Aujourd’hui, tendons une oreille vers le dernier opus des cinq musiciens secoués de Sheffield. Nos amis anglais, adeptes d’un style assez controversé de par sa définition même - le
Deathcore - nous livrent ici un album concis, précis, voire même chirurgical, mais très compact. Alors, “
Suicide Seasons”, à la limite de l’indigeste ? C’est ce que nous allons voir.
Autant le préciser avant la première écoute : BMTH, ça tape de manière assez particulière. Les riffs sont proches du HxC, le chant (saturé bien entendu) alterne passages Punky, dans le genre des bonnes vieilles formations anglaises
No Future, et passages Death plus classiques. Les paroles quant à elles sont elles aussi tournées vers le Death : ainsi, on obtient ce fameux
Deathcore qui prétend rassembler plusieurs auditoires.
On démarre sur “The Comedown”, batterie légèrement trafiquée sur l’intro, riff immédiatement posé, tout en syncopes et très gras. Le son de la batterie est un peu trop sale, trop aigu. A mon sens, le mixage aurait mérité plus d’attention à ce niveau là, mais c’est aussi l’appartenance au HxC qui veut ça. En tout cas, ça tape sec, ça va vite et on n’a pas le temps de s’endormir. Le chant est maîtrisé, l’alternance des deux voix se fait relativement naturellement, en tout cas c’est cohérent. Un break rythmique au milieu du titre relance l’accroche, bref, tout y est.
Comment arracher un sourire à un londonien ? Faites lui écouter “
Chelsea Smile”… Non, mauvais jeu de mots mis à part, le deuxième titre de la galette s’oriente très clairement comme le premier. Et ?… Justement, et c’est pas bien varié. Enfin, encore une fois je pense que le mixage final dessert un peu l’orientation du disque : en effet, les voix couvrent beaucoup trop le reste, et on a ainsi l’impression de toujours écouter le même morceau… C’est ennuyeux lorsque l’on sait que BMTH propose des riffs ravageurs qui méritent à eux seul l’écoute de leurs albums… De plus, on retrouve la rupture rythmique - ralentissement du tempo - déjà présente sur “The Comedown”… Alors, où est la diversité ?
Heureusement vient “It Was
Written In Blood”. Enfin, on attaque sur une intro complètement différente, un riff qui surnage un peu plus, une construction différente, bref : du neuf dans la galette. Bon, faut aimer la voix que j’ai qualifié plus haut de “Punky”, mais globalement, le titre est en contradiction avec les deux premiers. En revanche, il représente relativement bien ce que d’aucuns reprochent au
Deathcore : un esprit un peu trop “Emo” par moments. Ecoutez, et faites-vous votre propre idée…
Curiosité : “Football Season Is Over”. Franchement, on s’approche plus ici du son de groupes comme
Agoraphobic Nosebleed, avec un blast très présent en première partie, un riff inaudible - couvert par les cymbales et la voix - et une structure ultra linéaire. Là aussi, cela permet heureusement au groupe de ne pas faire basculer son auditeur dans la lassitude que peut amener assez facilement ce genre de musique.
On enchaîne avec “
Sleep With One Eye Open”, intro bizarroïde suivie d’un riff monumental, taillé dans la roche de l’Everest. Un gros “Fuck You” (merci Shakespeare) annonce la couleur : attention, BMTH n’est pas là pour rigoler, ce sont des vrais méchants… La suite est nettement plus intéressante, avec un changement radical vers des accords sans lien avec le riff initial. Pourquoi pas ? Ca fonctionne plutôt pas mal, ça groove pas mal sur certains passages, je vote pour.
Une introduction très douce nous plonge dans “
The Sadness Will Never End”, et lorsque le riff démarre, il vient presque naturellement se poser sur les quelques notes sucrées qui nous ont brièvement engourdi. Nettement plus posé que le reste de l’album, il stigmatise à lui seul les “défauts des qualités” de
Bring Me The Horizon : ceux qui craignaient des dérives du style
Bullet For My Valentine ne doivent pas écouter ce titre… Pour les autres, il s’agira d’une petite erreur de parcours pour un groupe qui se veut
Deathcore. Enfin, pour quelques uns d’entre nous, il restera un morceau saisissant, qui mérite l’attention, avec même quelques (très) courts passages en chant clair.
Le titre suivant est très court, une minute tout pile. Intitulé “No need for introductions, I’ve read about you on the the back of toilet doors” (j’ai cherché, j’ai pas trouvé plus long), il fait lui aussi penser à du
Agoraphobic Nosebleed une fois lancé, notamment à 35 secondes où le chanteur se retrouve A Capella avec un timbre très très caractéristique du groupe pré-cité. Et en fait d’une minute, l’auditeur bourrin n’a que 44 secondes de massacre, les 16 secondes d’introduction étant réservées à quelques notes jazzy, piano et guitare classique en toile de fond. Ce genre d’exercice de style sied très bien à une formation comme BMTH : c’est différent, c’est rigolo, et c’est loin d’être dénué de sens. Foutrement bien conçu, ce petit morceau perdu à l’avant-dernière place…
Et donc voici le dernier : “
Suicide Season”, titre éponyme. On commence sur un riff assez plat, vite rejoint par les hurlements déchirants du vocaliste. Mais, à ce moment du disque, on a fini par s’habituer à sa voix très particulière, et on n’est pas surpris. Le reste du morceau est une pseudo ballade en hardcore mineur, guitares claires et tempo lourd alternant les gimmicks chargés en émotion. M’enfin, soyons honnête : le titre n’est pas crédible parmi le reste des fureurs fantasques de cet album. Il est trop larmoyant, à la limite du ridicule. Surtout lorsqu’après trois minutes d’écoute le chant passe en mode je-fais-aussi-du-goregrind-des-fois… Avouez que pour la cohérence globale de la galette, on a vu mieux !
Au final, que faut-il retenir de ce troisième album des cinq mécheux du Comté de Yorkshire (ne riez pas, c’est la vérité, même si effectivement ça colle bien avec les mèches) ? Tout d’abord, mis à part le dernier titre qui à mon sens n’a rien à faire là, l’album est entier et autonome. Ca sonne juste, ça se tient, c’est propre. Du côté des défauts majeurs, je pense principalement aux longueurs et aux répétitions, mais ça ne me paraît pas incorrigible compte tenu du registre métallique dans lequel évolue BMTH. En effet, le
Deathcore ça speede, ça racle, ça tape et ça hurle sans arrêt, donc on tombe facilement dans ce genre d’égarements.
En revanche, les qualités sont indéniables : le groupe a réfléchi depuis les deux précédents albums, et les structures sont plus léchées. Du côté de l’innovation, on n’est pas en reste puisque l’intérêt est fréquemment relancé, ce qui n’est pas contradictoire avec les longueurs évoquées quelques lignes au dessus.
Petit point négatif un peu à part : le mixage n’est pas des plus adéquats selon moi. On ne profite pas assez des riffs déchirés, et la batterie est encore plus en retrait, avec un son plutôt moyen.
Conclusion : si vous aimez le HxC et le Death, ça ne fera pas forcément de vous un amateur de BMTH. En revanche, si vous aimez le HxC et/ou le Death et que vous êtes assez ouvert aux nouveaux horizons, celui que vous amène les anglais est vraiment ravageur…
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