ressembler à des grattes ne sont que des couches de claviers, ce qui donne justement ce côté très épais à l’album. Il y a un morceau death metal et pourtant, il n’y a ni batterie ni guitare en studio. Mais c’est retravaillé pour le live et pour devenir plus agressif sur scène. 

 

C’est vraiment ce que j’adore chez Carpenter Brut. Ce n’est pas du metal, mais le public est majoritairement metalleux, ce qui fait qu’il n’est ni choquant de vous voir au Hellfest, ni surprenant de vous savoir dans des festivals plus Mainstream. Est-ce que vous sentez une différence de ressenti face à ces différents publics ? 

Au niveau de l’accueil, je dois t’avouer que depuis le dernier album, lorsqu’on joue dans un festival généraliste, on vide un peu la fosse (rires). On jouait avant Orelsan la dernière fois et ça c’est un peu vidé devant nous !

Mais c’est normal. On arrive, c’est lourd et on casse des dents donc ça peut surprendre ceux qui ne s'attendaient pas à ça. On ne fait pas de la pop. On est les plus violents sur ces affiches, c’est une évidence et en live, on est TRÈS violent (rires). 

 

Le fait de jouer en clôture ce soir, après Iron Maiden et Within Temptation, sur une Mainstage et pas une tente, ça vous fait quoi ? 

Déjà, c’est un putain d’honneur ! Tu imagines, après Maiden ! 

Je te dirais après le show, je ne sais pas trop quoi en dire encore … en plus le samedi. On risque d’avoir un peu de monde (rires) On va voir si on est un groupe de Mainstage … [ndlr : réponse : l’un des shows du week end !]

 

 

Revenons à Erei Cross. Au niveau des textes, tu avais déjà évoqué l’aspect engagé du groupe mais que tu te refusais de faire de la récupération politique sur des thèmes féministes par exemple. Comment comptes-tu faire évoluer conceptuellement le groupe ? L’imagerie ? Le voile de Laetitia ? 

Totalement, il est hors de question de politiser le groupe. 

Pour le personnage de Laeti, nous avons créer cette image de la veuve, voilée, fantomatique et nous irons plus loin. Je ne parlerais pas pour elle concernant les textes mais nous resterons sur cette idée de sorcellerie, de sorcière “moderne” et de tout l’ésotérisme qu’il peut y avoir autour. Le côté un peu glauque mais engagé restera également. On veut continuer à être subversif, à conserver une image allant dans ce sens, comme balancer des parties génitales féminines dans le logo. C’est quelque chose qu’on a envie de faire perdurer. Voilà ce que je peux t’en dire !

 

Ces idées sont-elles communes ou viennent-elles plus majoritairement d’elle ? 

C’est vraiment commun ! J’ai toujours eu un engagement, pas politique je le répète, féministe. Je trouve ça extrêmement important au quotidien. 

Forcément, Leati me suivait en ce sens et on se connait depuis toujours, bien avant la création du groupe. Donc une fois que nous avions convenu de ce champ lexical commun, du nom du groupe. On se connait tellement bien, ce sont des choses qui se sont à peine dites entre nous. C’était simplement évident. 

 

Vous aimez jouer avec les mots. Je pense à Erei Cross qui est un acronyme de Sorcières. Également au morceau “Ainmosni” qui est “Insomnia” à l’envers … rien n’est laissé au hasard …

C’est le côté un peu “occulte” qui nous “oblige” à être un peu comme ça, à jouer avec le public. Comme tu dis, ce qui est sympa, c’est qu’on peut le voir, ou pas, ou s’en rendre compte plus tard et ainsi susciter la surprise “Je ne l’avais pas vu mais ça m’a surpris !”. 

 

J’ai d’ailleurs cherché s’il n’y avait pas d’autres morceaux avec les lettres à l’envers !

(rires)

On joue aussi avec des samples renversés, des sonorités qu’on inverse pour donner un côté sombre à la musique. On s’inspire de certains films aussi, d’ambiances ou de sons qu’on peut retrouver ailleurs. On aime poser des … comment ça s’appelle dans les jeux vidéos d’ailleurs, des happy …. [ndlr : des Easter Eggs] Oui c’est ça ! On s’amuse beaucoup avec ça. Tout le monde ne le verra pas, mais ça renforce la satisfaction de s’en rendre compte !

 

L’avenir ? 

Pour le moment rien du tout ! Je me concentre sur Carpenter, on a eu beaucoup de concerts et on a des tonnes de festivals cet été. Je laisse passer toute cette période et je pense qu’en septembre, je m’y remettrai. Et pour de la composition, et pour justement ce live qui devrait arriver. On est prêt, on a répété, on sera trois et tout est calé ! Il n’y a plus qu’à !

 

Est-ce que tu veux dire une dernière chose ? 

Vous pouvez regarder une série de vidéos que l’on a posté sur Youtube, en live, pour apercevoir ce que donneront les futurs concerts. Ce sont des live sessions en plus des clips ! Profitez-en et merci pour le soutien !

interview réalisée par Eternalis

0 Commentaire

0 J'aime

Partager
    Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire

En voir plus