A peine plus d'un an après le très controversé Death and
Legacy, cinq ans après le très apprécié
Fallen Sanctuary, six ans après le très surprenant
Words Untold and Dreams Unlived, et de nombreuses années après les démos révélatrices du talent, les Tyroliens de
Serenity, groupe de power symphonique à la popularité grandissante, remettent le couvert avec ce
War of Ages. Visuellement, il faut avouer qu'on ne savait pas trop à quoi s'attendre. Regarder longuement la pochette devient même gênant, devant cet homme (?) barricadé derrière ce masque … Qu'a-t-il à cacher ? Au contraire, ces yeux affichent une certaine bienveillance …
Seul le titre pouvait nous donner un indice, encore fallait-il bien l'interpréter.
Serenity se serait-il engagé dans le power guerrier ? Personne ne pouvait répondre bien évidemment (sauf ceux qui avaient pu l'écouter en avant-première) ; et nous avons été contraints à l'attente.
Seulement, maintenant que je tiens l'album dans mes mains, je ne sais toujours quoi penser de cet artwork. Je m'occuperai de cette question plus tard, afin de mieux pouvoir m'intéresser à la musique que nous offre aujourd'hui
Serenity. Premier constat : pas de petite intro comme sur Death and
Legacy au vu de la tracklist, à moins que … Et oui ! L'intro est bien présente, mais elle fait partie du premier titre,
Wings of Madness.
Des chœurs angéliques, quelques notes de guitare dispersées, et puis c'est l'explosion. La guitare, la basse, ainsi que la batterie semblent avoir monté une coalition pour mieux vous bousiller vos délicats tympans. Puis arrivent les claviers, tout en douceur, afin de mieux dompter cette mer déchaînée de symphonie. C'est là qu'entre en scène le sieur Neuhauser, usant de son organe vocal avec chaleur et passion. Ses lignes de chant sont magnifiques, elles sont parfaitement adaptées à cette folie orchestrale, il nous délivre un refrain très aérien, accompagné par sa comparse, mademoiselle Delauney, qui prend en charge le couplet suivant et s'en sort avec brio. C'est ensuite au tour d'un certain Buchberger, officiant à la six cordes, qui nous lâche un solo bien senti, dans la lignée des ses plus prestigieux (Oceans of Ruby). Le tout est bien sûr continuellement accompagné de très belles orchestrations, dirigées par notre cher
Oliver Philips, qui œuvra d'ailleurs sur le précédent opus du groupe.
C'est donc sur un bon pressentiment que je continue l'écoute du millésime 2013 de
Serenity. Ce pressentiment est ensuite confirmé au fur et à mesure que ce son, à la fois puissant et savamment distillé, entre dans mes oreilles. Justement, que dire de ce son ? Et bien, il est bon. Oui monsieur, c'est du bon. C'est un son moderne, qui correspond à ce que font
Kamelot ou
Luca Turilli actuellement (bien qu'il penche plus vers le
Kamelot).
Georg Neuhauser, comme à son habitude, survole les débats, avec son timbre de voix si particulier et si chaleureux. Il excelle sur chacun des titres de l'album, que ce soit sur des morceaux puissants, comme
Legacy of Tudors, ou sur des titres plus doux et calmes, comme sur For
Freedom's Sake ou sur la reprise piano du magnifique Fairytales, en bonus. Il se place directement en compagnie de Tommy Karevik et peut-être Alessandro Conti, parmi les meilleurs vocalistes du moment.
Allons maintenant du côté de notre Française préférée, Clémentine Delauney. Là aussi, c'est du haut niveau, l'ex-chanteuse de
Whyzdom dévoile un grand talent, s'adaptant aux divers types de chansons du groupe, parfaitement à l'aise sur les morceaux typés power mélodique, que sur les morceaux s'approchant du metal symphonique à chanteuse. On remarque même certaines intonations pop sur For
Freedom's Sake. Le seul problème avec elle, c'est que bien qu'elle fasse désormais partie intégrante du combo tyrolien, on a l'impression qu'elle reste chanteuse secondaire. Les Autrichiens ne lui ont pas laissé une chanson à elle seule, peut-être pour ne pas être qualifié de groupe de metal à chanteuse, alors qu'on trouve des morceaux sur lesquels elle n’apparaît que dans les chœurs. C'est dommage, car c'est une chance pour un groupe de power mélodique d'avoir à la fois un très bon chanteur au timbre si reconnaissable et une chanteuse d'un tel niveau.
Au fil des pistes cependant, on commence à ressentir une certaine monotonie. Peut-être est-ce dû à la batterie, correcte mais sans surprise ni contretemps, ou alors aux orchestrations, un brin trop classiques ? Toujours est-il qu'à la fin de Age of
Glory, on commence à s'ennuyer un peu, lassé par ces chansons qui suivent de près ou de loin le même schéma couplet-refrain-couplet-refrain-pont-solo-refrain. C'est là que commence la deuxième partie de l'album, celle qu'on découvre mieux après plusieurs écoutes, et qui apporte véritablement un deuxième souffle à cet opus.
Symphony for the Quiet est une bombe, symphonique et puissante, où les chœurs, grandioses, nous transportent. La guitare est merveilleuse de mélodie, elle monte d'un cran le niveau général de l'album, tant sa mélodie est somptueuse. Tannenberg est un morceau plein de surprises ; il débute sur une belle partie de guitare, un peu vintage, part ensuite sur un couplet relativement classique, puis arrive un refrain puissant qui nous prend à contre-pied, le tout enrobé de délicieuses orchestrations, fines et gourmandes. Le morceau se termine sur un long passage instrumental, cette fois dans une atmosphère plus inquiétante et menaçante.
Suit l'incroyable
Legacy of Tudors, un morceau rapide, doté d'un refrain surprenant, avec une très belle gradation vers les aiguës, qui entrera dans votre caboche sans jamais en ressortir. Il est juste dommage de ne pas avoir un refrain ou un couplet chanté par la nouvelle vocaliste du groupe. Cette pensée est vite chassée à l'approche du morceau final, Royal
Pain, dont le refrain lui a été offert. Le solo est impressionnant, très technique, mais pas encore trop complexe pour ne pas tomber dans la démonstration.
Je voulais revenir sur mon observation, trois paragraphes plus haut. J'évoquais une certaine lassitude suite aux premiers titres ; cette lassitude est le résultat d'un schéma de chanson déjà vu, qui n'est pas sans rappeler les précédents opus de
Serenity, bons ou moins bons. Néanmoins, les cinq premiers morceaux de l'album sont loin d'être mauvais.
Shining Oasis est une chanson intrigante, avec une étrange mélodie arabisante, un couplet un brin plus sombre que le reste de la galette, puis un refrain beau mais assez classique dans l'ensemble. De plus, on trouve sur le morceau précédent, Art of
War, un solo ahurissant, très rapide, et qui part décrocher des notes de plus en plus aiguës, pour finir sur une somptueuse harmonie qui mène au refrain. C'est par contre le quatrième titre qui peut nous apporter un peu de déception. C'est une belle ballade, avec une très bonne intervention de miss Delauney, mais elle manque d'un petit quelque chose qui la ferait monter à la hauteur du légendaire Fairytales sur
Fallen Sanctuary.
A propos de Fairytales, on nous en propose une nouvelle version, uniquement au piano, parmi les deux titres bonus. C'est une bonne idée, la voix féminine étant bien meilleure que sur l'ancienne version. Enfin, petite originalité,
Serenity nous offre une reprise de Queen, Love of My
Life. Cette chanson convient en effet parfaitement à monsieur Neuhauser, qui la modifie complètement rien qu'avec sa voix.
L'album se termine donc réellement sur ces deux petites notes de fraîcheur, qui font culminer la durée totale de l'album à plus d'une heure. On a passé un très bon moment. Les prochaines écoutes ont des chances d'être aussi agréables que celle-là , et la galette risque de tourner encore un petit bout de temps sur votre platine ; jusqu'à ce que vous vous en lassiez. L'opus est clairement bon, mais il lui manque cette petite dose de folie qui le ferait rentrer au panthéon du metal (ça existe ça?). C'est pourtant un album bien nécessaire Ã
Serenity, une étape obligatoire, sur le chemin qu'ils doivent parcourir. La symphonie est enfin domptée, nous ne sommes plus si loin du chef d'œuvre. Toujours un cran en-dessous de
Fallen Sanctuary, mais bien au-dessus de Death and
Legacy,
War of Ages marquera les esprits comme étant un album doté d'une originalité certaine pour un groupe hors-normes.
Sauf que je ne comprends toujours pas la pochette de l'album.
Un bon 17/20.
Si il est vraiment meilleur que Death and Legacy je ne peux que l'aimer...
Juste une remarque, oui, ce n'est pas un "peut-être", Alessandro Conti est l'un des meilleurs vocalistes power/heavy à l'heure actuelle! Incontestablement... Je laisserais Kiske dans ce cercle fermé au vu de sa prestation sur le dernier Avantasia et en attendant de le voir live.
EDIT : En écoutant attentivement le dernier Trick or Treat pour en réaliser la chronique, je suis un peu déçu par Alessandro Conti qui n'est pas au niveau de ce qu'il fait avec Luca Turilli. Donc pour ma part j'attendrai encore avant de le faire figurer parmi les meilleurs vocalistes du moment.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire