Baroness est un groupe comme il en existe peu.
Depuis leur premier album "
Red Album",
Sludge Progressif brûlant bien que mélodique, en passant par le très planant "
Blue Record" aux sonorités souvent moins agressives, ou la mélodie prend une part plus importante et moins progressive, les gaillards de Géorgie n'aiment pas se reposer sur leurs acquis. Et c'est donc sans surprise qu'ils nous proposent ici une couleur musicale radicalement différente de celles développées par le passé.
Sauf que non.
Comme si la fameuse épreuve du troisième album n'était pas déjà en soi un défi suffisant (le premier pour la découverte, le
Second pour la révélation, le troisième pour la confirmation),
Baroness propose un album à deux teintes, jaune et vert, un double album de 18 pistes. Un projet extrêmement ambitieux donc et un pari très osé.
Pour commencer de manière correcte cette chronique, il est essentiel de revenir à cette volonté de fournir une œuvre complète chez
Baroness. Ainsi les couvertures sont le fait du chanteur John Baizley, et chacune est à la couleur annoncée par l'album. Mais plus encore la musique elle-même même colle aux titres, et donc aux atworks. Le
Red Album, chaud et furieux, le
Blue Record océanique et ses tempêtes mélodiques entrecoupées de grands calmes. Le concept est plaisant, novateur, et surtout jusqu'ici très réussi.
Ainsi donc, le double album désire dévoiler deux ambiances différentes : l’électrique et piquant Yellow, le calme et contemplatif Green. Différentes et pourtant assez proches, comme le sont le vert et le jaune, cherchant donc à réaliser l'exercice difficile qui consiste à concilier rupture et cohérence, un véritable travail d'alchimiste.
Venons en maintenant à la musique en elle-même même. Il est difficile de résumer 18 pistes mais pour faire bref "Yellow" commence très fort, dans une dynamique sludge racée mais pour autant très mélodique avec des breaks faisant mouche à chaque fois. Néanmoins, au fur et à mesure que la première galette avance, on se rend compte que certaines chansons sont dispensables et font perdre de l'intensité à l'ensemble (le piège du double album privilégiant parfois quantité à qualité). On remarque aussi une véritable volonté de couper court avec les codes du
Sludge et plus généralement du
Metal. Moins de cris, plus d'arpèges, moins de saturation, il y a du
Sludge certes mais moins (et de moins en moins tout au long de l'album), du
Stoner mais aussi des influences Rock Pop et Folk. C'est intéressant, parfois léger d'un point de vue technique - les lacunes évidentes d'un groupe qui s'aventure en dehors de son domaine de prédilection - mais souvent très inspiré. Le rythme se calme petit à petit et on passe naturellement à la partie "Green". La qualité principale de cette partie est effectivement son côté très naturel, doux et calme, souvent beau. Mais néanmoins elle manque souvent de relief et peu de titres se démarquent de cette deuxième partie.
Le véritable coup d'éclat de ce Yellow and Green repose selon moi dans sa recherche sonore : ahurissante. Chaque chanson apporte un nouvel effet, un nouveau dosage, une nouvelle variation et l'ensemble reste malgré tout assez cohérent. Les instruments s'accordent à merveille, mêlant fuzz, octaver, tremolo, son clair, différents degrés de saturation et tant d'autres. Une richesse véritable qui me laisse sans voix, et probablement un travail de titan.
En parlant de voix, celle-ci est malheureusement souvent très monocorde et constitue à mon sens un des points faibles de l'album.
Alors que dire de ce très imposant Yellow and Green? Il s'agit là d'une œuvre résolument complexe et audacieuse. Je ressors de mes multiples écoutes avec un sentiment étrange mêlant joie et déception. Car
Baroness a créé quelque chose d'absolument unique et audacieux, mélangeants styles et sonorités opposées pour un rendu final réellement surprenant mais jamais raté. Et quel son !
Néanmoins l'album possède une quantité de défauts évidents : certains titres n'apportent rien et semblent être là majoritairement pour combler, les arpèges sont souvent répétitifs, de même que les lignes vocales.
Pardonnez-moi la très mauvaise métaphore, mais cet album est à la cuisine ce que serait un plat absolument délicieux et inédit, mais recouvert d'une sauce moyenne. On aurait aimé que la substance brute soit extraite de manière plus claire, quitte à avoir moins de chansons, moins d'enrobages.
Mais qu'est ce que c'est prometteur !
Baroness s'aventure sur des terres inconnues : de fait leur maîtrise technique est loin d'être encore parfaite, mais ils nous laissent entrevoir des paysages et couleurs musicales que je n'imaginais pas jusque là. Et dans une industrie où parfois tout semble déjà avoir été fait, cela relève du petit exploit.
Un 15/20 donc, loin d'être pleinement satisfait, mais plein d'un espoir véritablement inattendu pour la suite.
Un peu trop de remplissage pour ce double album , un condensé des meilleurs titres sur un seul et ce disque aurai été une veritable tuerie, en tout cas vu l'evolution du groupe, ça promet pour la suite !
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