A une époque dans l’histoire du metal la culture latino était à la mode, et s’est vu bénéficier de plusieurs représentants de renom qui ont fièrement contribué à la mettre en avant avec des albums marquants.
Sepultura et
Soulfly sont indéniablement les plus grands représentants de cette mouvance latino, mettant très en valeur la culture brésilienne avec deux succès massifs : "Roots" pour le premier et l’éponyme, "
Soulfly", pour le second. A cela j’ajouterais, à titre personnel, l’excellent album "Poder Latino" des Argentins d’
ANIMAL, qui, selon moi, aurait parfaitement mérité un succès similaire, et rend parfaitement hommage à l’Argentine et à son histoire ainsi qu’à celle de l’Amérique Latine. C’est dans cette mouvance en faveur du peuple latino dans le monde metal qu’est apparu un certain
Ill Niño avec son premier album, "Revolution Revolución", en 2001. Un petit historique s’impose.
Durant les années 90, la scène hardcore de l’époque s’est vue complètement retournée sans dessus dessous par tout un tas de groupes qui ont poussé le genre vers de nouvelles contrées et ont fait exploser les décibels. Parmi ces groupes se trouve un certain
Pro-Pain, dont le hardcore hargneux, groovy et teinté de thrash avait marqué la scène de l’époque (Aaaaah « In for the
Kill », aussi loin que je me souvienne, ce fut ma première grosse claque hardcore, tel un uppercut sec, j’en ai encore des souvenirs !). Dave Chavarri, alors batteur à l’époque de
Pro-Pain, s’ennuyait au sein du groupe après un an de loyaux services ; jouer juste du hardcore ne semblait plus l’amuser. En l’année 1998, l’idée lui est donc venue de former son propre groupe et de se lancer dans une toute nouvelle aventure : c’est le début d’
Ill Niño.
A la base,
Ill Niño était formé de Jorge Rosado au chant, Daniel Gomez à la guitare, Christian Machado à la basse, et bien sûr Dave Chavarri à la batterie, et jouait une musique semblable au hardcore. Mais très rapidement, au fil des changements de line-up, il s’est retrouvé à jouer une musique totalement différente avec un line-up définitif en 2001, au sein duquel figurent : Lazaro Pina à la basse,
Marc Rizzo et Jardel Paisante aux guitares (oui, le grand
Marc Rizzo avait bien débuté avec
Ill Niño à la base !), Dave Chavarri toujours à la batterie, Roger Vazquez aux percussions, et surtout, Christian Machado, qui laisse derrière lui la basse pour occuper le poste de chanteur ; line-up avec lequel sortira "Revolution Revolución".
Rien que les informations essentielles sur l’album donnent une idée du propos musical. Nous avons un nom de groupe signifiant en espagnol « L’enfant » (quoique volontairement mal écrit, s’écrivant normalement «
El Niño »), et un nom d’album désignant un mot, « révolution », aux connotations politiques-sociales évidentes, traduit en deux langues différentes (anglais et espagnol). Il n’en faut pas plus pour comprendre que nous avons bien là un groupe de latino metal. Comme si tous ces éléments n’étaient pas aussi évidents, les noms et les origines des membres du groupe attestent de cela : brésiliennes pour Christian Machado, péruviennes pour Dave Chavarri, par exemple.
On lance donc le premier titre, «
God Save Us », et on a déjà face à nous une véritable bombe sonore. Christian Machado débute par les premières paroles chantées calmement avant de très vite basculer vers un scream accompagné par un riff chargé en décibels, le genre de passages capables de faire jumper tout un Woodstock à la fin des années 90. Le même schéma se reproduit par la suite mais, cette fois-ci, avec un passage bourrin plus long où Christian nous assène de ces screams, avant de subitement basculer vers un refrain chanté sur fond de guitares acoustiques aux airs latinos des plus agréables. La chanson jouera constamment avec ces différentes alternances entre le néo-metal bourrin, le mélodique émotionnel et les sonorités latinos sur fond de guitares acoustiques et de percussions. Le refrain est puissant et émotionnel, les riffs explosifs plaisants à souhait et les influences latinos ingénieusement fouillées dans la puissance néo-metal. Le tout pour l’une des plus belles chansons latino metal qui soit. Oui, ça commence très fort !
Le reste des chansons de l’album sont globalement dans le même état esprit que «
God Save Us », parmi lesquelles : « If You Still
Hate Me », qui débute avec un gros riff accompagné par toute une grosse instrumentation latino dansante aux percussions prononcées et qui enchaîne aussi la chanson avec une alternance de passages bourrins-refrain mélodique ; «
Unreal », qui baisse un peu le tempo en se montrant plus axé sur le chant avec un refrain mélancolique, redoutable d’efficacité, ou encore « Rip Out Your
Eyes », qui inverse efficacement la formule avec cette fois couplets chantés et refrain hurlé.
Bien que les chansons de l’album démontrent un niveau constant de qualité, certaines sortent vraiment du lot.
Outre le déjà cité «
God Save Us », il y a aussi «
What Comes Around ». Cette chanson propose une expérience musicale plus "ambiancée", grâce aux couplets avec effet de guitare planante, riffs plus atmosphériques lors du refrain et pont en mode full instrumentation latino et paroles chantées en espagnol ; «
What Comes Around » fut précisément le gros single de l’album à sa sortie, et, à titre personnel, la première chanson qui a réellement gagné mon intérêt envers le groupe.
«
Liar », elle, commence avec une intro chantée en acoustique, avant d’alterner vers quelque chose de bien plus bourrin, une formule qui a déjà fait ses preuves certes, mais ce qui distingue «
Liar » du reste, c’est toute la tourmente émotionnelle qui ressort du refrain ! «
I Am Loco », pour sa part, se veut la chanson la plus bourrin avec
Marc Rizzo, qui nous balance ses riffs les plus vénères et ravageurs, un Machado enragé qui nous sort des hurlements teintés de hargne, un refrain exprimant de la confusion et une ambiance tourmentée. «
Nothing’s Clear », quant à elle, est une tuerie de la première seconde à la dernière. Elle est celle qui réussit le mieux le propos musical d’
Ill Niño, avec une constante alternance entre agressif et clair bien mené, une bombe de refrain d’une efficacité dantesque, un impressionnant jeu de batterie venant de Chavarri, mais surtout, un pont latino en milieu de chanson d’une sublime exécution, avec des belles envolées acoustiques mélancoliques accompagnées par de chaleureuses percussions dansantes, venues accompagner les lamentations sentimentales du Machado, chantées en espagnol, s’il vous plait!
Enfin, celle qui, selon moi, est la plus spéciale, et mon grand coup de cœur de cet album, est la dernière chanson : « With You ». Ballade acoustique sur une profonde histoire sentimentale, on est plongé dans les influences latino du groupe dans toute sa pureté musicale. Le jeu du duo de guitares acoustiques est propre et nous fait pas mal penser aux chansons acoustiques traditionnelles latino, les percussions appuient encore plus cette ambiance sud-américaine si chère au groupe, la batterie plus discrète apporte plus de profondeur à la section rythmique, et surtout, clou du spectacle, la performance de Christian Machado est chargée en sentiments, racontant ce qu’il a vraiment au fond du cœur. Depuis la toute première fois que j’ai écouté « With You » jusqu’à encore aujourd’hui, il m’est impossible de me la passer sans imaginer le groupe jouer la chanson sur une plage des côtes de l’Amérique Latine en plein soir autour d’un feu de camp, et la petite brise qui va avec. J'aurais juste préféré qu'elle soit chantée en espagnol, le charme y aurait été plus important, mais bon, c'est déjà bien comme ça. Une très charmante ballade qui clôt l’album d’une belle manière, et qui montre toute la sincérité d’
Ill Niño au moment d’exprimer ses origines latino, plus qu’un simple gimmick musical de mode passager.
Un joli succès ce "Revolution Revolución", qui a d’ores et déjà propulsé
Ill Niño dans la reconnaissance, et qui, selon moi, s’avère être le meilleur représentant de la scène Latino
Metal, avec une excellente implémentation des éléments latino folkloriques à un néo-metal puissant et maîtrisé, des revendications sincères et une prestation vocale remarquable. Je ne reproche à l’album qu’une seconde partie un peu moins marquante avec des chansons un chouia moins inspirées (« Rumba », « Revolution Revolución »), mais en même temps, après une première moitié aussi intense et chargée de tubes qui s’enchaînent, difficile d’assurer une deuxième moitié d’album du même niveau. Un très bon début qui restera à jamais considéré comme leur meilleur méfait, et cela sera d'autant plus clair lors de la parution de leur second album, "
Confessions", deux ans plus tard, qui, malgré un succès commercial plus important et certains excellents passages, démontrera une petite panne d’inspiration de la part du groupe. Un petit faux pas qui, heureusement, sera vite rattrapé avec les albums suivants de leur carrière.
Pour ma part je trouve que c'est le meilleur album d'Ill Nino et de loin
Je pense qu'on peut le considérer comme un incontournable du genre, que ce soit dans le genre "latino metal" ou le genre néo. Comme le souligne le chroniqueur, cet album est un ouragan, de par son inépuisable énergie, ses mélodies travaillés et son côté flamenco splendide.
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