I Feel the Everblack Festering Within Me

Liste des groupes Death Symphonique Lorna Shore I Feel the Everblack Festering Within Me
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18/20
Nom du groupe Lorna Shore
Nom de l'album I Feel the Everblack Festering Within Me
Type Album
Date de parution 12 Septembre 2025
Labels Century Media
Style MusicalDeath Symphonique
Membres possèdant cet album34

Tracklist

1.
 Prison of Flesh
 07:00
2.
 Oblivion
 08:20
3.
 In Darkness
 06:43
4.
 Unbreakable
 04:49
5.
 Glenwood
 06:44
6.
 Lionheart
 05:44
7.
 Death Can Take Me
 07:16
8.
 War Machine
 04:54
9.
 A Nameless Hymn
 05:14
10.
 Forevermore
 09:47

Durée totale : 01:06:31

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Lorna Shore


Chronique @ Groaw

23 Octobre 2025

Une nouvelle odyssée sonore et une nouvelle claque monumentale entre chaos et intensité émotionnelle

Il y a des groupes qui se contentent d’évoluer dans leur niche et d’autres qui repoussent les frontières jusqu’à redéfinir un genre. Lorna Shore appartient sans nul doute à cette seconde catégorie, celle des formations capables de transformer la violence brute en une expérience quasi mystique. Les Américains ont parcouru un long chemin depuis leurs débuts deathcore encore hésitants. Leur trajectoire s’est forgée dans les tourments entre des changements de line-up, une recherche d’identité et des explorations stylistiques … jusqu’à ce qu’une rencontre décisive fasse définitivement basculer leur destin.
L’arrivée de Will Ramos en 2021 a marqué un tournant, un frontman dont la voix semble tout droit sortie des profondeurs de l’abîme, une capacité de passer du growl le plus abyssal aux hurlements spectraux avec une précision inhumaine. Autour de lui, Adam De Micco, un des guitaristes et le cerveau musical du groupe, a bâti un univers qui conjugue la rusticité du deathcore, la solennité du black metal et la démesure du symphonique pour signer un son à la fois baroque et apocalyptique où chaque note semble ciselée dans le chaos.

C’est avec Pain Remains (2022) que le quintet a atteint l’apogée de cette métamorphose grâce à un disque dantesque, cathartique qui a transcendé les codes du metal extrême pour toucher à quelque chose de profondément humain entre la douleur, la perte et la beauté dans la destruction. Les trois actes finaux ont permis de former un requiem flamboyant, une fresque sonore à la fois grandiloquente et sincère où les orchestrations épiques se fondent dans une brillance émotionnelle rarement vue dans le genre. Cet album n’a pas seulement consacré le collectif américain puisqu’il semble avoir placé la barre si haut qu’il semble presque impossible désormais de la dépasser.

Et c’est précisément là que naît la tension autour de leur nouvel opus, I Feel the Everblack Festering Within Me. Comment écrire une suite après une telle déflagration artistique ? Comment réinventer la tragédie sans la répéter ? Le titre lui-même semble répondre puisqu’il nous plonge encore plus profondément dans les abysses et explore avec une intensité nouvelle la part d’ombre que le précédent ouvrage ne faisait qu’entrevoir. Ce qui demeure admirable de la part des artistes, c’est cette capacité presque enfantine d’allier une fureur surnaturelle à une poésie symphonique à fleur de peau. Le groupe ne se contente plus d’empiler des riffs massifs ou des breakdowns ravageurs puisqu’il sculpte désormais sa brutalité et la chorégraphie. Chaque assaut sonore est contrebalancé par un sens aigu de la mélodie porté par des arrangements orchestraux d’une densité remarquable et des solos de guitare d’une expressivité sensationnelle.

L’ouverture Prison of Flesh en est l’illustration parfaite. Dès son premier coup de pinceau, nos musiciens condensent tout ce qu’ils savent faire de plus extrême, à savoir un instrumental oppressant, une prestation vocale dévastatrice, un rythme implacable mais aussi une architecture émotive qui fait toute la différence. Derrière cette déferlante de rage, on perçoit une fragilité, une peur viscérale de perdre pied. Au-delà de la puissance du deathcore, la composition prend toute sa force à travers un lyrisme personnel, une transformation du spectre de la démence en une métaphore universelle, celle de la perte de soi et de la désagrégation de l’esprit. Le titre se clôt sur un breakdown dantesque, un passage où les notes, les cris et les silences sonnent l’inéluctable déclin.
Si le tableau oscille entre hostilité et ardeur, il offre également des récits introspectifs où l’effervescence laisse davantage la place à la mélancolie et à la vulnérabilité, à l’instar de Greenwood. Le morceau se distingue par une orchestration soignée et un riffing doux-amer chargé de nostalgie. Véritable exutoire pour une relation père-enfant compliquée, le temps perdu et les occasions manquées, la tristesse s’exprime à travers des passages où tumulte et combativité cèdent la place à des instants suspendus. Les guitares et le chant se mêlent pour peindre les peines et les regrets avec une intensité bouleversante.

Certaines pistes impressionnent aussi par leur souffle épique et leur dimension symphonique. Lionheart pousse encore plus loin l’intégration des éléments orchestraux et des chœurs et utilise ces derniers non comme un simple ornement mais comme un véritable vecteur d’émotion et de narration. La mélodie illustre la capacité des Américains à fusionner agressivité titanesque et élan vocal mémorable pour créer une fresque sonore qui transcende la hargne brute pour toucher à quelque chose de quasi spirituel.
A l’inverse, plusieurs passages « expérimentaux » s’avèrent assez décevants et dénotent par rapport à l’ensemble de l’album. Avec ses riffs chromatiques et son inspiration thrash/death traditionnel, War Machine peine à capturer l’essence qui rend les autres compositions si captivantes. De même, sa production moins nuancée renforce cette impression d’inachèvement et contraste avec la richesse orchestrale et les arrangements complexes. Le brutalité reste mécanique et les rares résonances mélodiques ne parviennent pas à gommer cette parenthèse où la magie du groupe semble momentanément suspendue.

Heureusement, ces quelques erreurs de parcours seront vite oubliés à l’approche du final Forevermore. Véritable couronnement du disque, cette pièce de près de dix minutes est un voyage sonore qui combine déchaînement monumental et gravité émotionnelle. Les premières notes invoquent une atmosphère majestueuse où les orchestrations se déploient comme un voile solennel sur des riffs mystiques et des lignes vocales spectrales mariées au chant déchirant de Will Ramos. Le morceau impose une tension presque dramatique qui se développe au fur et à mesure du temps et qui oscille entre rancœur et souffrance, entre cruauté et beauté. Là où certaines chansons se contentent d’impressionner par leur pugnacité, celui-ci transcende la vision du deathcore symphonique grâce à un bel équilibre entre technique et émotion. On ressent tour à tour la détresse, la révolte et la grandeur tragique qui nous laisse le souffle coupé et qui scelle l’opus comme une expérience totale, à la fois écrasante et bouleversante.

I Feel the Everblack Festering Within Me est un album qui confirme la stature de Lorna Shore comme l’un des groupes les plus audacieux et fascinants du metal extrême contemporain. Il impressionne une nouvelle fois par sa capacité à conjuguer violence inouïe et sensibilité émotionnelle pour nous offrir une recherche sonore à la fois écrasante et humaine.
Si l’ensemble séduit par sa densité, sa richesse orchestrale et sa virtuosité instrumentale, certains passages montrent que l’expérimentation n’est pas toujours maîtrisée et que l’équilibre entre agressivité et mélodie peut parfois vaciller. Ces petites failles, loin de ternir l’ouvrage, contribuent même à humaniser le projet et rappellent que le quintet américain continue de repousser les limites de son art.
Ce cinquième essai marque ainsi une nouvelle plongée intense et ambitieuse dans l’univers du collectif, où la technique, la dramaturgie et l’émotion se rencontrent pour créer un ensemble cohérent et marquant. Il permet également de réaffirmer une volonté de défier les codes du genre et de livrer une musique capable de toucher autant par sa puissance que par sa profondeur.

2 Commentaires

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Ensiferum93 - 24 Octobre 2025:

Groaw, si tu savais...ça fait un mois que je réactualise quotidiennement SoM en espérant y voir apparaître ta chronique de cet album. Et ça y est, mon cadeau de fin de semaine est arrivé, et je t'en remercie sincèrement. Avant de la lire je me suis fait un petit suspense sur la note "Il ne peut pas mettre en dessous de 18, il ne peut ABSOLUMENT pas mettre en dessous de 18". 
Ma première écoute a étonnamment été teintée de déception en me disant "C'est Pain Remains revisité". Quelle erreur de jugement ! Au fur et à mesure des (trop nombreuses) écoutes, l'album s'est révélé dans toute sa splendeur, avec en effet des éléments déjà connus mais une densification mélodique hallucinante. 
C'est drôle car à la fois je comprends ton point de vue sur "War Machine", autant je le ressens vraiment comme un morceau plus simple qui fait du bien pour presque respirer dans tant de grandiloquence. 
Et pour finir - même si je pourrais faire un commentaire chronique tant il y a de choses à dire - ce que j'ai trouvé vraiment nouveau par rapport aux précédentes productions, c'est l'utilisation des silences, qui créent un effet d'attente et qui rendent la reprise musicale encore plus jouissive. 
Mon seul micro bémol réside dans le mix, où la guitare rythmique est parfois difficile à trouver tant il se passe de choses, et l'intro de Forevermore qui, même avec de supers enceintes, donne un rendu un peu brouillon (peut-être est-ce voulu ?) avant quelque chose de plus distinct. 
Je m'arrête là, en te remerciant une fois encore pour ton écrit, aussi agréable à lire que ce chef d'oeuvre ne l'est à écouter :)

 
clhclh - 01 Novembre 2025:

Merci pour cette chronique qui résume bien le contenu de cet album monstrueux. Manque peut-être un commentaire sur Oblivion, le morceau que j'écoute le plus.

Quand j'ai découvert ce groupe avec la trilogie "Pain Remains" fin 2024 (oui je sais, je suis long à la détente mais j'ai plus de 50 ans...), je suis resté sans voix, absourdi... Violence, Mélodie, Puissance, Intensité, Emotion, mélange de genres... Un chef d'oeuvre qui m'a retourné et marqué au fer rouge à jamais... et qui restera comme une de mes plus belles découvertes musicales métaliques (en 35 ans!).

A l'arrivée de ce nouvel album, j'étais un peu inquiet... Comment faire mieux? Impossible? Faire aussi bien? Compliqué...
Et finalement, après plusieurs écoutes (30 écoutes la semaine de sortie de l'album), je dois avouer qu'ils l'ont fait... Au moins aussi bien. Mais impossible de départager ces 2 albums pour le moment. A chaque écoute je finis léssivé... mais complétement libéré... l'effet cathartique...

Cet album est (pour moi) plus diversifié dans les ambiances où chaque morceau a sa propre identité là ou Pain Remains est peut être plus linéraire (ce n'est pas une critique, au contraire). 
C'est marrant que vous parliez de War Machine, perso la première fois, j'ai cru que c'était une reprise d'un groupe de thrash de ma jeunesse! Compliqué pour moi au début (sur un album de LS), je l'apprécie maintenant pour cette diversité justement...

Un dernier mot sur Will Ramos. Pour moi, le meilleur chanteur de metal extrême du moment. Quelle performance une nouvelle fois... Quelle technique... Quelle puissance... Quelle profondeur... Un monstre... Mais son chant ne serait pas autant mis en valeur sans tout le travaille musical, symphonique et mélodique des autres membres du groupe.

Merci LS pour ces 2 albums extraordinaires.

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