S’il y a bien une sortie en termes de deathcore qui était énormément attendu en ce début d’année, c’est sans conteste celle de Humanity’s
Last Breath. En effet, les suédois ont su, au travers de leurs précédentes parutions, et notamment avec leur dernier opus
Abyssal, renouveler un genre qui avait, au cours de ces derniers temps, perdu de sa superbe et qui, ne nous le cachons pas, devait assez désuet et insipide. Certes, il subsistait encore quelques erreurs de mixage, qui auraient mérité un peu plus de peaufinage, mais le quatuor avait prouvé qu’il avait les cartes en main pour initier un nouveau mouvement, celui d’un deathcore à la fois expérimental, morose, presque funéraire et mélodique par moments.
Aujourd’hui, même après douze ans d’existence, la mise en lumière de nos jeunes musiciens demeure assez modeste. Néanmoins, par le biais de son public et de nombreux vidéastes qui n’hésitent plus à réagir aux futures sorties du groupe, le quatuor commence petit à petit à se faire remarquer dans une scène toujours plus vaste. Les artistes ont aussi joué sur la mise en haleine, notamment avec la sortie de leur premier single,
Earthless, huit mois avant la sortie de leur quatrième toile. Après une attente qui se faisait presque interminable,
Välde (
Empire en suédois) a finalement fait son apparition. Reste à savoir si le nom de cet album fait honneur à son contenu.
La formation a une nouvelle fois fait confiance au label Unique Leader Records. Pour l’artwork, il est l’œuvre de Mariusz Lewandowski, qui était déjà au pinceau sur la magnifique pochette du dernier
Xenobiotic. La production est, quand à elle, le fruit d’un des deux guitaristes du groupe, Buster Odeholm.
Là où on pensait qu’
Abyssal était déjà d’un sinistre et d’une pesanteur suffocants,
Välde sait nous prodiguer une noirceur et une massiveté encore plus oppressantes. Cette ambiance toujours aussi incommodante et froide, à la limite de la claustrophobie est due principalement aux guitares, accordées si graves qu’elles semblent venir d’outre-tombe et à un travail extrêmement dissonant déjà présent mais bien plus mis en avant que sur les précédents opus. L’écho djent et notamment de
Meshuggah n’est d’ailleurs jamais très loin. Le groupe a également fait le choix de compositions aux tempos languissants, qui prêtent quelques traits au sludge et au doom. La relation entre ces deux aspects développe une atmosphère blackened deathcore encore inexploitée par nos musiciens.
L’intro Dödsdans, de par ses grattes et sa batterie hâtive, amorce déjà ce climat cataclysmique, où seul la mort fait figure. C’est par ailleurs l’un des seuls morceaux qui déploie un tempo prompt. Dès les premiers instants de
Glutton, la rudesse fait immédiatement son apparition. Avec lui s’accompagne un instrumental totalement angoissant et inquiétant, qui atteindra son point d’orgue lors du breakdown, de l’exécution de notes fantômes et de ce chant glaçant.
Earthless est la définition même du tombeau : jamais un morceau n’aura proposé un tel niveau d’épouvante et de tension. Le second breakdown est irrespirable, extrême, définitivement intense et stupéfiant.
L’atmosphère terrifiante et pondéreuse ne nous quitte jamais mais elle est parfois composée différemment. Dans le somptueux final de
Spectre ou sur
Tide, ce sont les arrangements symphoniques et le chant clair qui vont esquisser cette pétrification et ce mal-être. Hadean affiche une proposition bien plus technique qu’à l’accoutumée, ainsi que des influences religieuses qui nous rendent spectateur de cet immense spectacle.
Plus ambitieux encore,
Väldet se démarque par l’utilisation aussi astucieuse que tremblante de sonorités de sirène, comme si la mort nous traquait et ne devenait qu’une question de temps.
Välde n’est clairement pas une pièce facile d’accès. Ses nombreuses variations, cette sensation omniprésente de frayeur et brutalité et sa durée se feront parfois ressentir. Il ne sera pas rare également d’entendre quelques ressemblances, de même que certains titres souffriront de longueurs. Mais ce quatrième opus pourra profiter d’une meilleure qualité de production par rapport à ses prédécesseurs, une impressionnante authenticité qui saurait faire rougir sans aucun problème un
Thy Art Is Murder,
Carnifex ou
Oceano et d’une très grande maturité.
Humanity’s
Last Breath vient frapper un grand coup avec une quatrième réalisation qui est jusqu’à présent la plus aboutie du groupe. Les suédois continuent d’innover, de prendre des risques, jusqu'à pousser au paroxysme leur concept musical. Le résultat en vaut clairement la chandelle et offre une nouvelle vision d’un deathcore moderne qui mêle l’expérimentation, la désolation et la férocité. Il ne reste plus qu’à voir jusqu’où iront les musiciens dans leur aventure mais une chose est sûre,
Välde ne nous laissera aucunement indifférent.
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