POD a enfin rencontré un premier succès avec la sortie de "
The Fundamental Elements of Southtown" en 1999, pourtant leur troisième album déjà et après une carrière de 7 années dans le monde musical et un premier album déjà sorti en
1994. Mélangeant habilement néo-metal, hip-hop, reggae et hardcore, ils ont su montrer une face inédite du néo-metal et du rap metal en vogue à l’époque, avec une énergie et un talent musical indéniables. Enfin lancé sur la route du succès, très loin des débuts hardcore underground des deux premiers albums,
POD (acronyme de
Payable on Death) se lance sans plus attendre dans l’enregistrement d’un successeur qui sortira donc en l’année 2001, et répondant au nom de "
Satellite". Sans le savoir, cette sortie mènera le groupe dans la consécration de sa carrière et aura une importante influence dans le milieu musical.
Premier constat évident à l’écoute de cet album : le groupe souhaite continuer dans la fusion des genres et la variété qui caractérisaient déjà le précédent opus. Ainsi, «
Set It Off » mélange couplets rappés en mode hip-hop suivis d’un refrain agressif tiré du milieu hardcore quand «
Alive », lui, se veut un parfait tube néo-metal comme le voulait la tendance à l’époque ; « Without Jah’, Nothin' » mélange punk hardocre et reggae sur une même chanson lorsque « Thinking About Forever » se veut être une ballade. Cette fusion des genres est poussée plus loin cette fois-ci, avec une moindre prédominance du rap metal, et laisse place à une multitude de nouvelles expérimentations musicales. Certaines chansons gardent un fort aspect rap metal, c’est certain, comme «
Youth of the Nation » ou «
Boom », mais ce n’est plus la norme comme ce fut le cas avec "
The Fundamental Elements of Southtown". Les musiciens font donc preuve d’une intéressante polyvalence afin de poursuivre cette quête de variété voulue, et leur jeu se trouve doté d’une large variété d’influences, allant du metal, en passant par le dub, le reggae, le punk, jusqu’à l'acoustique, le tout habilement exécuté et avec une production plus propre. J’aime particulièrement l’effet de distorsion atmosphérique que fait le guitariste sur certaines chansons, à l'instar de «
Set It Off » lors des couplets, ou dans l’instrumentale « Celestial ». Cette dernière, se voulant planante et contemplative, est vraiment agréable à écouter, et j’ai toujours trouvé extrêmement dommage qu’elle soit si courte ; elle aurait dû être pensée comme un véritable titre instrumental plutôt qu’un simple interlude. Il en va de même pour « Guitarras de Amor », titre instrumental acoustique aux influences hispaniques qui montre encore une fois la versatilité des guitares et qui, encore une fois, aurait mérité d'être plus longue (elle ne dure qu’une minute à peine…).
Deuxième constat : une importante amélioration est apportée au niveau du chanteur, en plus des musiciens. Ce faisant, le chanteur Sonny Sandoval nous concocte des lignes vocales mélodiques chargées d’émotion, comme dans «
Alive », «
Satellite », « Ghetto » ou « Thinking About Forever », passages qui contribuent considérablement à l’appréciation de l’album. Le flow de son rap reste toujours aussi fluide, et ses vocaux hardcore n’ont rien perdu en rage ; toutes ses techniques vocales démontrent un aspect multi facial intéressant de sa voix. L’émotion et les messages des textes sont ce qui définissent le mieux le chant de Sonny, voire carrément le songwriting des chansons.
Durant une ère où la plupart des groupes de metal chantait sur leur misère, leur douleur ou le dégoût de la vie en général,
POD offrait, lui, une vision plus optimiste et plus lumineuse. Alors qu’un
Korn, Slipknot,
Staind ou
Taproot rappelait à ses auditeurs toute la merde qui peut se passer dans la vie,
POD transmet des messages d’espoir et d’optimisme, comme s’il se souciait réellement de la vie de ses fans. C’est le cas par exemple avec «
Youth of the Nation », véritable tube rap metal planétaire à l’époque de sa sortie, qui raconte la dérive de jeunes les conduisant au suicide, dans un but de prévention. «
Alive », lui, célèbre la vie, tout simplement, dans tout ce qu’il y a de miraculeux en elle, avec un clip musical marquant, montrant de manière on ne peut plus claire cela à travers des images d’un jeune homme souffrant d’un terrible accident de voiture, l’amenant à voir sa vie défiler devant lui durant le violent choc, pour au final en sortir totalement indemne et se rendre compte du miracle d’être encore en vie. « Thinking About Forever », pour sa part, parle de la vie en général, avec tous les obstacles difficiles à surmonter, le fait de fonder une famille, l’importance des proches. Oui, on est loin d’un « Daddy » de
Korn ou d’un « People =
Shit » de Slipknot. Cette approche plus lumineuse n’est pas étonnante compte tenu de la chrétienté du chanteur qui, forcément, tente de communiquer des valeurs plus en rapport avec la foi qu’il exerce. Cette chrétienté se voit parfois directement reflétée dans le message de certaines chansons, comme dans l’excellente «
Portrait », où il valorise la figure du Christ en tant que messager divin et figure nécessaire pour la paix sur Terre. « Ghetto », quant à lui, se veut très optimiste avec des textes sur la croyance de l’existence d’un monde basé sur la tolérance et l’amour. Même lorsque ça hurle, ça reste pour exprimer des messages positifs, comme dans le déjà cité «
Portrait » (pour moi l’une des meilleures) qui passe littéralement de couplets totalement enragés typés hardcore à un refrain lumineux et plus posé pour valoriser le Christ. Le très bon « Anything Right » propose, au contraire, des couplets posés et mélodiques sous fond d’orchestration au violon, suivis d’un refrain complètement hurlé, toujours derrière la volonté de montrer un message positif. La seule chanson qui est un peu une exception est le furieux « Masterpice
Conspiracy » aux textes plus enragés, et tout autant dans les compositions avec un breakdown hardcore à la fin digne des plus violents pits de la scène hardcore underground.
Cet album a aussi connu une multitude de collaborations avec d’autres artistes, toujours dans cette volonté de servir au mieux et la créativité et la variété de l’album. Nous avons droit à Christian Lindskog, chanteur de
Blindside (groupe de metal alternatif aux revendications également chrétiennes), venu assurer les envolées vocales mélodiques durant les couplets de « Anything Right » ; un certain Eek-a-Mouse (artiste jamaïcain issu de la mouvance reggae) dans « Ridiculous » , chanson qui lui est parfaitement dédiée compte tenu des fortes influences reggae (pour ne pas dire que c’est carrément un titre reggae dans son intégralité) ; et carrément H.R. des
Bad Brains (formation pionnière à l’origine du punk hardcore) venu interpréter en grande partie « Without Jah, Nothin’ », tant dans la partie reggae que, bien sûr, dans la partie punk hardcore, soutenu par les vocaux de Sonny en arrière-plan. Vraiment sympa ces collaborations, elles apportent plus de couleur aux chansons.
"
Satellite" a été, au moment de sa sortie, un immense succès mondial, et restera à jamais le plus grand succès commercial de
POD. «
Alive » et «
Boom » ont bénéficié d’une large diffusion dans les chaînes de télévision grâce à des clips musicaux particulièrement bien réalisés, «
Youth of the Nation » est carrément devenu un gros tube planétaire dans le genre rap metal (mérité, du gros son). Vingt ans plus tard, en 2021, pour célébrer les 20 ans de "
Satellite" le groupe a ressorti l’album dans une édition spéciale avec divers bonus, en plus de l’avoir interprété dans son intégralité en live. Mais aussi bon soit le succès de cet album, il a malheureusement souffert d’une bien mauvaise image lors de sa sortie, et cela pour une raison dont le groupe n’y est absolument pour rien : "
Satellite" a eu le malheur de sortir… le 11 septembre 2001. Inutile de vous dire ce qui s’est passé ce jour-là. Les médias et radios de l’époque avaient débilement tendance à bannir toutes les sorties musicales faites aux alentours de ce jour apocalyptique, et plusieurs groupes de metal à succès étaient aussi concernés (dont un certain "Toxicity" de
System Of A Down). Heureusement, cette tendance sans queue ni tête sera amenée à disparaître au fil du temps jusqu’à être totalement oubliée. Notons qu’il est très amusant qu’une chanson répondant au nom de «
Masterpiece Conspiracy » fasse partie d’un album sorti le 11 septembre 2001, les conspirationnistes y verront une preuve que tout cela n’est qu’un complot. Oui, je sais, je m’égare…
Et c’est dommage que l’album ait subi cela car, en dehors de cet événement purement circonstanciel, il s’agit d’une œuvre impeccable qui réussit son propos, à part peut-être un dispensable « Ridiculous », même si je ne lui reproche pas grand-chose. Sinon, un aspect non-musical est un peu à reprocher et constitue une interrogation pour moi : sa pochette, constituée d’une photo des quatre membres du groupe sur fond bleu. Comment un pareil album peut-il se contenter d’une telle pochette ? Ce n’est pas que la pochette soit moche (j’aime bien ce fond bleu qui décore tout l’artwork), mais compte tenu du contenu musical et du titre de l’album, elle n’a aucun rapport. En 2001, quelqu’un qui n’a jamais entendu parler de ce groupe pourrait parfaitement le confondre avec l’album d’un boys band. C’est d'autant plus incompréhensible que la pochette du précédent opus de 1999 bénéficiait, elle, d’un très joli dessin et fourmillait de détails, s’apparentant alors à un tableau d’art. Ça reste un détail, mais vraiment bizarre…
Le milieu metal de l’époque avait besoin de
POD. Devant tant de négativité dans les propos des groupes de metal tendances des débuts 2000, "
Satellite" apparait comme une lumière pour éclaircir un peu le paysage et proposer quelque chose de bien différent et, surtout, de très intéressant. Les chansons viennent tout droit du cœur, sont écrites avec passion et bienveillance, et transmettent des messages d’espoir, spirituels et émotionnellement positifs, le tout avec de la sincérité. Musicalement, ça reste quand même bien heavy avec des influences hardcore et néo qui balancent des riffs destructeurs à vive allure, et des screams puissants, couplés avec une variété agréable qui aère les compositions sous diverses influences dont reggae et hip-hop sont les plus notables. Un must-have de la période néo-metal.
Très bonne chronique, pour un album majeur du mouvement Néo metal. "Alive" pour moi un des titres que je mettrais si je devais faire un best of Néo métal. D'ailleurs le groupe A et son excellente compo Nothing, à un riff d'intro qui rappelle beaucoup Alive.
Dommage que le groupe n'a jamais réussit a arriver par la suite à la cheville de cet opus. A moins que je me trompe...
Merci pour ton commentaire :)
"Alive" je l'avais écouté je ne sais combien de dizaines de fois quand je l'avais découvert ados, ce refrain c'était quelque chose waw.
Ah ouaaaaaaais mais putain j'avais complètement oublié cette chanson dont tu parles, Nothing de A (le nom de groupe le plus débile de l'histoire soit dit en passant, je m'étais fait la remarque à l'époque). Ca doit être la première fois que je l'écoute depuis 12-15 ans ! Bordel les souvenirs que tu viens me faire remémorer là haha. Et j'avais jamais fait le lien avec le riff d'Alive, effectivement.
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