Liste des groupes Metal Symphonique Eleine We Shall Remain

De l'eau aura coulé sous les ponts pour le quartet suédois depuis sa création il y a 9 ans maintenant... Déjà à la tête de 3 albums full length – l'éclectique et charismatique « Eleine » en 2015, suivi de l'enjoué « Until the End » en 2018, auquel succéda le pénétrant « Dancing in Hell » en 2020 –, de 2 EP (« All Shall Burn » en 2019  et « Acoustic in Hell » en 2022) et d'une multitude de singles, le collectif n'allait pas s'arrêter en si bon chemin. Plus encore, le temps semble venu pour le prolifique combo scandinave de tenter de porter l'estocade. Aussi revient-il dans les rangs, trois ans plus tard, doté d'un quatrième opus de longue durée, répondant au nom de « We Shall Remain » ; une rondelle signée chez le puissant label allemand Atomic Fire Records, une première pour nos acolytes ! Ce set de 10 compositions inédites permettra-t-il, cette fois, à l'inspirée formation nord-européenne de la muer en valeur de référence du si concurrentiel espace metal symphonique à chant féminin ?

A l'instar de son prédécesseur, ce quatrième mouvement a été coproduit par la chanteuse au sensuel grain de voix, MadEleine 'Eleine' Liljestam, et par le guitariste/vocaliste Rikard Ekberg – les deux maîtres d'oeuvre du projet –, et mixé, mastérisé et enregistré à The Panic Room par le pluri-instrumentiste Thomas "Plec" Johansson (Torchbearer, Unmoored, ex-Mean Streak...), surtout connu pour avoir contribué à la valorisation d'albums de Divinefire, Lyriel, Narnia, Opeth, Scar Symmetry, Soilwork. entre autres. Aussi les 37 minutes de ce méfait jouissent-elles de finitions passées au crible et d'une belle profondeur de champ acoustique. Par ailleurs, l'artwork de la cover bénéficie, là encore, de l'experte patte graphique d'inspiration fantastique de Néstor Ávalos, bassiste (Proditor Bicorni, ex-Tragico Ballet) et prolifique signature graphique mexicaine (Moonspell, Nervochaos, Mercyless, Mefisto...). Indices révélateurs d'une traversée des plus sécurisantes dans ce vaste champ de turbulences...

Cela étant, nos deux têtes pensantes et leurs compères – Jesper Sunnhagen (Chine, Lord Of Light...), à la batterie, et Filip Stålberg, en remplacement d' Anton Helgesson, à la basse –, nous octroient un propos metal mélodico-symphonique gothique, tout aussi percutant et racé que son devancier. Ce faisant, les influences de Lacuna Coil, The Murder Of My Sweet, Xandria, Delain, Tristania, Evanescence se font, là encore, tour à tour sentir. Jouissant d'une technicité instrumentale et vocale difficile à prendre en défaut, ce rayonnant, pulsionnel et troublant manifeste fait également montre de la féconde inspiration mélodique de ses auteurs ; des qualités qui ont déjà permis à son illustre aîné de se démarquer de ses devanciers. Est-ce à dire qu'un bis repetita à l'exclusion de toute autre alternative qui, précisément, singulariserait cet effort de son prédécesseur, serait au bout du chemin ? Mais laissons-nous guider par nos compères dans cette nouvelle aventure...

Le combo suédois interpelle, tout d'abord, par cette rare aisance à nous aspirer dans la tourmente sans avoir à forcer le trait, à commencer par ses passages les plus magmatiques. Ainsi, à mi-chemin entre Lacuna Coil et Xandria, les deux up tempi power mélodico-symphonique « Never Forget » et « We Shall Remain » n'ont de cesse de nous asséner leurs virulents coups de boutoir et leur martelant tapping tout en sauvegardant une grisante sente mélodique, sur laquelle se greffent les claires inflexions de la sirène. Et, dans un cas comme dans l'autre, la magie opère sans tarder. Dans une même énergie, on ne saurait davantage éluder l'''evanescent'' mid/up tempo « Suffering », aussi bien pour ses couplets finement ciselés, relayés chacun d'un grisant refrain, que pour ses insoupçonnées accélérations. Mais le magicien aurait encore quelques tours dans sa manche, et des meilleurs...

Lorsque le ciel tend à s'obscurcir, le collectif trouve à nouveau les clés pour nous assigner à résidence. Ce que prouve, d'une part, le ''tristanien'' « We Are Legion », mid/up tempo symphonique aux relents dark gothique, eu égard à ses sémillants arpèges d'accords, à la soudaineté des montées en régime de son corps orchestral et à ses grisantes joutes oratoires, les angéliques volutes de la belle faisant front aux growls caverneux de son comparse ; un ''tubesque'' effort à l'indéfectible énergie et recelant un refrain catchy, que l'on ne quittera qu'à regret. Dans cette veine, si la fibre dark/death gothique investit également « War das Alles », par effet de contraste, cet énigmatique effort n'en recèle pas moins de rayonnants refrains. On regrettera cependant la brutale et précoce chute de fin du chavirant élan.

Quand la cadence se fait un tantinet plus mesurée, la troupe parvient, là encore, à nous retenir, un peu malgré nous. Ce qu'attestent, en premier lieu, les ''delainiens'' et un brin orientalisants mid tempi « Stand by the Flame » et « Promise of Apocalypse », tant au regard de leurs riffs en tirs en rafale adossés à une vrombissante rythmique que de leurs refrains immersifs à souhait, mis en exergue par les poignantes impulsions de la déesse. Dans la lignée atmosphérique du précédent album, « Blood in Their Eyes » se pose, lui, tel un ''xandrien'' mid tempo syncopé aux riffs saccadés, recelant, à son tour, un refrain que l'on entonnerait à tue-tête. Succédant au fin legato à la lead guitare dispensé sur l'interlude « Vemod », l'''evanescent'' mid tempo « Through the Mist », pour sa part, distille d'enivrants harmoniques aux orientalisants relents, mis en habits de lumière par les félines oscillations de la déesse.

Au terme d'un voyage le plus souvent mouvementé, on ressort conquis tant par la maestria technique affichée que par la féconde inspiration mélodique du combo suédois. Si pas l'ombre d'un bémol harmonique ne vient ternir la surface de la galette, d'aucuns auraient sans doute espéré un propos plus diversifié sur les plans rythmique et vocal, et des exercices de style plus variés qu'ils n'apparaissent, ballades et fresques manquant ici à l'appel. Jouissant néanmoins d'une ingénierie du son difficile à prendre en défaut, d'arrangements de bon aloi et de schèmes d'accords d'une redoutable efficacité, cette offrande serait loin d'être dépourvue d'atouts pour permettre au collectif nord-européen d'opposer une farouche résistance face à ses nombreux concurrents. Sans dépasser le brio compositionnel de son prédécesseur, ce nouvel opus aurait toutefois les armes requises pour permettre à la troupe d'asseoir plus encore sa position parmi les valeurs confirmées de ce registre metal. Ainsi, à l'instar de ce quatrième élan, le collectif suédois enfonce encore un peu plus le clou...

Note : 15,5/20