Après avoir envoyé une réelle déferlante au sein de la scène Black
Metal grecque lors de la sortie du terrible, mais malheureusement assez peu reconnu, "
Discipline Manifesto" en 2006,
Naer Mataron avait tout du groupe tirant des leçons de ses points faibles au fil des années tout en offrant à ses adeptes des sorties de qualité depuis ses débuts. "
Praetorians" était donc attendu au tournant par une communauté relativement importante, attendant fébrilement de savoir ce que pourrait bien apporter ce cinquième opus de la horde hellène sans savoir si ce dernier allait continuer de porter la flamme de leur Black
Metal, certes classique, mais diablement efficace ou si un retournement de situation était à prévoir.
Pénible a due être la douche froide pour certain, fascinante a due être l'évolution pour d'autre et indécis devait être le reste de la troupe lors des premières écoutes. Quoi qu'il en soit
Naer Mataron n'a laissé personne ne les connaissant indifférent...
Alors que
Black Lotus Records avait vu sa petite troupe grandir, s'épanouir et changer de visage au fil des années, il fut temps pour Kaiadas et ses compagnons d'arme de s'éloigner de la maison mère, voyant les choses en plus grand par une signature chez Season Of
Mist, label que l'on ne présente plus de nos jours. Jusque là il n'y a que de quoi se réjouir, la réputation de la nouvelle maison n'étant plus à faire. En revanche, certains éléments fâcheux viennent pointer le bout de leur nez.
Premièrement, un changement de line-up vient bouleverser l'ordre au sein du groupe à cause du départ de Morpheas, chanteur et guitariste de qualité depuis plusieurs années. Privé des attributs vocaux de l'homme en question, le reste de la troupe fait appel à deux remplaçants en les personnes de Vicotnik (Dødheimsgard) au poste de chanteur et Indra en tant que guitariste.
Les compositions étant en général écrites par Kaiadas et Nordvargr, nous savons que la pâte de
Naer Mataron n'aura pas disparu, en revanche s'habituer à une nouvelle voix peut être déroutant et peu aisé, surtout lorsque la précédente et la nouvelle sont très différentes.
Le premier coup d'œil jeté à la pochette de George "Grin" Prasinis représentant des soldats de la garde prétorienne (soldats d'élites de l'armée romaine) semblant plus belliqueux et moins beaux que ce que veulent nous faire croire les gravures d'époque, peut être assez déroutant, les tons et l'imagerie en elle-même n'étant pas sans rappeler certaines illustrations de Death
Metal. Une chose est sûre en tout cas, une ambiance va bien être présente et la charge de ces soldats ne va pas laisser les auditeurs sans séquelles pour le meilleur ou pour le pire en ce qui concerne la musique.
Après une introduction nous menant tout droit au champ de bataille par son rythme martiale, "Ostara" lance la première offensive en dévoilant quelques nouveaux aspects de cette sortie. Premièrement, l'élément qui n'échappera à personne : la production. Celle-ci est du jamais vu chez NM et rebutera la plupart des adeptes du quintet, c'est un fait. Elle est à la fois propre et collante, permettant une parfaite analyse de chaque instrument tout en gardant un aspect peu ragoûtant assez implicite aux premiers abords, ici la crasse se cachant sous une couche de perfection et de propreté. La batterie sonne très claire, peut-être un peu trop sur certains passages, tandis que les guitares ont un son plus typique du Black
Metal de la génération actuelle: un son grésillant, mais sans fioritures.
La basse quant à elle est tout à fait audible ce qui en fait un plus par rapport aux opus précédents où il fallait parfois tendre l'oreille et faire appel à toutes ses facultés de concentration pour analyser le jeu de Kaiadas pleinement.
Dans un second temps, la voix de Vicotnik surprendra beaucoup, pouvant même paraître inadéquate à l'esprit de
Naer Mataron. Celle-ci à la fois grondante et torturée a tout de la créature échappée de film d'horreur et est parfaitement antagoniste au chant de Morpheas très classique, mais très efficace.
En revanche, au fil des écoutes ces détails s'estompent et finissent par faire partie intégrante du charme de ce nouvel album. En effet, Kaiadas et Nordvargr n'ont pas perdu la main et savent toujours aussi bien nous offrir des compositions marquantes, souvent à tiroir, où les variations font mouches d'une juste manière car elles sont placées au bon moment. Un titre tel que "Sun
Wheel" en est le parfait exemple. Après son départ sous un élan de blasts effréné, un riff basique délivrera un tempo plus réfléchi où la mélodie prendra plus de sens, envoûtant l'auditeur, faisant ressentir à toute personne ayant eu la sensation d'une trahison quelques minutes plus tôt que
Naer Mataron est resté
Naer Mataron. Dans le même genre, impossible de ne pas cité le successeur du titre précédant, "Death Cast a
Shadow Over You" et ses variations jouissives, mélodiques, tout en gardant une certaine agressivité, les guitares montant crescendo jusqu'au magnifique final, ou encore le fameux "Incarcerating Gallantry" et son break final toujours aussi prenant au fil des écoutes.
Mais l'heure n'est pas qu'aux variations mélodiques et "
The Eternal Pest" avec ses touches dramatiques et oppressantes est là pour nous le rappeler de part son riffing lourd dans l'atmosphère qu'il dégage, lui-même précédé tantôt du cynique "Secret
Heritage", titre malsain dans son âme où la voix de Vicotnik apporte réellement quelque chose de part ses grognements et ses poussées vocales accompagnant le rythme assommant et répétitif de la batterie.
On peut donc dire que ce "
Praetorians", en dépit de la nouvelle image qu'il amène du groupe, est un bon et original successeur à "
Discipline Manifesto". Ce qui paraît être des défauts aux premiers abords s'estompe au fur et à mesure de la persévérance pour peu que l'on n'adhère pas immédiatement au nouveau son ou à la nouvelle tessiture vocale. Si cet album vous a repoussé lors de son acquisition et que vous regardez votre "
Skotos Aenaon" d'un air mélancolique, je vous encourage à lui laisser une nouvelle chance, car à force de persévérance on parvient à en déceler les secrets et à se laisser entraîner sur le champ de bataille sec et tacheté de sang où le groupe grec délivre ses compositions.
Val'.
J'ai trouvé la production assez surprenante, mais poisseuse et collant tout à fait au style de NM.
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