Figure de proue, mastodonte, porte-étendard (choisissez le terme que vous préférez) du metalcore à l'international,
All That Remains fait partie de ces artistes metal qui ont réussi à refourguer plusieurs millions de leurs galettes au public dépensier que nous sommes. Ces groupes millionnaires ne sont pas légion. Néanmoins, quiconque de sensé ne saurait lier cette réussite commerciale avec l'importance ou l'intérêt purement artistique... Qu'on se le dise tout de suite : ce ne sera pas avec « Order of Things » que
All That Remains réconciliera musicophiles exigeants et fanbase.
Depuis 1998, le quintet originaire de
Boston est passé d'un metalcore agressif et hurlant (celui du premier LP «
Behind Silence and Solitude ») plus proche des racines du genre, à un style plus enchanteur, avec des chants clairs (apparus pour de bon sur «
The Fall of Ideals ») et des mélodies qu'on pourrait entendre sur n'importe quel titre de variété anglo-saxonne bien senti. Du popcore, voilà le terme que j'emploierais pour définir la musique actuelle d'
All That Remains. Ce n'est pas un jugement de valeur : juste une tentative de définition d'un groupe mettant les deux mains dans la séduction pop, accessible, plaisante à l'oreille, et l'agitant par-ci par-là avec des humeurs plus musclées, entre double-pédale et growl/screamo similaire à celui de
Corey Taylor de Slipknot.
Il est difficile de ne pas être séduit par les touchants passages instrumentaux et leur élégance intimiste, à l'image de « Bite My Tongue » ou de « Fiat
Empire ». Le jeu des musiciens est, par ailleurs, irréprochable, rôdé, sans bafouilles, huilé comme le moteur d'une belle bagnole. Les mecs pèsent dans le game, sont des pros, et cela s'entend. Cherchez la faille d’exécution ou de production vous ne la trouverez pas.
Cependant, comment s'empêcher de faire la grimace face aux facilités popissimes teenager-friendly de « The Greatest Generation », de «
For You » ? Vous me direz qu'on pourra se défouler sur le riff groovy en diable de «
Tru-Kvlt-Metal » et se casser le cou sur le break deathcore de « Criticism and Self » ou sur « A
Reason for Me to
Fight », qui fera furieusement pogoter les fans en
Live. C'est pas faux.
Sauf que cette denrée mélodieuse saupoudrée de poivre sagement violent, je l'ai entendue non seulement sur les deux précédents albums de
All That Remains, mais aussi sur ceux de
Killswitch Engage. Et de
Miss May I. Et de Tomorrow Brings
Giants... Grosso modo sur toutes les sorties de ceux qui pratiquent ce versant mélodique du metalcore sans parvenir à s'arracher une personnalité.
Oui, la recette est éprouvée et elle fonctionne, oui les mecs ont dix ans de carrière dans les pattes et ils assurent, mais serait-il possible d'avoir l'impression d'écouter quelque chose de différent ? Et ce, au sein même d'une discographie ? Car au fil des disques
All That Remains ne sait plus surprendre et semble même ne plus chercher à se surprendre lui-même.
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