Les événements se sont enchaînés à la vitesse grand V pour le combo italien depuis sa sortie de terre il y a tout juste cinq ans. En effet, après un prometteur «
In the Shadows of Things » (2017) et un encourageant «
Welcome to the New World » (2018), leurs deux premiers albums full length, auxquels s'ajoute un capital audiovisuel riche de plusieurs clips vidéo, nos acolytes n'allaient pas s'arrêter en si bon chemin. Aussi, réaliseront-ils dans la foulée la bagatelle de trois singles : «
Time to Rise » et «
Nothing » en 2019, suivis de «
On the Road to Babylon » en octobre 2020 ; titre éponyme de leur troisième et présent opus de longue durée, «
On the Road to Babylon », une auto-production de 47 optimales minutes sur lesquelles s'enchaînent sereinement 9 pistes à la fois pimpantes, énigmatiques et enivrantes. Cette nouvelle offrande serait-elle de nature à porter dès lors la troupe vers les valeurs confirmées du metal symphonique gothique à chant féminin ?
A nouveau porté par les chatoyantes et pénétrantes inflexions de sa frontwoman Nicoletta Rosellini (
Kalidia,
Vivaldi Metal Project, ex-
Aevum (live)...), savamment mis en musique et intégralement écrit par
Shaman, son guitariste et sa tête pensante, c'est au cœur d'un univers rock'n'metal mélodico-symphonique gothique et progressif à la fois palpitant, intrigant, aux forts contrastes atmosphériques et vocaux que nous plonge la formation sud-européenne, non sans rappeler
Lacuna Coil,
Evanescence,
We Are The Fallen,
Autumn,
Ravenscry, entre autres. Avec le concours, pour l'occasion, d' Elisabetta Bettini, chanteuse du groupe de rock alternatif italien
Two Of Spades, et d' Emiliano Pasquinelli, créateur et growler du groupe de death metal italien Tuchulcha, déjà sollicité sur les deux premiers albums studio de
Walk In Darkness.
Enregistré, mixé et mastérisé au
Virus Recording Studio par Alessandro Guasconi, le méfait jouit d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation, d'une belle profondeur de champ acoustique tout en ne laissant filtrer que d'infimes sonorités résiduelles. Pour mettre les petites plats dans les grands, l'artwork d'obédience néo-romantique, au trait affiné et dévoilant quelques contrastes de couleurs – la froideur du gris acier de la toile de fond tranchant avec la chatoyance du rouge carmin de l'avant-scène – , est l'oeuvre de Carlos Fides (Artside Studio). Voici donc le collectif transalpin revenu dans les rangs plus boosté que jamais, prêt à en découdre, et ce dans un registre metal pourtant en proie à une concurrence galopante...
C'est sur une cadence mesurée que s'effectue le plus clair de la traversée, le combo italien trouvant alors matière à nous sustenter. Ainsi, à la lumière de ses couplets bien customisés relayés chacun d'un fondant refrain, conjuguant parallèlement les sensuelles oscillations de la belle et les growls abyssaux d'une bête que l'on croirait terrée au fin fond de sa caverne, le ''lacunacoilesque'' mid tempo aux riffs crochetés « The Sound of
Rain » ne mettra qu'une poignée de secondes pour aspirer le tympan du chaland. Dans la lignée coalisée de
We Are The Fallen et
Autumn, on ne saurait davantage éluder « On the
Moon or on Mars », un félin et chavirant mid tempo progressif aux reflets mordorés et pourvu de troublantes séries d'accords. Dans ce sillage, on n'échappera que malaisément à l'appel de deux sirènes investies sur le pénétrant mid tempo progressif « My
Restless Wings », les cristallines patines de Nicoletta et celles, plus haut perchées, d' Elisabetta Bettini évoluant à l'unisson. Et comment ne pas se sentir porté par les grisants arpèges d'accords où se mire le low/mid tempo « In the Mists of Time » ? Une véritable invitation au voyage en d'oniriques contrées qui, assurément, poussera à une remise en selle sitôt l'ultime mesure du propos envolée.
Ayant parfois opté pour d'amples pièces en actes estampées metal symphonique progressif, la troupe révèle une rare capacité à nous assigner à résidence, et ce sans avoir à forcer le trait. Ce qu'illustre le low tempo progressif aux accents death gothique «
On the Road to Babylon », petite fresque à la fois épique et romanesque, à mi-chemin entre
Ravenscry,
Autumn et
Draconian, déroulant ses quelque 6:21 minutes d'une traversée aussi tumultueuse qu'envoûtante. Nous immergeant dans de gorgonesques espaces tout en laissant entrevoir de régénérants rayons de soleil, à l'image d'un duo mixte en voix de contraste bien habité, suivant en prime une sente mélodique aux fines nuances, cette ample et troublante offrande ne se quittera qu'à regret.
Lorsque les lumières se font tamisées, toute source de tension s'évanouira comme par enchantement, nos compères nous adressant par là même leurs mots bleus les plus sensibles. Ce qu'atteste « Walk on the Sky », poignante ballade atmosphérique et progressive aux accents dark gothique que n'auraient reniée ni
Lacuna Coil ni
Evanescence. Dotée de riffs ronronnants, d'enchaînements intra piste finement esquissés, d'un refrain d'une redoutable efficacité et mise en habits de soie par les ensorcelantes patines de la maîtresse de cérémonie, la tendre aubade pourra trouver un débouché favorable à son assimilation auprès de l'aficionado du genre intimiste. Difficile également d'esquiver les vibes enchanteresses dont nous abreuvent les hypnotiques portées des couplets inscrites dans les gênes de «
Nothing » et « Critical System
Failure », ballades romantiques jusqu'au bout des ongles, toutes deux sous-tendues par les caresses oratoires de la princesse et progressivement enveloppantes. Enfin, à l'aune de son délicat picking à la guitare acoustique et de la graduelle densification de son corps orchestral, c'est d'un battement de cils que la ballade power progressive «
Time to Rise » gagnera le cœur de ceux qui y auront plongé le tympan.
Pour son retour, le combo italien signe une œuvre aussi pénétrante que pimpante, efficace sans pour autant s'avérer tapageuse, reposant sur une qualité de production d'ensemble difficile à prendre en défaut et transpirant la féconde inspiration mélodique de ses auteurs. Variée sur les plans rythmique et vocal, la goûteuse galette l'est en revanche un peu moins eu égard à ses ambiances et aux exercices de style développés. En outre, davantage de ferveur et d'emphase, la concession de quelques prises de risques doublées d'un zeste d'originalité supplémentaire auraient permis au collectif transalpin de se démarquer plus nettement encore de ses nombreux opposants.
Cependant, fortement chargée en émotion, révélant une technicité instrumentale éprouvée, octroyant des arrangements de fort bonne facture et mise en valeur par l'ensorcelant filet de voix de la belle, la rondelle n'a nullement tari d'atouts pour nous happer ; autant de flèches enflammées décochées par la troupe pour espérer la voir jeter un pavé dans la mare et, plus encore, lui autoriser dès lors l'accès au rang de valeur confirmée de ce pléthorique registre metal. Aussi, l'aficionado d'un rock'n'metal mélodico-symphonique gothique élégant et tempéré, voire intimiste, se délectera-t-il d'un troisième mouvement aussi chavirant que solaire, profondément félin...
Note : 15,5/20
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire